Les radicaux sont des espèces chimiques possédant au moins un électron non apparié. La spectroscopie paramagnétique électronique (RPE) permet de détecter ces espèces radicalaires.[…]
Accédez au Zoom sur Les radicaux : quelques aspects particuliers…
Biochar est un mot résultant de la contraction en anglais de « biocharcoal » qui désigne un charbon d’origine végétale.
Le biochar est proposé pour l’amendement des sols afin d’en augmenter les qualités et les rendements des productions agricoles.
Le biochar est issu de la biomasse provenant de déchets de bois formulés sous forme de pellets et non issue de la coupe de bois, ce qui évite les déforestations provoquées pour l’obtention traditionnelle du charbon de bois.
Le biochar est produit par pyrolyse de ces déchets, procédé qui consiste en un chauffage modéré entre 250°C et 650°C en l’absence de dioxygène. Il en résulte la production de produits gazeux (méthane et dihydrogène utilisables comme combustibles) mais aussi des produits liquides (hydrocarbures à usage de biocarburant) et d’un composé solide noir qui est le biochar. C’est un procédé sans émission de CO2, qui a été mis au point depuis une douzaine d’années à la suite des travaux de l’équipe Lehmann de l’Université Cornell à Ithaca dans l’état de New York.
La pyrolyse lente vers 350°C conduit à une formation à 35 % de biochar et 10 % de gaz (i). Ainsi il faut presque 4 tonnes de déchets de bois à 75 % de matière sèche pour produire 1 tonne de biochar avec une pureté pouvant atteindre 90 %, qui dans ce cas est appelé le biochar premium.
L’entreprise Pronatura a mis au point une technologie permettant aux machines actuelles de fonctionner 7 jours sur 7 et 24h sur 24 et de produire de 1 à 5 tonnes de biochar par jour. Le rendement (masse de biochar / masse de la biomasse à 15 % humidité) peut atteindre 45 %.
La porosité du biochar obtenu lui confère une surface spécifique (ii) de 420 m2/g qui conduit à de grandes capacités d’adsorption : c’est en quelque sorte un réservoir qui peut stocker jusqu’à deux fois et demie son volume en eau ! Quand la plante a besoin d’eau, pendant les périodes de sécheresse, elle ira la chercher dans ce que le biochar a stocké. Par ailleurs le biochar, en présence d’eau, donne un pH basique (entre 7 et 10) ce qui peut permettre de rééquilibrer l’acidité des sols.
Les effets de l’utilisation du biochar sur les augmentations de rendement concernant les cultures dans les zones tropicales comme celles des zones tempérées sont considérables : tomates +177 %, coton +100 %, maïs +150 %, blé +170 % par exemple !
Des startups sont actives sur ce secteur, en particulier « NetZero » cofondée par le climatologue Jean Jouzel.
La société Terra Fertilis à Argentan, dans l’Orne, est la seule entreprise en France à bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’ANSES : plusieurs villes en achètent pour leurs espaces verts, tout comme des pépiniéristes ainsi que des maraîchers et de nombreuses coopératives agricoles qui manifestent de plus en plus d’intérêt pour la culture du maïs et de la betterave.
Mais le biochar est aussi une solution pour la séquestration à long terme du carbone : une tonne de biochar stocke jusqu’à 3 tonnes de CO2. Actuellement le prix de revient du biochar varie entre 500 et 1000 € la tonne. La valorisation en crédits carbone peut alors être estimée à 300 € /ha. Ceci montre que l’intérêt économique dépend essentiellement du montant des crédits carbone (actuellement fixé à 40 € la tonne de carbone).
Les perspectives de l’utilisation du biochar sont nombreuses en dehors de l’agriculture. Par exemple les producteurs de silicium remplacent le charbon par du biochar dans la réduction industrielle de la silice, SiO2 + C = Si + CO2, ce qui conduit à un bilan carbone neutre car le carbone du biochar provient du bois.
Enfin, la Société Soler qui a deux usines dans l’Aube et une autre en Gironde est le leader en France de la production de biochar avec plus de 50 000 tonnes dans un marché national de 130 000 tonnes.
Il ne faut pas confondre le biochar avec le noir de carbone qui sert actuellement essentiellement à l’industrie des pneumatiques.
Et ne broyez pas du noir !
Jean-Pierre Foulon et l’équipe question du mois
(i) Il s’agit de pourcentage en masse.
(ii) La surface spécifique d’un matériau traduit sa capacité à fixer à l’échelle microscopique des molécules à sa surface. Exprimée en m²/g, c’est la surface disponible par unité de masse du matériau.
Pour en savoir plus :
Site Pleinchamp : Tout savoir ou presque sur le biochar (2023)
Site de Pro-Natura International : le biochar est un intrant qui augmente les rendements agricoles de manière écologique en séquestrant du carbone (2019)
Rapport du GIEC (2022) : Mitigation of climative change (chapitre 7)
Pour rappel
Un charbon très tendance, Jean-Claude Bernier, éditorial du 23 mai 2016 (Mediachimie.org)
Crédit illustration : Biochar après production, Oregon Department of Forestry FlickR, CC BY 2.0, Wikimedia commons
La Fondation de la Maison de la Chimie vous invite au colloque L’Hydrogène vecteur énergétique et réactif chimique organisé par le CNC, Comité National de la Chimie, dont la Fondation est partenaire.
le 7 décembre 2023
à la Maison de la chimie
L’inscription est gratuite mais obligatoire.
Pour connaitre le programme et vous inscrire, suivez ce lien.
Le colloque annuel de Femmes & Sciences se tiendra, en l'honneur de l'Année de la physique, en partenariat avec la Commission Femmes et Physique de la Société Française de Physique, le 24 novembre 2023, à l’École Normale Supérieure, 24 rue Lhomond, Paris 5.
Le thème développé sera « Femmes et physique : des modèles à la réalité. Pallier la sous-représentation des femmes en physique ».
Pour découvrir le programme et vous inscrire, c'est ici.
Le mercredi 22 novembre aura lieu un webinaire de formation destiné aux enseignants : Former à la science et par la science, développer le goût pour les sciences - Pallier la sous-représentation des filles en sciences, en physique en particulier.
En savoir plus.
Le dernier rapport de l’agence Internationale de l’Energie (AIE) attire notre attention sur le problème des réseaux électriques (1) qui sans nouveaux investissements et développements de réseaux intelligents vont bloquer les transitions énergétiques. En effet, les transitions énergétiques en Europe et dans le monde s’appuient entre autres sur une électrification bas carbone. L’électricité va remplacer le gaz, elle va propulser les voitures particulières et les camions, les projets hydrogène vont multiplier les électrolyseurs, les champs d’éoliennes off-shore en mer et les fermes photovoltaïques dans les déserts exigent des liaisons et de longs réseaux fiables et intelligents (2).
Il existe au niveau mondial 80 millions de kilomètres de lignes dont 7% pour le transport longue distance (THT 400 kV et HT 225 kV)* et 93% pour la distribution (MT 15 à 30 kV et BT 400 et 240 V)* au total cela représente plus de 100 allers -retours terre – lune ! Pour la France on identifie environ 100 000 km de lignes HT et environ 580 000 km de lignes MT et 650 000 km de lignes BT dont à peu près 213 000 km souterraines.
La transition énergétique va augmenter l’électrification bas carbone du chauffage, de l’industrie, du transport (3). Dans la consommation finale d’énergie mondiale, l’électricité qui représentait 21% en 2022, devrait monter jusqu’à 35% en 2050. D’où le risque de ne pouvoir faire face à ces progressions si on ne peut relier par un conducteur la production d’électricité au consommateur. L’Allemagne s’est trouvée dans ce cas où sa production éolienne basée prioritairement dans le nord ne pouvait être acheminée dans les zones de consommation du sud. On peut ajouter que, dans les pays européens où la densité de population est plutôt forte, l’implantation d’une ligne haute tension (225 kV) peut prendre 6 à 12 ans pour obtenir les permis et être construite. C’est bien plus rapide en Chine et en Inde.
Les conducteurs
L’AIE estime vital de construire et rénover environ 80 millions de kilomètres de réseau, c’est-à-dire l’équivalent du réseau actuel qui serait doublé d’ici 2040. C’est demander le doublement des investissements actuels et aussi des ressources en matériaux.
En effet, quels sont les matériaux nécessaires pour acheminer l’électricité de la centrale à votre prise de courant ? Les grands spécialistes des câbles font appel à deux bons conducteurs : le cuivre Cu de conductivité ρ = 59 106 S.m-1 l’Aluminium Al ρ = 37 106 S.m-1. L’aluminium est moins bon conducteur mais il est plus léger d=2,7 que le cuivre d= 8,9 et d’autre part les prix sont nettement différents 8 €/kg pour le cuivre et 2 €/kg pour l’aluminium. C’est pourquoi les alliages d’aluminium comportant comme additifs Mg et Si, parfois renforcés acier, sont utilisés pour les lignes aériennes HT, dites de transport, alors que le cuivre est plus utilisé pour les lignes basse tension (BT) dites de distribution et les lignes enterrées ou sous-marines (4).
Y aura-t-il suffisamment de métaux pour conduire cette (r)évolution ?
Le calcul est complexe : plus la tension est forte moins la section du câble est grande pour une puissance délivrée et donc le poids de conducteur par kilomètre est plus faible (5).
Pour le transport en haute tension par voie aérienne en fil d’aluminium il faut : 11 kg/Mw/km alors que pour la distribution en basse tension il faut 65 kg/Mw/km. Pour des conducteurs en cuivre il faut entre 101 kg/Mw/km et 438 kg/Mw/km suivant le transport ou la distribution de l’électricité. Une extrapolation sur les 88 millions de km de lignes à doubler dont 7% pour le transport et 93% pour la distribution donne respectivement 62 000 tonnes et 4,86 Mt d’aluminium et si la moitié de la distribution en basse tension est faite avec le cuivre il en faut 16,3 Mt.
Rappelons que les productions mondiales sont 67 Mt pour Al et 26 Mt pour le Cu. Pour la France on compte 100 000 km de lignes haute tension gérée par RTE, 586 000 km de moyenne tension (15-30 kV) et 650 000 km de basse tension (400 et 230 V) dont 230 000 km enterrées gérées par EDF. L’estimation des besoins en conducteur conduit à environ 40 000 tonnes d’Al et 286 000 tonnes de Cu s’il fallait doubler le réseau. Notons que dans l’infrastructure d’un réseau il y a aussi les pylônes (6) qui supportent le poids des lignes, ils sont environ 100 000. Ils peuvent atteindre 90 mètres en acier avec une dizaine d’isolateurs en céramique pour la THT. Ils relient entre eux les nœuds de connexion et surtout les postes de transformateurs HT /BT qui comportent des tonnes d’acier spéciaux fer silicium (3%) à grains orientés et à forte perméabilité magnétique, leur nombre est d’environ 4000 en France. D’ailleurs Enedis envisage de doubler ses investissements à 5,5 Mrds € par an comme RTE d’ici 2040 approchant des 10 Mrds € annuels pour le réseau électrique, coûts cachés de la transition.
Et la chimie où est-elle ?
Elle est déjà bien présente dans la chimie métallurgique de préparation de l’aluminium et du cuivre de qualités électriques, mais si vous avez déjà épluché un fil électrique vous avez constaté qu’autour de l’âme en cuivre une enveloppe plastique (7) jouait un rôle de protection et d’isolant. On utilise le polyéthylène pour les THT et HT, il peut être réticulé si on cherche une bonne résistance au froid (lignes de montagne). Les copolymères éthylène /propylène sont plus utilisés pour les moyennes et basses tensions. Les couches de caoutchouc et silicones qui ont de très bonnes résistances aux basses et hautes températures sont souvent présentes pour les câbles enterrés ou sous-marins.
Dans les transformateurs, outre les papiers siliconés de l’isolation, on trouve les huiles isolantes qui servent aussi de fluide caloporteur jusqu’aux radiateurs externes pour éliminer la chaleur due aux effets Joule et aux pertes par courants de Foucault. Ces huiles autrefois à base de PCB (polychlorobiphényle) remarquablement stables mais toxiques pour l’environnement ont été remplacées par des huiles mélangeant naphtènes (aromatiques) et alcènes à haut point éclair pour éviter les incendies.
Le prix des conducteurs, des isolants plastiques, des aciers à grains orientés (GO), des pylônes, des moyens de construction a explosé en 10 ans. Alors que les investissements dans les énergies renouvelables ont doublé en 10 ans, ceux en faveur des réseaux électriques sont restés stables. On a augmenté le volume du liquide dans le réservoir mais on n’a pas changé le petit robinet. Faute de prévision et dans un contexte de sous-investissement dans les réseaux s’est créé un goulot d’étranglement et on entre en dépendance du gaz et du charbon à la merci de coupures de courant dont l’impact économique est encore bien plus grand.
Jean-Claude Bernier
novembre 2023
*Très Haute Tension THT, Haut Tension HT, MT Moyenne Tension, BT Basse Tension
Pour en savoir plus
(1) Electricty grids and secure energy transitions (AIE) Octobre 2023
(2) Réseaux de transport de l’électricité et transition énergétique de S. Henry, article et conférence, Colloque Chimie et enjeux énergétiques, Fondation de la Maison de la chimie (2012)
(3) Le transport ou le stockage de l’énergie électrique, de C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie, l’énergie et le climat, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2014), ISBN : 978-2-7598-2098-6 (2014)
(4) Câble High-Tech en PACA (vidéo, Des Idées plein la tech’) Virtuel / Universcience / Fondation Internationale de la Maison de la Chimie
(5) Les métaux stratégiques pour l’énergie, de B. Goffé, article et conférence, Colloque Chimie et enjeux énergétiques, Fondation de la Maison de la chimie (2012)
(6) Zoom sur quelques aspects de la corrosion des ouvrages d’art, de J.-P. Foulon, Zoom sur… Mediachimie.org
(7) Polymères stratégiques, sensibles pour l’industrie : bioressources, recyclage, quelle stratégie ?, de D. Bortzmeyer, article et conférence, Colloque Chimie et matériaux stratégiques, Fondation de la Maison de la chimie (2022)
Crédit illustration : Lignes à haute tension (Sagy, Val d'Oise), France, Spedona/JH Mora, travail personnel / Wikimedia Commons (licence CC BY-SA 3.0)
Les vidéos et résumés des conférences du colloque Chimie, recyclage et économie circulaire du 8 novembre 2023 sont disponibles sur Mediachimie et sur Youtube ainsi que sur Viméo/Fondation de la Maison de la chimie.
Le quiz post-colloque est également en ligne. À vous de jouer !
Vous qui n’avez pas la possibilité de venir à la Fondation de la Maison de la Chimie le 8 novembre 2023, vous pouvez assister en direct au « Colloque Chimie, Recyclage et Économie Circulaire »
sur Mediachimie ou sur Youtube.
La captation des conférences sera par la suite disponible en ligne et leur mise à disposition sera indiquée sur la page d'accueil de Mediachimie.
Le prix Nobel de Physique 2023 a été décerné à trois chercheurs Anne L’Huillier, franco-suédoise, professeur à l’université de Lund, Pierre Agostini, professeur émérite à l’université d’Ohio et Ferenc Krausz du Max Planck Institute de Garching. Les deux premiers lauréats d’origine française ont démarré leurs recherches au CEA à Saclay. Ils ont ouvert la voie aux spectroscopies ultrarapides pour traquer les électrons et les molécules (1) lors de réactions chimiques. Ils ont pratiquement réussi à traquer les électrons par arrêt sur image lors d’un « flash » d’une durée ultra courte de l’ordre d’une attoseconde qui est d’un milliardième de milliardième de seconde (10-18 s). Lorsque l’on sait que la vitesse des électrons libres autour du noyau de l’atome est proche de la vitesse de la lumière soit 300.000 km/s (3.105 km/s) soit 3.1011 mm/s ou encore 3.1017 nm/s, une séquence de 10-18 s permet donc de « photographier » un électron avec une résolution de moins d’un nanomètre. Nous avons tous vu les images qui décomposent le saut d’un danseur étoile lors d’un ballet, c’est une succession de photos prises par une caméra à défilement rapide d’environ un millième de seconde.
Peut-on faire la même chose pour décrire le parcours d’un électron ?
Les prix Nobel répondent oui à condition d’avoir un flash tous les 10-18 secondes. Ce fut la découverte en 1988 par Anne L’Huillier d’opérer avec un laser au xénon (2) et de constater qu’il va émettre de la lumière sous forme « de génération d’harmoniques d’ordre élevé » très courtes, c’est-à-dire des émissions faibles de très hautes fréquences. C’est Pierre Agostini qui trouva le moyen de produire et de mesurer ces impulsions laser ultra courtes au Laboratoire d’Optique Appliquée du CEA en 2001. Les mesures donnaient alors un temps de 250 attosecondes à ces impulsions. Ferenc Krausz à Vienne, à cette même époque, mesura aussi quelques centaines d’attosecondes à ces impulsions similaires.
Quelles applications sont alors possibles ?
En observant et en contrôlant la présence d’un électron dans un matériau dans une molécule il serait possible d’en changer son état ou ses propriétés. Déjà fin 2020 des chercheurs de Rennes utilisant un laser rayons X ultra rapide avec des impulsions de la femtoseconde (10-15 s) avaient pu observer un transfert d’électron entre le fer et le cobalt dans une molécule de « bleu de Prusse » mixte (FeCo)4[Fe(CN)6]3 qui en changeait les propriétés magnétiques.
Avec des impulsions mille fois plus courtes la précision de la position de l’électron doit encore être meilleure. On peut aussi avec ces impulsions ultra courtes savoir près de quel atome se trouve l’électron et sans violer le principe d’Heisenberg le transférer sur un autre pour par exemple transformer un diélectrique en semi-conducteur (3). On peut ainsi avec l’imagination rendre plus efficace certaines réactions chimiques ou catalytiques. Cette nouvelle forme de spectroscopie ultra précise pourrait être utilisée pour déceler les prémices d’un cancer sur un échantillon sanguin (4). Elle devrait aussi permettre de mieux étudier l’état électronique de molécules biologiques comme l’ADN.
Cette nouvelle physique des temps ultra courts nous ouvre un domaine encore inexploré celui des mouvements électroniques autour des atomes et des molécules (5) que de nombreux chimistes aimeraient maitriser avec des retombées immenses en recherche fondamentale et appliquée.
Jean-Claude Bernier
octobre 2023
Les mouvements des électrons dans les atomes et les molécules sont si rapides qu’ils sont mesurés en attosecondes. Une attoseconde est à une seconde ce qu'une seconde est à l’âge de l’univers. © Johan Jarnestad/The Royal Swedish Academy of Sciences.
Pour en savoir plus
(1) L’atome boite à électrons (video, La Physique Autrement)
(2) Nouvelles techniques d’imagerie laser, M. Blanchard-Desce, Colloque La Chimie et la santé, Fondation de la Maison de la chimie (2010)
(3) La chimie à la lumière du laser : un intérêt réciproque, S. Forget, conférence et article, Colloque Chimie et lumière, Fondation de la Maison de la chimie (2020)
(4) Nano-diagnostic (vidéo, Des idées plein la Tech)
(5) Voir l’infiniment petit : les outils pour le nanomonde (vidéo CEA)
Crédit : Pierre Agostini, Ferenc Krausz et Anne L'Huillier. Prix Nobel de Physique 2023. Ill. Niklas Elmehed © Nobel Prize Outreach.
Pour sa 32e édition, du 6 au 16 octobre, la Fête de la science mouille le maillot et s’intéresse aux sports. Organisée chaque année par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, la Fête de la science est devenue un rendez-vous incontournable pour tous les publics. Pendant une dizaine de jours, familles, scolaires, étudiants, amateurs ou passionnés de sciences échangeront lors de milliers d’événements gratuits proposés partout en France.
Rendez-vous sur le site de la Fête de la science
Le thème de cette édition 2023, sciences et sport, s’inscrit dans un cadre sportif dense sur cette année scolaire 2023-2024 : Coupe du monde de rugby 2023, championnat d’Europe de football 2024 et bien sûr les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.
C’est pourquoi Mediachimie.org met à disposition de tous, des ressources en relation avec le sport. Au travers de cette sélection vous allez découvrir et comprendre pourquoi la chimie occupe une place si importante dans le domaine du sport de haut niveau. Visitez la page 2023-2024 : Sports et chimie de Mediachimie.org
Crédit : llustration : Capture écran site fetedelascience.fr
Cette année la Fête de la science, année préolympique oblige, est consacrée au sport. La Fondation de la Maison de la Chimie et Mediachimie.org ont déjà largement étoffé le sujet. Rappelons le colloque « La Chimie et le sport » de mars 2010 qui va être renouvelé et actualisé par le prochain colloque en février 2024 « Chimie et sports olympiques ». En effet, le sport par ses multiples facettes fait appel à la chimie. C’est d’abord dans notre corps avec tous nos systèmes biologiques, puis dans notre cerveau où des hormones sont libérées, le tout avec une alimentation équilibrée et sans dopage. Mais si les performances s’améliorent c’est aussi grâce aux nouveaux matériaux.
La machine biologique
Quand on a une activité sportive nos muscles ont besoin d’énergie (1) (2). Cette énergie est stockée et transportée dans nos cellules sous forme de molécules d’ATP (adénosine triphosphate) qui par hydrolyse va donner un phosphate inorganique Pi et l’ADP (adénosine diphosphate) avec surtout de l’énergie libérée utilisable par l’organisme. L’ATP nous est fournie à chaque fois que nous respirons par l’oxygène transporté dans nos milliards de cellules et par le glucose ou les acides gras qui viennent de notre alimentation et sont transformés en ATP. Nos muscles sont composés de fibres où se juxtaposent deux types de protéines, l’actine et la myosine. Lorsque le cerveau commande un mouvement, le message acheminé vers le muscle comporte l’ATP mais aussi des ions calcium qui vont agir sur ces deux protéines et commander la contraction ou le relâchement. Pour que notre corps marche bien pour pratiquer un sport retenons qu’il faut de l’oxygène et donc bien respirer et des sucres et des protéines, donc bien s’alimenter.
Le cerveau
Ces molécules ne sont pas seules motrices pour la pratique du sport, il y a aussi des hormones qui sont fabriquées dans le cerveau (3) surtout par deux glandes, l’hypophyse et l’hypothalamus. C’est par exemple l’endorphine qui donne une sensation de bien-être. Notons aussi que pour les grands champions qui dépassent leurs limites les endorphines comme toute morphine a une capacité analgésique qui masque la douleur d’un effort intense (4). Une autre hormone, la dopamine, procure une sensation de plaisir et diminue la fatigue. On voit souvent son action lorsqu’un grand champion a gagné une course : son bonheur efface un peu les séquelles de son effort final. N’oublions pas non plus l’adrénaline que procure toujours un challenge que l’on se donne : elle augmente notre résistance au stress. Enfin une dernière sécrétion, celle de la sérotonine qui a une action sur la détente et le sommeil. Ce sont évidemment des libérations exacerbées par des entrainements intenses de nos grands champion. Mais nous en bénéficions lorsque nous pratiquons à notre niveau (5) un sport, des molécules qui ont des effets bénéfiques sur notre santé mentale et notre santé tout court !
Les matériaux de la performance
Usain Bolt est recordman du 100 m grâce à ses capacités naturelles et à son entrainement, mais aussi grâce aux super-chaussures (6) avec au moins 4 couches : une semelle externe élastique avec des crampons légers, une semelle interne rigide en composite carbone – carbone, une couche de mousse polyester, une tige et un tissu qui maintiennent le pied en PTFE. Les records en demi-fond le doivent aussi aux nouvelles pistes d’athlétisme en polyuréthane disposant en sous-couches de granulés de caoutchouc ménageant de petites poches d’air. La piste absorbe l’énergie mais le renvoie au coureur avec un effet « trampolino ».
Si Armand Duplantis a franchi 6,23 mètres au saut à la perche en septembre, c’est bien sûr dû à ses aptitudes acrobatiques et à son entrainement, mais aussi à sa perche fabriquée en matériau composite (7) avec des fibres de carbone noyées dans des polyesters. S’il avait eu un bambou ou une perche en aluminium il aurait plafonné à 4 ou 5 mètres.
Oui l’entrainement est essentiel mais la chimie des matériaux booste les performances en athlétisme mais aussi en ski, en canoé kayak, en voile et en vélo.
Pour courir il faut de l’essence
Vous avez déjà entendu ces commentaires de reporters sportifs concernant un battu à l’arrivée : « oui il n’avait plus de jus ». En effet il y a a nécessité pour les sports qui demandent un effort de longue durée, vélo, tennis, marathon…, d’avoir une bonne alimentation avant, durant et après l’effort : une bonne hydratation, des protéines légères ou des sucres assimilables rapidement durant l’effort et avant la compétition des sucres lents ou au contraire un aliment hyper protéiné et sans sucres. Eviter les boissons vitaminées et surtout les aliments dits « dopants ». Il y a toujours suivant les disciplines des soupçons de dopages, souvent avec des molécules de médicaments que l’on détourne de leur usage. Heureusement de plus en plus les fédérations internationales augmentent le nombre de substances interdites et les contrôles. La chimie analytique a développé pour cela des moyens de détection.
Bougez, courez, pédalez, sautez, lancez, jouez, vous allez déjouer le stress, vous éloignerez les maladies cardiovasculaires, l’obésité, l’ostéoporose et le « mal de dos ». En un mot vous vivrez mieux !
Octobre 2023
Jean-Claude Bernier
Pour en savoir plus
(1) Quelle chimie dans le sport ? épisode 1 : le métabolisme énergétique aérobie (video), R. Blareau, Blablareau au labo / Mediachimie
(2) Quelle chimie dans le sport ? épisode 2 : les métabolismes énergétiques anaérobies (vidéo), R. Blareau, Blablareau au labo / Mediachimie
(3) Sport et cerveau, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie dans le sport, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2014), isbn : 978-2-7598-1238-7
(4) La fabrique des champions, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie dans le sport, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2014), isbn : 978-2-7598-1238-7
(5) Effets de l’exercice physique et de l’entrainement sur la neurochimie cérébrale : effets sur la performance et la santé mentale Ch.-Y. Guezennec Colloque La chimie et le sport, Fondation de la Maison de la chimie (2010)
(6) Chimie et pluie des records aux jeux de Tokyo, J.-Cl. Bernier, éditorial Mediachimie.org
(7) Les matériaux dans le sport, (r)évolutionnaires !, P. Bray, O. Garreau et J.C. Bernier, Fiche Chimie et… en fiches Mediachimie.org
Crédit : Image par Vectorportal.com, CC BY
Le prix Nobel de chimie qui vient d’être décerné ce 4 octobre par l’Académie royale des sciences de Suède couronne trois chercheurs Moungi G. Bawendi (MIT), Louis E. Brus (Columbia University) et Alexei I. Ekimov (Nanocrystals Technology Inc.) pour le développement des « points quantiques » dénommés encore « boites quantiques » ou en anglais « quantum dots ».
Sous ces noms énigmatiques on trouve une très belle découverte due au savoir-faire des chimistes qui savent fabriquer des nanoparticules de semi-conducteurs tels que des séléniures ou tellurures comme CdSe et CdTe mais aussi PbSe et ZnSe. On part de précurseurs organométalliques et par un réducteur doux sont obtenues des suspensions colloïdales maitrisables où l’on peut arrêter la croissance des particules à quelques nanomètres (entre 2 et 10 nm). C’est plus de 10 000 fois plus petit qu’un cheveu.
Qu’arrive-t-il à ces minuscules particules de semi-conducteurs ?
Alors que dans un semi-conducteur les électrons se partagent entre 2 bandes d’énergie séparées par un gap, le fait que l’on diminue exagérément la taille du semi-conducteur, les niveaux d’énergie ne s’organisent plus en bandes mais se réduisent à des niveaux individuels discrets : on dispose alors de niveaux « quantiques » et les transitions électroniques s’accompagnent d’une émission lumineuse qui dépend de la taille de la nanoparticule bleu pour 2 nm, vert pour 3 nm, rouge pour 6 nm…
Déposés sur un écran plat de télévision éclairés par une LED bleue ils émettent par fluorescence des fréquences qui élargissent l’espace colorimétrique avec une énergie abaissée. Avec les téléviseurs QLED différents des OLED on gagne en intensité lumineuse et en nombre de couleurs.
Une autre qualité de ces nano semi-conducteurs c’est que sous l’influence de la lumière ils sont capables d’émettre des électrons et donc un courant. Avec un bon drainage de celui-ci on peut disposer de vitres transparentes puisque leur taille est plus petite que certaines longueurs d’onde du visible. Même si leur rendement est faible (moins de 3%) on commence à imaginer pour les immeubles des vitrages photovoltaïques grâce aux « quantum dots ».
Enfin en imagerie médicale leur taille réduite permet d’avoir des pixels très petits et une définition d’image améliorée pour la détection de cellules cancéreuses.
Jean-Claude Bernier
Octobre 2023
Les quantum dots sont des nanoparticules de semi-conducteurs qui, éclairées par une LED bleue, émettent une lumière dont la couleur dépend de la taille. Source : Chimie et lumière (EDP Sciences, 2021) p. 144. ISBN: 9782759825073
Pour en savoir plus
- Nanomatériaux et nanotechnologies : quel nanomonde pour le futur ?, P. Rabu, conférence et article, Colloque Chimie, nanomatériaux et nanotechnologies, Fondation de la Maison de la chimie (2018)
- Colloque Chimie, nanomatériaux, nanotechnologies, colloque Fondation de la Maison de la chimie (2018) ; Chimie, nanomatériaux, nanotechnologies (EDP Sciences, 2019) ISBN : 9782759823765
- La chimie s’invite dans la guerre des télés, J.-C. Bernier, éditorial Mediachimie.org (mars 2017)
- La lumière électronique : du tube cathodique aux écrans plats J.-C. Bernier, conférence et article, Colloque Chimie et lumière, Fondation de la Maison de la chimie (2020)
- Zoom sur les progrès de l’optoélectronique : des LED aux OLED J.-P. Foulon, Zoom sur… Mediachimie.org (mars 2023)
Crédit : Moungi Bawendi, Louis Brus et Alexei Ekimov. Prix Nobel de Chimie 2023. Ill. Niklas Elmehed © Nobel Prize Outreach.
À la suite du décès d’une personne âgée, la collecte des radiographies d’une longue vie peut atteindre plusieurs kilos. Qu’en faire ?
Nous nous limiterons au cas des radiographies médicales argentiques que nos grands-parents et parents ont dans leurs placards et qui sont encore produites (cas des mammographies, des radios des hanches, clichés dentaires…). Celles-ci peuvent être déposées dans des centres de radiologie ou des pharmacies ou dans des déchetteries ayant des contenants dédiés.
Les radiographies médicales de type argentiques doivent être éliminées dans des filières spécifiques : enfouies elles entrainent une pollution de la nappe phréatique et incinérées une pollution de l’air en raison de la présence d’argent (1).
Premier tri
Les radiographies sont d’abord triées manuellement pour séparer le papier (emballage, compte-rendu) du film proprement dit. Celui-ci est avant impression un support en PET (PolyEthylene Terephthalate en anglais) recouvert d’une émulsion (contenant des cristaux d’halogénures d’argent (i) de 0,2 à 4 µm dans de la gélatine (ii)) et d’un revêtement de protection en gélatine pure (2). L’obtention de la radiographie se fait par réduction des ions Ag+ en argent métallique. Lorsque la radiographie arrive au circuit de recyclage elle se compose du support PET et d’un dépôt d’argent métallique incrusté dans la gélatine.
Le papier récupéré (avec un pourcentage massique de 3 à 40%) est broyé puis recyclé dans la filière papier.
Quant au film, il est plongé successivement dans des bains enzymatiques constituées de gélatinases. La gélatine recouvrant le film est alors hydrolysée et devient soluble dans l’eau. On sépare ainsi le support en PET (solide), qui sera recyclé dans la filière plastique, des jus de lavage (liquide) qui contiennent les enzymes et l’argent.
Recyclage du PET
Le PET est un polyester, polymère thermoplastique obtenu par la polycondensation de l’acide téréphtalique et de l’éthylène glycol selon (4) :
Un des recyclages possibles consiste depuis peu en une dépolymérisation à l’aide d’enzymes pour revenir in fine aux monomères, au diacide et à l’éthylène glycol (5).
L’autre mode de recyclage possible consiste à refondre le PET puis à l’utiliser dans une autre application comme les fibres polyesters par exemple.
Recyclage du jus pour obtenir l’argent
Ce jus est placé en filtre-presse : cet équipement permet la séparation liquide/solide à l’aide d’une filtration sous pression et de récupérer d’un côté le bain enzymatique qui est utilisé en boucle fermé et de l’autre les boues argentifères. Celles-ci sont alors calcinées. Les cendres de calcination sont fondues et on récupère ainsi l’argent métallique.
Ainsi chacun des constituants peut être recyclé : le papier, la matière plastique (PET) et l’argent qui représente moins de 1% du poids des films argentiques mais qui a une forte valeur ajoutée.
En résumé
Quelques chiffres
En France, en 2022 l’argent recyclé ne représente qu’une centaine de tonnes soit moins de 2% de l’argent recyclé mondialement (6), et seule une partie provient des radiographies mais « chaque geste compte ». Les besoins en argent sont pourtant importants : en particulier 90 % des cellules photovoltaïques sont formées d’une fine couche d’argent et représentent 15 % de leur coût de revient (7).
Lydie Amann et l’équipe question du mois
(i) Les halogénures d’argent utilisés sont des bromures d’argent AgBr ou chlorures d’argent AgCl.
(ii) La gélatine est un mélange de protéine et d’eau qui forme un gel.
Pour en savoir plus
(1) Voir les sites web des sociétés "Rhône Alpes Argent" et "Chastanier radiographies" (en particulier pour cette dernière société la page "Radiographies" et la page "Archives médicales > Visite virtuelle de l'usine")
(2) La réalisation du support est comparable à celle des films argentiques pour photographies. Consulter Photographie/Émulsions argentiques/Préparation des surfaces sensibles noir et blanc sur wikilivres.
(3.a) Fin de vie des plastiques : le mariage réussi des plastiques et des enzymes/ressource/fin-de-vie-des-plastiques-le-mariage-r%C3%A9ussi-des-plastiques-et-des-enzymes A. Marty, article et conférence, Colloque Chimie et biologie de synthèse, Fondation de la Maison de la chimie (2018)
(3.b) Vidéo sur la biodégradation du PET, Déchets plastiques : les enzymes font le ménage, Coproduction Fondation de la Maison de la Chimie/Virtuel
(4) Comment le recyclage en chimie contribue-t-il à l'économie circulaire ? Fiche Grand Oral Nathan Mediachimie pp. 6-7
(5) Recyclage des plastiques sur le site IFP Énergies nouvelles
(6) Enquête mondiale sur l’argent 2023 World Silver Survey sur le site The Silver Institute
(7) Données industrielles relatives à l’argent sur le site de l’Elementarium
La Coupe du monde de rugby en France suscite en cet automne un engouement très britannique mais aussi très international avec ces vingt équipes venues du monde entier. On connait moins le rugby que le football avec ses règles où se mélangent les passes en arrière et les mêlées organisées et où 30 athlètes affamés se disputent la possession d’un curieux ballon ovale.
En 2023 le ballon officiel de match « INNOVO » du fabricant du Sussex Gilbert n’a plus grand-chose à voir avec le ballon originel que prit à la main William Webb Ellis vers 1823 qui créa ainsi ce nouveau jeu. Il est probable que ce fut un ballon de football plutôt rond qu’ovale qui fut d’abord fabriqué par un cordonnier William Gilbert de la ville de Rugby.
C’est donc à lui qu’on attribue l’invention du ballon de rugby fait au départ de vessies de porc fraiches recouvertes de quatre panneaux de cuir. C’est à la demande des étudiants qu’il fait évoluer leurs formes avec des ballons de plus en plus ovales, plus faciles à attraper, à tenir en courant, roulant plus mal et sortant moins du terrain. De 1850 à 1880 la petite entreprise fabrique plusieurs milliers de ballons par an.
Une première modification est introduite par Richard Lindon qui invente une vessie en caoutchouc (1) qui se gonfle avec une pompe à air et évite de gonfler à la bouche les vessies de porc qui ont parfois contaminé les ouvriers chargés du gonflage. Progressivement les dimensions du ballon se normalisent autour de 30 cm de long et de 60 cm de circonférence du petit périmètre. Si la vessie reste en caoutchouc souple le ballon en cuir est lisse et donc glissant ; lorsqu’il pleut le cuir absorbe l’eau en augmentant son poids et se déforme plus facilement ce qui n’arrange pas le jeu au pied et complique la tâche des tireurs qui transforment les essais par tirs au but.
C’est dans les années 1990 que le ballon « synthétique » va s’imposer : le cuir va être remplacé par du caoutchouc plus dur, du polychlorure de vinyle (PVC) (2) ou du polyuréthane (PU) (3). La vessie en latex est de plus en plus substituée par un caoutchouc butyl (4) et à une pression de 9,5 PSI (i) elle se dégonfle moins.
Les nouvelles compétitions, Tournoi des Nations, Coupes d’Europe et Coupes du monde, vont voir une course à l’innovation. La petite entreprise Gilbert devenue grande reste encore une marque de référence devant Adidas et Summit. C’est elle qui est en 2023 la marque officielle de la Coupe du monde en France avec le ballon « INNOVO » qui contient une vessie en copolymère butyl (ii) protégée par 4 plis de polycoton et caoutchouc et une double valve brevetée « truflight » insérée dans une couture des 4 panneaux de polyuréthane sur lesquels sont moulés des « crips », picots en forme d’étoiles de hauteurs millimétriques différentes du centre vers les extrémités permettant une meilleure dispersion de l’eau, une bonne prise en main et un aérodynamisme amélioré. Dissimulées dans les coutures, faites à la main, la double valve et son contrepoids contribuent à un équilibre parfait. En 2023 cette double valve munie de capteurs donne naissance avec le partenaire de Gilbert Sportable Technologies à un « ballon intelligent » (5). Les entraineurs ou les équipes peuvent intégrer des ballons connectés et afficher sur écran d’ordinateur les statistiques du match, en temps réel. La vitesse du ballon, sa rotation, la distance de la passe, la précision du coup de pied… toutes données exploitables, ne serait-ce que pour préparer la prochaine Coupe du monde en Australie en 2027.
Plus simple et terre à terre pour les enfants et l’initiation à ce beau sport, préférez le ballon en mousse de polyester qui est aussi amusant.
Jean-Claude Bernier
septembre 2023
(i) Le PSI ou Pound-force/square inch est l'unité anglosaxone de mesure de pression. 1 PSI = 6,89476 kPa = 0,0689476 Bar donc 9,5 PSI = 0,655 bar.
(ii) La caoutchouc butyl est un copolymère d’isobutylène et d’isoprène
Pour en savoir plus
(1) Comment fabriquer des pneus à partir d’un arbre ? La vulcanisation, Jean-Claude Bernier (fiche Une réaction en un clin d'oeil)
(2) PVC voir Produit du jour de la société chimique de France
(3) Chimie et pluie de records aux jeux olympiques de Tokyo, Jean-Claude Bernier (éditorial) ; PU voir Produit du jour de la société chimique de France
(4) Le caoutchouc synthétique BUP
(5) Shootez, vous êtes connectés, Jean-Claude Bernier (editorial)
Crédit illustration : Erwan Harzic- Travail personnel / Wikimedia Commons (licence CC BY-SA 4.0)
La Fondation de la Maison de la Chimie lance le Grand Prix des Jeunes Journalistes de la Chimie 2023-2024 (GPJJC 2023-2024).
Le but est d’élire le meilleur reportage (article et interview filmée) sur un thème d’actualité lié à la chimie et de découvrir le meilleur binôme de journalistes de la nouvelle génération.
Un jury composé de scientifiques et de journalistes de presse écrite et audiovisuelle sélectionnera parmi l’ensemble des candidatures quatre binômes d’étudiants journalistes sur dossier pour participer au concours. S’ensuivra une période d’investigations et de production de 3 mois et l’annonce des lauréats en juin 2024.
Candidatez-en binômes jusqu’au 1 décembre 2023 : En savoir plus
Le 70e congrès national annuel de l'Union des Professeurs de Physique et de Chimie se déroulera à Clermont-Ferrand du 28 au 31 octobre 2023.
Les inscriptions seront closes le 24 septembre 2023.
Ne tardez pas à faire vos choix et à vous inscrire !
Toutes les informations, les détails et les inscriptions sur https://udppc-clfd2023.sciencesconf.org/
Voyage au cœur de la matière est l’occasion de rencontres et d’échanges entre enseignants de physique et chimie, chercheurs, universitaires, personnels de laboratoire, étudiants, professionnels de l’éducation et industriels.
Venez profiter des conférences plénières, ateliers et conférences à la carte, visites de laboratoires et d'entreprises, des exposants, du repas de gala, des visites touristiques… Le congrès est toujours un moment exceptionnel de formation, de rencontres et d'échanges. Vous pourrez découvrir de nombreuses activités autour de la physique, la chimie et la géologie.
Le 15 avril 2023, quatre ans après l’incendie de Notre-Dame, les charpentiers ont posé le socle de la nouvelle flèche de la cathédrale qui devrait avoir retrouvé sa place dans le ciel de Paris fin 2023. Cet extraordinaire « chantier de Notre-Dame de Paris », les défis de la restauration et les travaux des équipes qui participent à cette restauration sont présentés dans l’ouvrage Chimie et Notre-Dame de Paris.
Nous voulons rendre hommage et témoigner notre gratitude au Général Georgelin, maitre d’œuvre du Chantier de Notre-Dame de Paris, disparu tragiquement dans un accident le 18 août 2023, qui a été le « ciment » et « l’âme » de cette restauration. Sans lui nous n’aurions pas pu organiser le colloque Chimie et Notre-Dame dont est issu cet ouvrage, ni éditer ce livre. Grâce à lui, nous avons eu la contribution des meilleurs experts dans tous les domaines de compétences.
Il nous a fait l’honneur dans le premier chapitre intitulé « Le chantier de Notre-Dame de Paris : état et prospectives » de nous raconter en direct la sécurisation du chantier et les énormes défis relevés par les équipes présentes dès le premier jour, puis comment très vite grâce à l’extraordinaire motivation de toutes ces équipes, le nettoyage et la restauration ont commencé et comment s’est organisé cet exceptionnel chantier scientifique que le Général Georgelin a dirigé « tambour battant ».
Danièle Olivier
Vice-Présidente de la Fondation de la Maison de la Chimie
L’ouvrage Chimie et Notre-Dame de Paris est dès maintenant disponible en ligne en PDF
ou à partir du 31/08/2023 en version papier.
Conférence du Général Georgelin : voir la vidéo et le résumé | télécharger le chapitre en PDF
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Réservez votre journée du mercredi 8 novembre pour participer au colloque accessible au grand public à la Maison de la Chimie.
Colloque Chimie, Recyclage et Économie Circulaire
Mercredi 8 novembre 2023
Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris
Les programmes nationaux, les colloques et séminaires de réflexions nationaux et internationaux sur le thème du recyclage sont nombreux, notre objectif n’est pas de faire un nième colloque mais d’apporter sur ce sujet d’importance des exemples et des réponses aux questions que se posent le monde éducatif – élèves et enseignants – et le grand public. Ce thème est fondamental pour l’avenir de notre planète : ni la gestion des déchets envahissants , ni la mise en oeuvre des transitions énergétiques et écologiques ne pourront être mises en oeuvre sans le recyclage car les ressources en matières premières organiques et minérales n’y suffiront pas.
Il est nécessaire d’agir et nous souhaitons montrer l’importance mais aussi les difficultés de la chimie du recyclage qui est une chimie de la « dé et reconstruction » Il faut gérer à la fois la logistique des produits usagés et des déchets et l’économie des procédés en respectant les règles imposées en terme d’empreinte carbone.
Le recyclage apparaît comme une nouvelle discipline coûteuse mais indispensable dans laquelle les chimistes jouent et joueront un rôle important.
Les conférenciers ont été choisis parmi les meilleurs experts de l’industrie, de la recherche, de la politique et de l’économie, dans les différents domaines concernés.
Ce colloque est ouvert sur inscription à un large public avec une attention particulière aux jeunes et à leurs enseignants. Pour que ce colloque puisse être accessible au plus grand nombre, il sera diffusé en direct sur la chaine YouTube de Mediachimie.
Le niveau se veut accessible à tous pour permettre un large débat.
Danièle Olivier et Jean-Claude Bernier
Co-Présidents du comité d’organisation
Inscription gratuite et obligatoire : INSCRIPTIONS
Conception graphique : CB Defretin | Images : Adobe Stock – © Therina Groenewald – © monticellllo – © saelim – © sida – © VisualProduction – © Janar Siniväli – © Andrei Merkulov – © Joaquin Corbalan
Le 22 mars 2023 était la journée mondiale de l’eau qui met l'accent sur l'importance de l'eau douce. L’assemblée générale des Nations-Unies (1) soutient la réalisation de l'objectif de développement durable : eau propre et assainissement, pour tous d'ici à 2030.
Si l’eau recouvre 72 % de la surface du globe, son volume étant estimé à 1400 millions de km3 (2), elle est à 97,2 % salée et présente dans les océans et les mers intérieures. Il y a donc 2,8 % d’eau douce sur la Terre mais seulement 0,7 % sont disponibles (nappes phréatiques et minoritairement lacs et rivières) pour les besoins vitaux. En effet le reste de l’eau douce se trouve sous forme de glace et neige. L’augmentation de la population mondiale et le changement climatique accentuent cette demande sur cette réserve limitée en eau douce.
Mais l’accès à l’eau douce ne suffit pas. Encore faut-il qu’elle soit potable. 1/4 de la population mondiale, soit 2, milliards de personnes, vit sans accès à l’eau potable. En France l’eau courante au robinet n’est pas une pratique si ancienne. Cosette (3) allait chercher l’eau de la rivière avec son seau. C’était aux environs de 1820 et cette eau n’était pas contrôlée. Il a fallu attendre 1930 pour que 30 % des communes en France aient un réseau d’approvisionnement en eau potable et ce n’est qu’en 1980 que la quasi-totalité de la population y a eu accès. En 2020, en France, la consommation moyenne en eau potable quotidienne est de 149 L/personne (4).
De la source au robinet : comment obtient-on de l’eau potable ?
Plusieurs procédés de production d’eau potable existent selon l’origine de la ressource : eau souterraine (nappes phréatiques), eau de rivière, eau de surface, eau de mer.
Il s’agit in fine de fournir une eau propre à la consommation, c’est-à-dire claire et exempte de virus et de bactéries et de toute matière organique naturelle ou issue de pollutions (médicaments, pesticides…).
Le traitement des eaux issues des nappes phréatiques d’eau douce accessibles ou des eaux de rivières suit globalement les étapes suivantes (5) : pompage de l’eau, stockage provisoire d’eau brute à traiter, dégrillage puis tamisage, dans certaines unités élimination d’une partie du calcaire contenue dans l’eau (décarbonatation) par précipitation puis filtration, pré-ozonation, filtrations sur argile, post-ozonation, filtration sur charbon actif puis chloration avant acheminement via les canalisations jusqu’à l’usager final. Il y a passage par les châteaux d’eau pour maintenir la pression dans le réseau de distribution. Une étape supplémentaire pour éliminer les nitrates pourra être nécessaire dans certaines régions à l’agriculture intensive.
La molécule d’ozone ou trioxygène, de formule O3, est un gaz instable, donc produit sur le site de traitement de l’eau par décharge électrique (arc électrique) dans le dioxygène (6). L’ozone a un très fort pouvoir oxydant et est virucide et bactéricide. Il participe aussi à l’élimination des odeurs.
La pré-ozonation utilise de l’ozone faiblement concentré et permet de déstructurer les particules colloïdales et les macromolécules et d’oxyder le fer et le manganèse dans les eaux souterraines peu chargées en matière organique. Dans la post-ozonation, sa concentration est plus forte et le temps de contact plus long. Elle permet la destruction des molécules organiques.
La filtration sur charbon actif, permet in fine la rétention des micro-résidus issus de la post ozonation. Puis, l’eau de Javel (7) est utilisée pour l’étape dite de « chloration ». Cette chloration est nécessaire pour maintenir l’absence de virus et bactéries tout au long des kilomètres du réseau. L’ozone ne pourrait pas remplir ce rôle car, trop instable, elle ne reste pas dans l’eau contrairement à l’eau de Javel. Il y a toutefois des points de contrôles régulièrement répartis sur le réseau afin de réajuster si nécessaire sa concentration.
Toutes ces étapes consomment de l’électricité.
Le traitement de l’eau de mer
Avant de la rendre potable il faut préalablement ajouter l’étape de désalinisation. Deux procédés existent : la distillation et l’osmose inverse. Ces procédés consomment beaucoup d’énergie. L’osmose inverse est majoritairement préférée de nos jours car moins gourmande en énergie.
Le procédé d’osmose inverse nécessite l’usage d’une membrane semi-perméable (8) séparant deux compartiments, dont l’un d’entre eux contient l’eau de mer salée. Il faut alors exercer dans ce compartiment une pression supérieure à la pression osmotique (9), ce qui force alors l'eau à passer, via la membrane semi-perméable, dans l’autre compartiment où l’eau pure qui s’y accumule est sans sel. Dans la pratique la pression exercée évolue entre 50 et 70 bars. De nombreuses recherches ont lieu pour diminuer le coût énergétique et passent par l’amélioration de la perméabilité de la membrane permettant d’abaisser la pression à exercer, tout en conservant sa sélectivité. De grand espoirs sont mis dans des membranes biomimétiques hautement sélectives (10).
Près de 100 millions de m3 d’eau par jour sont produits par dessalement d’eau de mer, dans environ 15 000 installations situées dans 150 pays.
Une fois dessalée, l’eau doit être potabilisée selon les étapes préalablement citées. Il est aussi souvent nécessaire de réintroduire quelques sels minéraux pour la rendre consommable.
Du lavabo à la rivière : comment traite-t-on les eaux usées ?
Les eaux usées sont les eaux que nous rejetons vers les égouts, quand on fait la vaisselle et le ménage, quand nous nous lavons, quand nous allons aux toilettes… Il s’agit de dépolluer ces eaux usées, avant de les rejeter dans la rivière. Mais attention, cette eau dépolluée n’est pas potable.
Il est nécessaire dans un premier temps de séparer les matières en suspension des eaux usées. Après une étape de décantation qui permet de séparer l’eau à traiter des huiles et graisses qui surnagent et des sables et solides plus denses, l’eau sale subit un traitement biologique aérobie. Des bactéries et micro-organismes naturels « digèrent » les contaminants organiques en présence de l’oxygène de l’air.
Ces traitements biologiques sont très efficaces, très résistants aux variations de température et peuvent être utilisés efficacement dans presque tous les climats. L’eau ainsi dépolluée est rejetée à la rivière.
Dans certaines unités, l’eau peut, avant rejet à la rivière, subir une ultrafiltration membranaire. Une membrane perméable est constituée d’un tube souple présentant des micro-perforations, jouant le rôle de filtre, capables de retenir des protéines ayant une taille de 0,03 µm. L’eau et les ions monovalents (comme les ions sodium et chlorure), ainsi que les ions divalents comme les ions calcium ou manganèse passent la barrière de la membrane avec l’eau. L’eau rejetée à la rivière a alors la qualité d’une eau de piscine.
Par ailleurs les boues issues du traitement biologique peuvent subir un traitement anaérobie, produisant du méthane, CH4, nommé biogaz, source d’énergie. Ainsi les unités d’épuration des eaux usées, tendent de plus en plus à être autonomes en énergie.
Comment recycler les eaux usées ?
On peut l’envisager pour l’irrigation et le nettoyage de la voirie par exemple. Aujourd’hui seulement 0,6 % des eaux usées sont réutilisées en France alors qu’en Italie le pourcentage est de 8 %, 14 % en Espagne et 84 % en Israël.
Aux Sables d’Olonne en Vendée vient de démarrer la construction d’une usine de recyclage des eaux usées afin d’obtenir de l’eau potable, dans le cadre du programme Jourdain (11). Cette usine est une usine pilote pour la France et pour l’Europe. Le nom Jourdain est à la fois inspiré du fleuve Jourdain et du Bourgeois gentilhomme de Molière ! (12)
Cette usine sera connectée à la station d’épuration voisine et l’eau sera nettoyée en cinq étapes : ultrafiltration, osmose inverse, traitement aux UV qui élimine les microbes pathogènes avec une fiabilité de 99,99%, puis une chloration à l’eau de Javel, une filtration et enfin une reminéralisation (13).
Eau et Énergie : l’interdépendance
Comme on vient de le voir, l’ensemble du cycle de l’eau consomme de l’énergie, du pompage à l‘épuration. Cela représente 2 à 3 % de l’énergie mondiale utilisée. Dans les zones urbaines, 1 à 18 % de l’électricité sont utilisés pour traiter et transporter les eaux potables et usées.
La figure 1, indique des fourchettes de valeurs concernant la consommation en électricité des différentes opérations décrites précédemment tout au long du cycle de l’eau. Selon les cas de figure, le captage, la potabilisation, la distribution, la collecte et l’épuration de 1 m3 nécessitent entre 1,8 et 9,5 kWh.
Figure 1 : Besoins en électricité dans le cycle de l’eau. Source : Eau et énergie sont indissociables p. 12 (14)
La consommation énergétique dépend également de la nature de l’eau à traiter. Dans le tableau 1, les trois premières lignes concernent des eaux brutes toutes distribuées sans être embouteillées.
Tableau 1 : Consommation énergétique en fonction de l’eau à traiter. Source : Eau et énergie sont indissociables p. 12 (14)
Concernant l’eau en bouteille : il s’agit d’eaux minérales ou de source (15), issues d’eaux souterraines, microbiologiquement saines, et non traitées. Leur impact énergétique très élevé provient majoritairement des matières premières et de l’énergie nécessaires à la fabrication des bouteilles.
On retiendra donc que « Économiser l’eau revient à économiser aussi l’énergie ».
On peut identifier trois axes principaux pour réduire la consommation d’énergie dans le cycle de l’eau :
- développer de nouveaux concepts de stations d’épuration permettant de récupérer la chaleur et de produire de l’électricité́ à partir du biogaz ;
- mettre au point des membranes d’ultrafiltration et d’osmose inverse moins énergivores ;
- identifier tous les moyens de récupération de l’énergie consommée par les mises en pression au sein des procédés.
L’eau est essentielle à la vie. Il n’existe pas de substitut. Si l’énergie peut être renouvelable, l’eau n’est pas renouvelable ; depuis l’époque des dinosaures, la quantité́ d’eau douce sur la Terre n’a pratiquement pas évolué́. Il convient donc de la réutiliser au maximum. L’accroissement de la population, l’augmentation des standards de vie, la production de nourriture et l’industrialisation sans cesse croissante, engendrent une pression sur les ressources en eau qui n’a fait que croitre au cours des décennies. De plus, la pollution et la contamination des ressources en eau douce ont comme conséquence une diminution continue des réserves de qualité́ disponibles.
On notera qu’en France il existe un seul réseau de distribution d’eau à savoir d’eau potable et qu’il faut donc impérativement l’entretenir pour éviter les fuites (estimées à 20 %, soit pour 5 litres d’eau mis en distribution, 1 litre d’eau revient au milieu naturel sans passer par le consommateur) (16), ce qui est considérable. Et pour les citoyens que nous sommes, faisons tous ces petits et grands gestes pour ne pas gâcher l’eau (17).
Françoise Brénon et Odile Garreau
(1) Journée mondiale de l’eau des Nations-Unies
(2) L’Eau dans l'Univers, sur le site Eau France, le service public d'information sur l'eau
(3) Les Misérables de Victor Hugo
(4) Le service public d'information sur l'économie de l'eau
(5) Pour mieux comprendre ces étapes, consultez la fiche Chimie et… en fiches L’eau, une ressource indispensable pour la ville de A. Charles, A. Harari et J.-Cl. Bernier (Mediachimie.org) et le Memento degremont® Procédés et technologies (SUEZ)
(6) Pour en savoir plus sur l’obtention de l’ozone, voir le Memento degremont® Génération de l’ozone (SUEZ) et sur l’ozone en général, la question du mois L’ozone : bon ou mauvais ? L. Amann (Mediachimie.org)
(7) L’eau de Javel est une solution basique contenant les ions hypochlorite ClO-. Compte tenu du pH de l’eau distribuée, qui est proche de 7,5, il y a coexistence de l’ion ClO- et de la molécule d’acide hypochloreux HClO qui est le composé le plus virucide et bactéricide des deux, car non ionique il traverse plus facilement la membrane cellulaire. L’eau de Javel : sa chimie et son action biochimique, de G. Durliat, J.-L. Vignes et J.-N. Joffin, Bulletin de l'Union des physiciens, n° 792, vol. 91 (mars 1997) pp. 451-471
(8) Une membrane semi-perméable laisse passer l’eau mais pas les ions plus gros que la molécule d'eau, comme le sont les ions sodium Na+ et chlorure Cl-.
(9) La pression osmotique correspond à la différence des pressions exercées de part et d'autre d'une membrane semi-perméable par deux liquides contenant des ions de concentrations différentes.
Pour en savoir plus : L’osmose inverse, de J. Nahmias L’Actualité chimique n° 404 (février 2016) pp. 63-64
(10) Les canaux artificiels d’eau : des membranes biomimétiques pour le dessalement, de M. Barboiu, L’Actualité chimique n° 470 (février 2022) pp. 33-34
(11) Le Programme Jourdain sur le site Vendée Eau
(12) Le nom du programme évoque le fleuve Jourdain qui traverse Israël. Sa ressource partagée par les pays qui le bordent devient limitée. Israël est devenu un modèle pour sa réutilisation de plus de 90% de son eau potable et 50 % de son eau recyclée est consacrée à l’arrosage des terres cultivées.
Le nom fait aussi référence au Bourgeois gentilhomme ! Voir le Programme Jourdain sur le site de Veolia
(13) Pour en savoir plus consulter la fiche Chimie et… en fiches L’eau, une ressource indispensable pour la ville (figure2) de A. Charles, A. Harari et J.-Cl. Bernier (Mediachimie.org)
(14) Conférence et ressource Eau et énergie sont indissociables, de M. Florette et L. Duvivier, Colloque Chimie et enjeux énergétiques, Fondation de la Maison de la chimie (2012).
(15) Eaux conditionnées sur le site du Ministère, de la santé et de la prévention
(16) Rendement des réseaux d’eau potable, statistiques de 2012, sur le site Eau France, le service public d'information sur l'eau
(17) Consulter Comment économiser l’eau dans mon logement ?, sur le site Tout sur mon eau (SUEZ)
Crédit illustration : PublicDomainPictures/Pixabay
Depuis toujours la sécurité incendie a été la préoccupation des sociétés. Dès le XVIe siècle, les tentures des théâtres parisiens ont été traitées pour les rendre ininflammables. Mais c’est Gay-Lussac qui a publié en 1821 les premiers travaux scientifiques avec une note sur la propriété qu’ont les matières salines de rendre les tissus incombustibles (1).
Les feux de forêt souvent décrits dans les médias résultent de la combustion de l’élément carbone du bois. Le bois est un biopolymère composite tridimensionnel constitué de trois polymères de type polyglycoside : la cellulose (50%), l’hémicellulose (25%) et la lignine (25%). La combustion libère du dioxyde et du monoxyde de carbone (CO2 et CO), mais aussi des composés organiques volatils (COV), tels que des dérivés benzéniques ou terpéniques, qui sont très inflammables au contact de l’oxygène de l’air. De tout temps on a arrosé les feux avec de l’eau qui en se vaporisant chasse l’air et prive ainsi le feu en oxygène tout en faisant baisser la température. Peu à peu des additifs ont été ajoutés pour retarder les combustions et la propagation des flammes, ils sont appelés retardateurs de flamme (RF). Ils sont aussi ajoutés dans l’eau lors des largages aériens (2).
Pour protéger le bois des agressions extérieures (humidité, UV, champignons, insectes…), des revêtements ont été réalisés avec des peintures et des vernis. Ceux-ci contiennent des liants qui sont des polymères notés ici généralement R1H donc constitués principalement d’éléments réducteurs comme l’hydrogène et le carbone, et qui peuvent rendre inflammables ces polymères en présence d’une source de chaleur et de l’oxygène de l’air. Il est donc ajouté des RF aux peintures et vernis. De même des RF sont en général utilisés dans de nombreux plastiques de la vie courante pour atteindre des propriétés ignifugeantes reconnues.
Qualitativement on évoque les étapes suivantes quand un polymère brûle :
- i) l’échauffement qui pour les thermoplastiques les ramollit et les fait fondre contrairement aux thermodurcissables à réseau 3D réticulés qui se ramollissent peu ou pas.
- ii) la décomposition : au-delà d’une température critique, les liaisons se cassent pour former notamment des radicaux H. et O., engendrant des molécules organiques plus légères et inflammables.
- iii) l’inflammation : qui dépend de la cinétique des décompositions des polymères, et des concentrations en dioxygène (O2) et en COV. L’inflammation se perpétue tant que la combustion des polymères continue pour générer des gaz combustibles (3).
Les modes d’action des RF sont présentés comme suit :
- i) « empoisonner » la phase gazeuse en inhibant les réactions radicalaires par des réactions de transfert ou de recombinaison. Les premiers RF étaient des dérivés halogénés notés RX, qui conduisent aux équations de réaction : RX + R1H → R – R1 + HX
- L’hydracide HX formé a un rôle inhibiteur vis-à-vis des radicaux H. et HO., qui sont présents dans la flamme selon les équations suivantes : HX + H. → H2 + X. et HX + HO. → H2O + X.
- ii) refroidir et protéger le polymère en ajoutant des hydroxydes métalliques d’aluminium ou de magnésium. Ils doivent être incorporés en grande quantité (60% en masse !) pour avoir une efficacité notable mais ceci entraîne une perte sensible des propriétés mécaniques du polymère. Leur décomposition vers 200 °C s’accompagne de la formation respective d’oxydes d’aluminium ou de magnésium ce qui constitue une couche protectrice ralentissant la dégradation du polymère ; c’est l’étape dite de la céramisation.
- iii) le matériau, chauffé au-delà d’une certaine température critique se gonfle en donnant une barrière alvéolaire, susceptible de protéger le polymère : c’est l’étape d’intumescence.
Ceci nécessite alors des formulations précises avec principalement trois composés :
- a) d’abord une source acide avec souvent des phosphates d’ammonium (par exemple (NH4)3PO4) qui chauffés vers 200°C, se décomposent en ammoniac gazeux et en acide phosphorique ce qui conduit à un pH acide (i) voisin de 2, hydrolysant alors les liaisons chimiques du polymère ;
- b) ensuite une source de carbone apportée par des sucres (ex : le maltose) ou des polyholosides (ex : l’amidon) et susceptibles de « charbonner » c’est à-dire conduisant à un résidu de carbone (appelé char) ;
- c) enfin un agent gonflant de type azoté (par exemple la guanidine de formule (NH2)2 C=NH) qui par chauffage se sublime pour donner un dégagement gazeux d’ammoniac provoquant l’expansion du char. De même l’ammoniac libéré par la décomposition du phosphate d’ammonium participe au gonflement.
- iv) des nanocomposites (de dimension inférieure à 100 nm) incorporés dans le polymère à des taux inférieurs à 10%, se sont révélés avoir des propriétés de tenue au feu remarquables : des argiles de type montmorillonite ou des nanoparticules d’oxyde de titane, de silice, des nanotubes de carbone par exemple ont été ainsi utilisés pour réduire de l’ordre de 50 % le risque d’inflammation du polymère (3).
Des normes de performances des RF ont été établies principalement par des mesures de calorimétrie : d’extinction de flamme (ISO 4589), d’inflammabilité (ISO 5660), de propagation de flamme (ISO 5658-2). Ces mesures sont utiles pour une approche prescriptive en particulier dans les secteurs du bâtiment, des transports publics (trains, avions, bateau…) mais aussi pour aider la recherche des causes des sinistres et valider les logiciels de simulation des incendies. Les mesures au calorimètre précisent le débit calorifique, soit le flux d’énergie thermique dégagée lors de la combustion du matériau. La technique consiste à mesurer la consommation en oxygène car la chaleur dégagée par la combustion est proportionnelle à la quantité d’oxygène correspondante. Le principe est simple : la combustion est provoquée dans un volume de contrôle et les effluents gazeux sont collectés via une hotte vers un conduit d’extraction dans lequel ils sont analysés (4).
Les RF peuvent dégager des fumées toxiques pour l’environnement et la santé humaine par migration et lessivage des produits lors de températures élevées et dans des atmosphères humides (5-6). Plus de 40 % des matières plastiques produits en Europe renferment des additifs de type RF. Leurs propriétés chimiques sont décrites sur le site européen ECHA. Parmi les 69 RF utilisés en Europe, 12 d’entre eux sont en cours de réévaluation de toxicité, notamment les dérivés bromés. Par ailleurs des RF contenus dans des polymères usagés sont triés par flottation (différence de densité) et détectés par transmission aux rayons X. Des unités encore au stade de pilote sont en cours pour fabriquer de nouveau des polymères ignifugés (7) ! Des normes de toxicité spécifiques sont éditées notamment dans les transports ferroviaires (8).
Pour obtenir des matériaux polymères possédant des RF, il faut créer des liaisons fortes entre le matériau polymère et les RF. Des travaux récents (2022) de M. Denis et al., de l’université de Montpellier, ont permis de mettre au point la synthèse d’un oligomère protégeant le bois, aux propriétés encore plus respectueuses de l’environnement. Il s’agit de la réaction d’un dérivé phosphoré fonctionnalisé avec un motif vinyle silane (de formule générale CH2 = CH -SiMe3) conduisant à une résine. Des peintures formulées avec ces résines modifiées ont été évaluées au calorimètre à cône et ont montré d’excellentes propriétés ignifugeantes : un bois recouvert d’un vernis, contenant 30% de cet oligomère, présente une réduction du dégagement de chaleur maximum de plus de 55 % (9)!
Jean-Pierre Foulon
(i) L’équation de réaction mise en jeu lors du chauffage s’écrit : (NH4)3PO4 → 3 NH3 (g) + H3PO4
Pour en savoir plus :
(1) Note sur la propriété qu'ont les matières salines de rendre les tissues incombustibles, de L.J. Gay-Lussac, Annales de Chimie et de Physique (1821), T. 18, p. 211-218 (consultable sur GALLICA), la bibliothèque numérique de la BNF et de ses partenaires
(2) La chimie des feux de forêt, de J.-C. Bernier, éditorial (30/08/2018), site Mediachimie.org
(3) Retardateurs de flamme et polymères des propriétés fonctionnelles, communication personnelle (2023) de S. Bourbigot et G. Fontaine (École Centrale-Lille)
(4) La calorimétrie des procédés et de la sécurité, de F. Stoessel, L'Actualité chimique (Juin 2019) N°&nbs^p;441, p 28
(5) Retardateurs de flamme sur le site Wikipedia
(6) Propriétés dangereuses des retardateurs de flamme dans les plastiques, Rapport d’appui de l’INERIS (du 4 /12/2021)
(7) Site ECHA ( rechercher flame retardant)
(8) Réaction et résistance au feu des matériaux composant les trains EN 45545-2 et EN 45545-3 sur le site CREPIM
(9) Des résines alkydes hydrides aux propriétés ignifugeantes pour la formulation de revêtements, de M. Denis, L'Actualité chimique (Mai-Juin 2023) N° 484-485, p. 78
Crédit illustration : Hans/Pixabay
Alors que l’Agence internationale de l’énergie note qu’en 2022 les énergies éoliennes et solaires ont dépassé les 11% de l’électricité sur le plan mondial, une conférence de Daniel Lincot au Collège de France et un rapport de l’Académie de technologie sur le photovoltaïque doivent attirer notre attention (1).
Les panneaux solaires
Pour rappel, l’énergie solaire via un panneau photovoltaïque s’appuie sur le fait que l’absorption de photons par un matériau semi-conducteur peut générer un courant électrique (i).
Parmi ces matériaux, le silicium est particulièrement bien placé car son « gap » correspond en énergie à celle du rayonnement solaire (2). Il reste à capturer les électrons excités pour en faire un courant électrique, avec un collecteur. Depuis 1955 et les premières cellules basées sur des jonctions P/N (ii) simples avec 6% de rendement on a d’abord amélioré le dopage avec des éléments comme le bore ou le phosphore. L’adjonction de grille pour drainer les électrons, la passivation de la surface et sa texturation pour réduire la réflexion de la lumière ont permis de monter le rendement entre 15 et 20%. L’innovation des hétéro-jonctions avec des dépôts de couches minces sur le silicium cristallin ont encore amélioré le rendement à 26%. Pour aller plus loin on pense à mieux absorber les photons dans l’ultra-violet ou ceux qui ont une grande longueur d’onde : on superpose alors à la cellule silicium d’autres cellules qui ont ces propriétés d’absorption, ainsi les cellules dites « tandem » peuvent atteindre 30 à 40% de rendement (3). La recherche est toujours très active en ce domaine avec les nouvelles pérovskites et les cellules organiques.
Pour l’instant face à la concurrence du silicium, la filière couche mince CIGS (iii) ou CdTe n’a pas encore réussi à s’imposer et ne dépasse pas 5% de la production. Cependant en France Solar Cloth produit des panneaux souples légers et performants puisque les modules en couche mince CIGS atteignent un rendement de 17% pouvant recouvrir les toits trop fragiles ou avoir des applications dans les tentes ou serres photovoltaïques (4).
Le silicium photovoltaïque
Pour fabriquer des panneaux photovoltaïques la chimie des matériaux est complexe et énergivore (5). On peut distinguer six étapes.
- Il faut réduire le sable (silice) par le carbone selon SiO2 + C = Si + CO2. Pour cela on utilise du coke à haute température, 1500 – 2000°C dans un four à arc.
- Le silicium est fondu à 1500 °C et par balayage de gaz on élimine la calcium et l’aluminium initialement présents dans le sable, pour obtenir le silicium métallurgique pur à 98%.
- Par attaque à l’acide chlorhydrique, HCl, on obtient le composé de formule SiHCl3 qui, une fois purifié par distillation à 300°C, est décomposé par le dihydrogène, H2, pour obtenir le silicium suivant la réaction SiHCl3 + H2 = Si + 3 HCl. Fondu sous vide on obtient du silicium pur à « cinq neuf » soit 99,999%
- Les lingots sont alors purifiés par zone fondue pour obtenir du « 7 neuf » (99,99999 %), par le procédé Czochralski). On amorce le bain fondu avec un germe et on étire un cylindre monocristallin (6).
- On découpe ensuite les « wafers (iv) » qui ont 0,2 mm d’épaisseur sur 20 cm et on opère les opérations de dopage dans des fours à atmosphère contrôlée.
- Viennent les opérations de surfaçage puis de montage avec les circuits de cuivre et insertion dans les cadres en aluminium et les protections en verre.
Toutes ces opérations exigent pas mal d’énergie, des réactifs chimiques, acide et bases, des quantités d’eau souvent pure de qualité électronique et inévitablement génèrent des effluents qui demandent à être traités.
La situation en France et en Europe
La France dispose de 17 GW de puissance photovoltaïque installée au premier trimestre 2023 et une production de l’ordre de 2,2% de l’électricité nationale. On est en retard sur le tableau de marche (20 GW en 2023 et 35 GW en 2028) ce qui imposerait d’installer au moins 3 GW par an (7).
Le problème est que si en 2022 les exportations de panneaux photovoltaïques (PV) représentaient 7% de l’excédent de la balance commerciale chinoise les importations de ces mêmes panneaux représentaient 2% du déficit commercial en France. Car la production de silicium de la silice aux wafers est à 95% aux mains de la Chine qui a investi des dizaines de milliards de dollars dans cette filière et qui investit encore dans les nouveaux produits hétérojonction et tandem. Le prix du Watt solaire s’est écroulé et le MWh est devenu compétitif dans les pays très ensoleillés, largement en dessous de 60 €. Cette redoutable machine chinoise a laminé l’industrie européenne du silicium. S’il reste un fondeur allemand Wacker et quelques fabricants de wafer notamment en Norvège, l’Europe n’est riche que de projets exigeants des milliards d’investissements pour espérer émerger sur ce marché en 2030. Et le pire c’est que ces modules PV sont fabriqués actuellement avec une énergie qui en Chine s’accompagne d’environ 600 g de CO2/ kWh, souvent issue de centrales thermique à charbon.
Des calculs très précis ont été faits sur les dépenses énergétiques des six stades de fabrication. La dépense énergétique la plus forte est paradoxalement le dernier stade, on n’est pas très loin de 3000 kWh par m² de modules. S’ils sont produits en Chine cela représente près de 1,8 tonnes de CO2 alors que s’ils étaient fabriqués en France cela ne représenterait plus que 180 kg, méritant mieux le label bas carbone. Sachant qu’un panneau PV produit en moyenne 300 kWh/m² par an on voit qu’il faut quelques années de production pour compenser l’énergie dépensée pour sa fabrication.
D’où l’intérêt en France et en Europe pour des solutions moins énergivores telles que les couches minces de CIGS développées par l’IPVF (l’Institut Photovoltaïque d'Île-de-France) à Saclay.
Les recommandations de l’Académie de technologie sont de dire que même si l’Europe est actuellement pieds et mains liés à un seul fournisseur, la Chine, comme le fut l’Allemagne au gaz russe, la situation est grave mais non catastrophique. Si au niveau européen on s’entend pour produire, du sable au wafer, des cellules de silicium européennes fabriquées avec une énergie plus propre, nous avons une carte à jouer en industrialisant au plus vite les technologies TOPcon (v) et Tandem à base de pérovskites pour avoir un avantage concurrentiel sur le rendement des cellules. Indépendamment, encourager l’industrialisation des panneaux couches minces qui peuvent s’avérer décisifs dans l’évolution du photovoltaïque et redonner une compétitivité européenne dans le PV bas carbone.
Enfin il faut, à l’instar du « Inflation Reduction Act » (IAR) des États-Unis, que l’Europe se donne les moyens d’un investissement colossal et des arrangements fiscaux pour une industrie capable de rivaliser avec les géants américains mais surtout chinois.
Jean-Claude Bernier
Juin 2023
(i) Le comportement électrique des semi-conducteurs peut être expliqué par le modèle de la théorie des bandes d’énergie. Dans ce modèle, les électrons dans l’état fondamental (état stable, non conducteur), sont répartis dans une bande d’énergie appelée bande de valence. Si un apport extérieur d’énergie est apporté au matériau, certains électrons peuvent absorber cette énergie et sauter dans une bande dite de conduction. Le matériau conduit alors le courant. L’écart d’énergie entre ces deux bandes est appelé bande interdite ou « gap ». Il faut donc que l’apport d’énergie extérieure soit supérieur à ce gap.
(ii) Pour en savoir plus sur les jonctions P/N : L’essentiel sur les cellules photovoltaïques sur le site du CEA
(iii) CIGS pour les éléments chimiques cuivre, indium gallium, et sélénium.
(iv) On appelle Wafer une « tranche » ou une plaque très fine de matériau semi-conducteur monocristallin.
(v) « Nous avons choisi la technologie TOPCon pour notre future gigafactory française de production de cellules solaires », L'Usine nouvelle, 23 mai 2022
Pour en savoir plus
(1) La solution photovoltaïque, D. Lincot, vidéo CNRS
Énergie solaire photovoltaïque et transition énergétique, D. Lincot, leçon inaugurale au Collège de France - D. Lincot
Académie des technologies : pour le développement de productions industrielles de panneaux photovoltaïques en France et en Europe sur le site de l'IPVF
(2) La conversion photovoltaïque de l’énergie solaire, D Lincot, Revue du Palais de la découverte n° 344-345 (janvier-février 2007)
(3) Les nouvelles filières photovoltaïques, D. Lincot, vidéo CNRS
(4) Les filières photovoltaïques en couches minces et leurs perspectives d’application à l’habitat, D. Lincot, in La chimie et l’habitat (EDP Sciences, 2011)
(5) L’électronique, c’est de la chimie, P. Bray, O. Garreau et J.C. Bernier, fiche Chimie et en fiches… cycle 4, Mediachimie.org
(6) De la chimie au radar du rafale, Bertrand Demotes-Mainard, Colloque chimie et technologie de l’information (2013)
(7) La R&D au service de la décarbonation de l’industrie, J. Ph. Laurent, Colloque Chimie et énergie nouvelles (2021)
Crédit illustration : andreas160578/ Pixabay
Les 39e Olympiades Nationales de la Chimie se sont déroulées cette année sur le thème « Chimie et Cosmétique ». La Fondation de la Maison de la chimie, partenaire historique des ONC félicite les lauréats récompensés à l’issue des épreuves.
Revivez les 2 journées du concours scientifique et du concours Parlons chimie 2023 en vidéos.
Tous les résultats sont sur le site des ONC.
Et retenez que le thème pour l’année prochaine sera « Chimie et sport » à l’occasion des Jeux Olympiques Paris 2024.
Fin avril une déclaration de France Chimie qui regroupe la plupart des industries chimiques en France a fait état de ses préoccupations face à l’inflation, à la crise de l’énergie et à la perte de compétitivité face aux États-Unis.
L’industrie chimique européenne très énergivore a subi de plein fouet l’inflation des matières premières et le coût de l’énergie qui ont entamé sa compétitivité. Elle a vu sa productivité chuter de 6,2% en 2022 (11% en Allemagne) avec des périodes d’arrêt de production. En France le secteur s’est montré plus résilient avec une baisse en volume de 3%. C’est le secteur amont de chimie minérale et de chimie organique qui a le plus reculé (10%) comme ses voisins européens, avec comme exemples l’ammoniac et le PVC lourdement handicapés par le coût du gaz et de l’énergie. Dans l’Hexagone ce recul a été compensé par le secteur aval où les spécialités n’ont baissé que de 1,9% alors que celui des savons, cosmétiques et produits d’entretien a lui au contraire progressé de 6% en 2022. Une des caractéristiques de la chimie française est que ce secteur de spécialités des parfums, cosmétiques et détergents représente près de 60% de la valeur ajoutée.
La chimie reste encore le premier secteur exportateur avec 81,5 milliards d’euros devant l’agroalimentaire et un solde positif de 9,5 milliards devant l’aéronautique. En 2022 les investissements ont progressé de 7% à plus de 6 milliards d’euros, portée par le plan de relance France 2030. Ce sont surtout des projets de croissance et plus de 250 projets industriels sur le recyclage notamment des plastiques, sur la transition énergétique et écologique (1) et sur les filières haute performance comme celles des batteries et l’hydrogène. La branche emploie 225.000 salariés (2) et renouvelle ses compétences avec une nouvelle croissance de ses effectifs en accueillant 25.000 nouveaux employés y compris les alternants (3) .
Les perspectives pour 2023 ne sont pas flamboyantes, l’inquiétude vient du plan de soutien aux industries vertes aux États-Unis. Lourd de 400 milliards d’aide publique « l’Inflation Reduction Act » (IRA) va augmenter encore le manque de compétitivité européen. Les exemples du PVC et surtout de l’hydrogène décarboné (4) sont très illustratifs. Alors qu’en Europe son prix est de l’ordre de 5 à 7 euros le kilo aux États-Unis revient à 2 euros et même moins s’il est issu de l’électrolyse alimentée en électricité par l’énergie nucléaire. France Chimie demande à ce que les aides dans les projets d’investissements soient accrues comme aux USA et pousse à une réforme du marché de l’électricité en Europe, seuls moyens de conserver une industrie chimique sur notre continent.
Jean-Claude Bernier
avril 2023
Pour en savoir plus
(1) Pour une industrie chimique propre et durable, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny in La chimie et la sécurité des personnes, des biens, de la santé et de l'environnement, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2016)
(2) Les chimistes dans l’industrie chimique, fiche Les Chimistes dans…, site Mediachimie.org
(3) Village de la Chimie - 10 et 11 février 2023 , site Mediachimie.org
(4) Les derniers résultats de la production de l’ hydrogène « décarboné », Zoom sur... , site Mediachimie.org
Crédit illustration : Image par Talpa de Pixabay
Les bactéries sont des cellules très simples protégées par une paroi et responsables d'infections quand elles pénètrent et se multiplient dans un endroit de l'organisme où elles ne devraient pas être. Pour combattre une infection, des antibactériens sont utilisés avec pour objectif d’inhiber les différents processus indispensables à la vie de la bactérie ciblée. Mais un grand nombre de bactéries ont développé des résistances aux antibactériens rendant la lutte contre les infections plus difficile.
Pour mieux comprendre comment la bactérie crée une infection, les processus mis en jeu par les antibactériens et la résistance des bactéries, accédez :
- au Zoom sur les bactéries et les antibactériens
- et au Zoom sur la résistance des bactéries aux antibactériens
Crédits : illustration E. coli : Image par Gerd Altmann / Pixabay
Dès avril les média alertent les Français sur le faible niveau des nappes phréatiques et anticipent sur une crise de l’eau qui peut se produire en 2023 si la sécheresse due au manque de pluie s’installe à nouveau comme en 2022. L’an passé, 93 départements avaient pris des mesures de restriction d’usage de l’eau. En ce printemps, quelques communes font face à l’asséchement de leur réseau de distribution d’eau potable, d’autres mettent fin aux projets de nouveaux lotissements qui risqueraient de n’être pas alimentés. Les incidents violents dans les Deux-Sèvres entre les opposants aux réserves d’eau « les bassines » pour l’irrigation agricole et les forces de l’ordre montrent que les variations de la météo (1) peuvent enflammer nos concitoyens.
Comment faire pleuvoir ?
Et si nous nous intéressions aux nuages, sources d’eau, et pluies qui nous ont cruellement manquées en 2022. Les nuages sont composés d’une multitude de gouttelettes d’eau en surfusion qui ne demandent qu’à se transformer en glace, qui, en perdant de l’altitude, engendrent la pluie. Parlons un peu de ce phénomène physique qu’est la surfusion. En haute altitude, à des températures en dessous de zéro pour un liquide pur comme l’eau, sans impuretés, l’énergie libérée par la chaleur latente de solidification (2) ne compense pas l’énergie nécessaire pour créer l’interface solide–liquide. Cet état méta stable est perturbé par des germes comme des poussières, des aérosols, ou un abaissement brutal de la température, causes qui permettent à des micro-cristaux de glace (3) de se former et de croître en capturant l’eau des gouttelettes voisines ou en agglutinant d’autres cristaux.
Pour favoriser ces phénomènes, il y a deux types d’ensemencements ; le premier pour éviter la grêle on disperse de grandes quantités de particules d’iodure d’argent (AgI) qui est insoluble dans l’eau mais qui a une structure cristalline proche de celle de la glace. Ces milliards de petites particules vont multiplier les noyaux de croissance de cristaux de glace, empêcher qu’ils grossissent et favoriser leur fonte. Le second est d’ensemencer avec des sels solubles dans l’eau comme le chlorure de sodium, ils vont alors dissoudre la glace formée (4) et transformer les cristaux ou grêlons en gouttes de pluie. Il y a une troisième variante celle où est déversée de la glace sèche (de la neige carbonique) ou même de l’azote liquide, l’abaissement brutal de la température va former une myriade de cristaux de petite taille qui vont fondre rapidement en pluie dans les couches atmosphériques plus chaudes.
Une technique généralisée
Historiquement l’ensemencement des nuages pour provoquer la pluie a été utilisé en 1946 dans la région de New-York où sévissait une sécheresse durable. Elle s’est ensuite généralisée dans plusieurs pays du monde. En France c’est l’Anelfa (Association Nationale d’Études et de Lutte contre les Fléaux Atmosphériques) qui dès 1951 a mis en étude cette pratique en liaison avec des universités, notamment dans les régions vinicoles sujettes aux orages de grêles. Elle a mis au point un générateur de noyaux de congélation. À partir du sol les nuages vont pomper par courant ascendant l’humidité et les milliards de particules d’iodures d’argent dispersés à partir de quelques grammes d’AgI. Pour être efficace il faut intervenir le plus vite possible sur le nuage orageux, car lorsque la grêle s’est déclenchée on ne peut la stopper. D’autres moyens sont utilisés avec des mortiers qui lancent des fusées dispersant l’iodure dans le nuage ou des ballons qui supportent la charge d’iodure et commandés à distance lorsque le ballon est au-dessus du nuage. De nombreux pays ont recourt à ces techniques ; plus d’une dizaine de pays africains devant faire face aux pénuries d’eau les utilisent pour faire pleuvoir. Aux Émirats arabes unis de grosses quantités d’iodure semées par avion ont même réussi à faire tomber de la neige. La Chine a un ambitieux programme d’ici 2025 sur la moitié de son territoire soit plus de 5 millions de km2 de « géo-ingénierie » qui n’est pas sans inquiéter ses voisins. Car il n’y a pas de murs aux frontières entre les pays. On a ainsi vu l’Iran protester contre les programmes d’ensemencement d’Israël et des Émirats, les accusant de voler les nuages et donc la pluie à leurs profits. En réalité s’il est possible de faire pleuvoir un nuage plus vite que prévu, sous un ciel clair bien bleu il est impossible de créer un nuage qui va précipiter.
Une efficacité discutée
La communauté scientifique reste très mesurée sur l’efficacité des ensemencements. L’Anelfa, qui a un très bon réseau en France soutenue par les régions, a mis en place des « grêlomètres » et affirme qu’il y a une réelle diminution de 50% de l’intensité de la grêle lorsque les générateurs sont mis en action suffisamment tôt. Les experts de l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) restent prudents sur la modification du temps (5) et soulignent que même s’il reste difficile de faire pleuvoir là où on veut, la recherche et les techniques se sont intensifiées et ont bien progressé avec le changement climatique. Reste un dernier point polémique la toxicité possible de l’iodure d’argent dans l’environnement qui sous les rayons UV du soleil se transforme en argent et en dérivés de l’iode. D’après l’Anelfa les quantités libérées sont 1000 fois inférieures au seuil de toxicité.
Un nouveau plan sur l’eau en France
Le président E. Macron a présenté le 30 mars un certain nombre de mesures pour planifier la gestion de l’eau en France ; bien sûr l’ensemencement des nuages n’en fait pas partie, mais quantité d’objectifs concernant l’anti-gaspi et la sobriété sont sous-tendus de budgets chiffrés. Quoique l’opinion publique puisse penser, la France n’est pas trop mal dotée (6) avec une moyenne de précipitations de 935 mm/an (avec bien sûr de grandes disparités régionales) c’est environ 500 milliards de m3 d’eau qui nous tombent dessus. Les prélèvements sont de l’ordre de 32 milliards dont une grande partie est restituée, la consommation en eau potable représente une faible partie de l’eau consommée, sa production est de l’ordre de 5 mrds m3. Or on sait que le réseau de distribution de 850 000 km qui commence à dater devrait être mieux entretenu car plus de 20% du débit est perdu et gaspillé par des fuites permanentes ou occasionnelles soit presque 1 mrd m3, on est évidemment loin des quelques millions de m3 obtenus par ensemencement et l’urgence est bien de mettre tout en œuvre pour réparer et moderniser le réseau d’ici 2030.
Jean-Claude Bernier
avril 2023
Pour en savoir plus
(1) Fluctuations climatiques extrêmes et sociétés au cours du dernier millénaire, E. Garnier, colloque Chimie et changement climatique (novembre 2015)
(2) Changement d’état, vidéo Palais de la Découverte
(3) Comment est la neige cet hiver ?, Question du mois, site Mediachimie.org
(4) Pourquoi met-on du sel sur les routes lorsqu’il gèle ?, Question du mois, site Mediachimie.org
(5) Faut-il fertiliser l’océan pour contrôler le climat ?, S. Blain, Colloque La chimie et la mer (2009)
(6) L’eau, une ressource indispensable pour la ville, A. Charles, A. Harari, et J. C. Bernier, fiche Chimie et… en fiches, Mediachimie.org
Crédit illustration : Łukasz Cwojdziński / Pixabay
Comment fonctionne une éolienne ?
L’éolienne ou « aérogénérateur » est la version moderne du moulin à vent dont l’utilisation remonte au 7e siècle en Asie Mineure. Son nom vient d’Éole, « dieu du vent, vif, rapide, inconstant ».
Elle transforme l’énergie cinétique du vent - gratuite, renouvelable mais intermittente - en énergie mécanique. Celle-ci est ensuite convertie en énergie électrique via un alternateur. Par exemple dans une éolienne à entrainement direct, le vent agit sur des pales qui entraînent la rotation d’un axe (ou arbre) sur lequel est fixé un aimant cylindrique, lui-même placé au sein d’un bobinage en cuivre (stator), ce qui induit une tension électrique aux bornes de celle-ci.(i)
Cette électricité est ensuite acheminée à l'aide de câbles conducteurs vers le lieu de stockage ou d’utilisation.
L’alternateur transforme l’énergie mécanique (rotation d’une roue sous l’effet d’un courant liquide ou gazeux) en énergie électrique. C’est l’élément de base des centrales électriques à charbon, gaz ou pétrole ainsi que des centrales nucléaires et des éoliennes. Source : De la force musculaire aux énergies renouvelables in La chimie, l'énergie et le climat, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2017) p. 29
Quels éléments constituent une éolienne ?
Une éolienne comporte 3 parties principales :
- Une tour (ou mât) qui élève le système dans les zones ventées. Elle est en acier et/ou en béton, solidement ancrée dans le sol ou dans les fonds marins s’ils sont peu profonds au voisinage des côtes. Il existe aussi désormais des éoliennes flottantes en pleine mer (offshore) ancrées aux fonds marins par des câbles.
Le mât peut atteindre plus de 100 m de hauteur et ses fondations accueillent une masse de béton d’environ 600 à 800 tonnes (95% du poids de l’éolienne…). - Les pales (au nombre de deux ou trois) qui tournent sous l’action du vent peuvent avoir de 25 à 50 mètres de long. Elles doivent donc être mécaniquement solides, légères et résistantes à la corrosion. C’est pourquoi, pour pouvoir les mouler, elles sont fabriquées jusqu’à ce jour dans un matériau composite thermodurcissable(ii), qui répond à ces contraintes et qui est constitué de fibre de carbone ou de fibre de verre piégées dans une résine(iii) époxy ou polyester(iv). Malheureusement les polymères thermodurcissables ne sont pas recyclables. De nouvelles résines à caractère thermoplastique et recyclables voient le jour(v).
- La nacelle qui est le cœur de la machine. Elle abrite tous les composants essentiels qui transforment l'énergie cinétique du vent, en énergie mécanique de rotation et in fine en électricité.
On y trouve :- Un système mécanique d’engrenages et de moyeux pour la transmission et l’accélération de la rotation produite par le vent.
- L'alternateur ; certains des aimants permanents utilisés contiennent au moins un des éléments magnétiques suivants : fer, cobalt ou nickel, alliés à des métaux de terres rares (néodyme, dysprosium, samarium).
L’alliage à base de fer, néodyme et bore, noté FeNdB (de formule exacte Nd2Fe14B) est un exemple d’aimant puissant. À ce jour, l’usage de ces aimants puissants concerne essentiellement les éoliennes en mer, avec la technologie synchrone à entrainement direct et seulement 6,2% des éoliennes terrestres françaises recourent à celle-ci(vi). Les câbles pour injecter l’électricité produite dans le réseau ou pour la stocker via des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) ou dans des batteries.
Pourquoi et comment recycler une éolienne ?
La durée de vie moyenne est de 25 ans. Les plus anciennes éoliennes installées sont déjà en bout de course et doivent être remplacées.
La réglementation de plus en plus contraignante exige, lors d’un démantèlement, la remise en état des lieux d’implantation et le recyclage des matériaux au-delà de 90%.
Étant donné le développement attendu des parcs éoliens sur terre et en mer, le recyclage des éoliennes en fin de vie doit largement se développer, entre autres pour économiser les matières premières nécessaires.
Le prix de revient d’une éolienne industrielle de 5 MW est estimé à 5 millions d’euros, soit 1 million par MW. Ce coût élevé justifie la récupération et le recyclage des constituants.
Récupération du béton ou de l’acier
Elle est déjà opérationnelle, car le béton et l’acier sont présents en grande quantité dans maintes autres productions.
Les parties métalliques comme le mât (s’il est en acier) et le rotor (axe solidaire des pales) se recyclent sans problème dans les filières existantes. La valeur marchande de ces métaux justifie le démontage d’une éolienne.
Le béton, composé de ciment, d'eau, de sable et de gravillons, peut parfaitement être concassé ou broyé et réutilisé pour former de nouvelles briques, éléments de construction ou revêtements de route.
Pour les métaux tels que le cuivre, leur récupération et recyclage sont largement répandus.
Les problèmes se posent avant tout pour les pales et certains aimants et la recherche se concentre sur leurs recyclages.
Les aimants permanents
Actuellement, la technologie avec aimants permanents contenant des terres rares reste modeste en France(vii). Mais les quantités à recycler bien que minimes sont précieuses.
Ces terres rares proviennent majoritairement de Chine et leur coût est croissant. Toutefois l’exploitation de nouvelles sources se développe ailleurs, pour s’affranchir de cette dépendance(viii). Par ailleurs, leur extraction est très polluante et elles ont des propriétés physico-chimiques très voisines, rendant leur séparation difficile (dissolution sélective dans des solvants organiques).
Les aimants permanents sont actuellement traités par un procédé de décrépitation à l’hydrogène(ix) qui fournit une poudre qui présente une faible teneur en oxygène, réutilisable pour obtenir des aimants par frittage.
Un nouveau procédé chimique propose une alternative en remplaçant l’hydrogène par l’eau. Les aimants sont mis en contact avec de l’eau sous des pressions et températures modérées, ce qui conduit à la pulvérisation de l’aimant et permet une réutilisation des grains magnétiques.
Enfin, les grandes entreprises de l’éolien cherchent à développer des aimants de nouvelle génération pour s’affranchir de l’usage des terres rares.
Les pales
Le démontage et le transport des pales sont complexes. Comme le broyage et l’enfouissement ne sont plus autorisés, leur recyclage se limite pour l’instant au réemploi, par découpage ou usinage, des résines très solides qui les composent, ce qui fournit mobilier urbain, bouches à incendie, abris de vélos ou de bus, jeux de plein air, etc.
Cependant la recherche en matériaux développe une pale d’éolienne 100% recyclable, en composite fibres de carbone ou de verre piégées dans une résine thermoplastique(x). La méthode chimique de recyclage utilisée consiste alors dans un 1er temps à séparer la fibre de verre de la résine par fusion de celle-ci, puis à la dépolymériser complétement afin de récupérer les monomères purs qui permettront une nouvelle synthèse du polymère. Les tests grandeur nature sont en cours, en particulier sur les propriétés mécaniques de ce nouveau composite(xi). Dans le cas des fibres de carbone coûteuses et de plus en plus utilisées, des technologies sont mises en œuvre pour les récupérer(xii).
Conclusion
Le rendement d’une éolienne varie de 30 à 50% voire 65% de sa puissance théorique (en fonction de son implantation, de la taille des pales, de la force et des fluctuations du vent) ; l’éolienne fonctionne pour des vitesses du vent comprises entre 11 et 90 km/h.
L’énergie éolienne est la troisième source d'électricité décarbonée en France, (derrière les énergies nucléaire et hydraulique)(xiii). Elle est appelée à jouer un rôle majeur dans la transition vers des énergies décarbonées. Toutefois, l’obtention de l’acier et du béton nécessaires à sa construction et le démantèlement sont sources d’émission de dioxyde de carbone : en moyenne 14 g de CO2 par kWh pour l’éolien comparés à 4 g pour l’hydraulique, 16 g pour le nucléaire, 48 g pour le photovoltaïque, 469 g pour le gaz naturel et jusqu’à 1000 g pour le charbon(xiv).
On comprend donc la nécessité de bien choisir les matériaux et matières premières nécessaires à la construction des éoliennes et à leur fonctionnement optimal tout en ayant prévu dès leur conception le procédé de recyclage en fin de vie.
Andrée Harari et Françoise Brénon
(i) Il y a plusieurs types d’éoliennes : celles à entrainement direct dites synchrones, avec un rotor constitué d’aimants permanents et les asynchrones avec un rotor bobiné en cuivre, sans aimant, utilisées pour les éoliennes terrestres où l'entretien et révision sont plus faciles qu'en mer. Pour en savoir plus sur le fonctionnement d’une éolienne sans aimant, on consultera la ressource très pédagogique du blog de Timo van Neerden.
(ii) Un polymère thermodurcissable a une structure moléculaire tridimensionnelle, demeure à l’état solide une fois durci et sa forme ne peut alors plus être modifiée. Il ne peut pas être refondu.
(iii) On appelle résine le mélange liquide contenant des additifs et le ou les monomères réactifs initialement dilués.
(iv) Les composés de type époxy sont à base de Bisphénol A et les polyesters sont de type orthophtalique.
(v) On peut citer par exemple la résine Elium® de Arkema, à base de polyacrylate. Voir la fiche de préparation au Grand oral – Mediachimie/ Nathan « Quel rôle joue la chimie pour les matériaux stratégiques ? »
(vi) Selon un avis technique de l’Ademe datant d’octobre 2020, 6,2% des éoliennes terrestres françaises recouraient à cette technologie, soit 372 tonnes d’aimants permanents contenant 122 tonnes de néodyme et 17 tonnes de dysprosium. Les éoliennes asynchrones avec boites de vitesse n’utilisent pas d’aimant mais nécessitent plus d’entretien.
(vii) Terres rares, énergies renouvelables et stockage d'énergies Librairie Ademe
(viii) Ressources déjà connues au Brésil, au Viet Nam, en Russie, en Inde, en Australie… Nouveau gisement découvert en Laponie.
(ix) Décrépitation : l’aimant est placé sous hydrogène, qui diffuse et forme des poches qui font exploser la structure. La poudre obtenue est ultérieurement broyée et réutilisable pour obtenir des aimants par frittage.
(x) Un polymère thermoplastique est rigide à l’état solide mais se ramollit à la chaleur et peut être durci à nouveau.
(xi) Projet ZEBRA piloté par l’IRT Jules Verne et un consortium d’acteurs majeurs de l’industrie, dont Arkema, Corning…
(xii) Que faire des pales d’éoliennes ?, J.-C. Bernier, éditorial (Mediachimie.org)
(xiii) Pour avoir une idée des productions d’énergie par l’éolien, dont les valeurs évoluent régulièrement, on pourra consulter les sites suivants : pour 2019 EDF l’éolien en chiffres 34,1 TWh représentant 6,3% de la production d’électricité et pour 2022 Ministère de la transition écologique avec 25,0 TWh au cours des trois premiers trimestres 2022, soit 7,4% de la consommation électrique française. Et le Vrai / faux sur l’éolien terrestre
(xiv) Rapport ADEME 2015- page 7- Impacts environnementaux de l'éolien français
Pour aller plus loin
Que faire des pales d’éoliennes ?, J.-C. Bernier, éditorial (Mediachimie.org)
De la force musculaire aux énergies renouvelables, in La chimie, l’énergie et le climat, collection Chimie et junior (EDP Sciences, 2017) p. 29 à 31
Les enjeux matériaux pour la fabrication et le recyclage des éoliennes, Frédéric Petit (Siemens), résumé et conférence Colloque Chimie et matériaux stratégiques (9/11/2022)
Chimie métallurgique pour résoudre les problèmes des métaux rares, J.-C. Bernier, résumé et conférence Colloque Chimie et matériaux stratégiques (9/11/2022)
Crédit illustration : EdWhiteImages/Pixabay
L’éclairage participe à près de 20 % de la consommation mondiale d’électricité. L’ADEME prévoit une baisse d’environ 50 % de la consommation liée à l’éclairage vers 2030. Par ailleurs, l’arrêt des ventes des lampes à incandescence d’une part, des lampes et tubes fluorescents et lampes halogènes d’autre part est fixé pour 2023. La période des fêtes de Noël voit chaque année les rues et places de nos villes et villages s’illuminer. L’éclairage est assuré par des diodes électroluminescentes pour diminuer les dépenses dues à la consommation électrique associée.
Accédez au Zoom sur Les progrès de l’optoélectronique : des LED aux OLED
Crédit illustration : MolnarSzabolcsErdely - Pixabay
Les prix La main à la pâte ont été remis le 4 avril 2023, lors d’une cérémonie à l’Institut de France. Onze projets scientifiques menés en classe, privilégiant l’investigation et l’expérimentation, et trois mémoires de futurs professeurs ont été mis à l’honneur.
Retrouver l’ensemble des lauréats ici :
https://fondation-lamap.org/actualites/decouvrez-les-laureats-des-prix-la-main-a-la-pate
Depuis plus de quatre ans, la Fondation de la maison de la chimie et LAMAP sont engagées dans un partenariat autour de la chimie. L’objectif majeur est d’impulser une dynamique ambitieuse visant à développer et diffuser un enseignement de la chimie à l’école et au collège. De nombreuses ressources sont créées et proposées gratuitement.
Dans le cadre de ce partenariat, la Fondation de la maison de la chimie soutient également un Prix spécial dédié à un projet dans le domaine de la chimie (doté d’un montant de 600€).
Cette année le prix a été attribué au Collège Michel Bégon à Blois (Loir et Cher ) - Classe 6ème pour le projet sur « La couleur des aliments »
La couleur des aliments
L’objectif de ce projet réalisé en cours de physique-chimie et sciences de la vie et de la terre : amener les élèves de 6ème à extraire la couleur orangée des carottes du jardin ainsi que d’autres légumes colorés comme le chou, la betterave, l’épinard. Une fois familiarisés avec les instruments du laboratoire, les élèves ont analysé l’évolution de la température et de la couleur des molécules extraites sur une période donnée. Cette expérience a permis aux professeurs d’introduire la notion de miscibilité et d’acidité, puis de donner un nom aux différentes molécules colorées. Le professeur d’arts plastiques, entouré d’un directeur de recherche de l’ENSCP et d’un maître de conférences de l’université d’Orléans, a pris part au projet en lançant deux défis aux élèves : la réalisation d’un arc-en-ciel de tubes à essai et des tableaux colorés sur papier. La démarche collective et l’implication des élèves sur ce projet d’initiation à la chimie des couleurs et aux techniques de laboratoire sont autant d’éléments qui ont incité le jury à leur attribuer le Prix spécial Chimie du concours (projet conduit par Mme Alexandra Gondonneau et Marie Pouzet).
En savoir plus sur ce projet : https://fondation-lamap.org/dossier-prime-prix-lamap/la-couleur-des-aliments
Crédit photo : site LAMAP
Les 35e JIREC (Journées de l’Innovation et de la Recherche pour l’Enseignement de la Chimie), dont le thème est « enseigner et innover en chimie à l’heure du numérique », se dérouleront du 23 au 26 janvier 2024 à Dourdan.
L’appel à contribution est désormais ouvert et fermera le 4 juin 2023. Vous pouvez contribuer sous la forme d’une communication orale ou d’un atelier.
Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du JIREC : https://jirec.org.
Les 5, 6 et 7 avril : Formation nationale « Enseigner la chimie à l’école primaire »
La Fondation La main à la pâte vous propose une formation les 5, 6 et 7 avril 2023 au Château de Versailles.
Objectif : découvrir des activités de chimie motivantes à transposer en classe
Au menu : chimie des arts, chimie du chocolat, matériaux plastiques et edd
Pour en savoir plus et/ou vous inscrire : fatima.rahmoun@fondation-lamap.org
https://fondation-lamap.org/actualites/inscrivez-vous-a-la-formation-nationale-enseigner-la-chimie-a-l-ecole-primaire
Mercredi 12 avril : webinaire Chimie « Matériaux plastiques et Développement Durable »
La Fondation La main à la pâte vous invite à un webinaire le 12 avril 2023 de 13h30 à 15h sur les matériaux plastiques et leur impact sur les écosystèmes.
Kako Naït Ali, docteure et ingénieure matériaux, experte en polymères, y abordera son métier, l'analyse de cycle de vie des polymères et vous proposera un échange sur les enjeux environnementaux associés !
N'hésitez plus, inscrivez-vous !
Pour s'inscrire au webinaire : https://framaforms.org/inscription-au-webinaire-materiaux-plastiques-et-developpement-durable-1677149384
Actuellement en France, un homme sur deux et une femme sur trois seront atteints d’un cancer dans leur vie… on dénombre environ 380.000 nouveaux cas de cancer par an et on enregistre 140.000 décès ! [1]. Le cancer est une maladie complexe qui résulte d’une prolifération anormale des cellules. Comme chacun sait, il n’y a pas un cancer mais des cancers et ceci impose donc de posséder des stratégies curatives adaptées à chaque type de cancer. Les principales stratégies utilisées dans le traitement des cancers sont la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie, les thérapies ciblées, et l’immunothérapie. […]
Accédez au Zoom sur Les traitements des cancers : petites ou grosses molécules ?
En cette fin de février et début de mars se tient à Paris le Salon de l’Agriculture qui après près de trois ans de pandémie renoue avec une tradition bien établie et avec probablement autant sinon plus de visiteurs qu’en 2019. Cette fête du monde agricole ne doit cependant pas cacher les fortes préoccupations des agriculteurs sur la pérennisation de leur métier et de leurs exploitations (1).
Comme nombre de PME ils sont frappés par le coût de l’énergie, gaz, électricité et fuel ; s’y ajoute l’augmentation du prix des engrais et intrants, les diverses réglementations concernant les phytosanitaires et enfin la sécheresse qui semble s’installer durablement, indice du changement climatique.
1. L’énergie
Comme nombre d’entreprises qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire les agriculteurs doivent faire face à une augmentation plus ou moins forte des tarifs de l’électricité, du gaz et du fuel pour les engins agricoles. Ils peuvent cependant bénéficier de subventions du ministère et de l’ADEME dans le cadre de l’accélération des énergies renouvelables. Pour les installations de biométhane (2), on sait qu’il est possible par fermentation bactérienne anaérobie de traiter les déchets végétaux et déjections animales par hydrolyse acidogénèse puis acétogénèse donnant un acide acétique qui se transforme en gaz CH4 + CO2 en laissant un digestat riche en azote et ammoniaque. Il y a maintenant en France 1600 unités dont 966 produisant de l’électricité et 442 qui après purification injectent le méthane dans le réseau. GDF rachète le biométhane entre 95 € et 45 € le m3 et EDF 140 à 190 € le MWh ce qui peut faire un complément de revenu agricole.
Se met en place aussi l’agrivoltaïque, qui consiste à mettre au-dessus d’une culture habituelle des nouveaux panneaux solaires semi transparents qui fournissent de l’électricité en fonction de l’ensoleillement qui profite aussi aux cultures sous-jacentes. Les nouveaux panneaux (3) avec des rendements de l’ordre de 20% vont bientôt être concurrencés par les panneaux PV tandems qui mêlent silicium et pérovskites avec un rendement amélioré. L’IPV de Saclay que nous connaissons bien s’apprête à lancer une fabrication industrielle de tels panneaux en Alsace avec VOLTEC Solar.
2. Les intrants
Après la crise du gaz en Europe dont les prix avaient atteint des sommets en mars 2022, la pénurie d’ammoniac (4) avait aussi atteint les engrais azotés qui avaient dépassés les 1000 €/t en avril 2022 semant la panique notamment dans les exploitations familiales. Depuis, le cours du gaz est retombé à un niveau de l’ordre de 50 € le MWh, l’ammonitrate est aussi retombé à environ 500 €/t et l’urée à 400 €/t, niveaux qui cependant sont le double de ceux de 2020. Cela entraine une « sobriété » dans l’épandage de ces engrais qui, sans aller vers une agriculture « bio » qui représente en France environ 7 à 10 % des exploitations, va tout de même modifier le rendement des sols et probablement une baisse de revenus.
3. Les insecticides et l’Europe
Sans revenir sur « le glyphosate » interdit en Europe mais toujours pas sur d’autres continents, en janvier une directive de Bruxelles met fin aux dérogations nationales sur les néonicotinoïdes (5) enrobés autour de la graine de betterave. La France avait interdit dès 2018 plusieurs insecticides qui agissent sur le système nerveux des insectes dont l’imidaclopride et l’acétamipride. Huit États européens avaient profité de cette dérogation pour autoriser leurs agriculteurs à utiliser les semences déjà enrobées pour la campagne betteravière 2023. En France le ministre de l’Agriculture a l’interprétation la plus stricte, celle où le directive de Bruxelles s’applique immédiatement. Les betteraviers français protestent devant cette concurrence qui s’installe entre productions européennes en rappelant qu’en 2020 leur récolte avait été amputée de 30% suite aux attaques de pucerons ravageurs. Ils sont d’autant plus remontés qu’en Allemagne l’acétamipride est autorisé en pulvérisations.
Même si on voit dans la structure des deux molécules une assez forte différence dans la chaine azotée (6) il est probable que leur mode d’action sur les insectes ravageurs est de même type. Une fois de plus on constate que le principe de précaution vis-à-vis de l’environnement et de la biodiversité se heurte à des considérations de concurrence entre États.
4. L’eau recyclée
L’impact du changement climatique se fait ressentir, l’augmentation des températures et la baisse des précipitations se traduisent par une baisse des rendements et de la qualité des produits agricoles (7). Dès lors, la réutilisation des eaux usées (REUT) est une alternative qui devrait permettre la pérennisation de l’agriculture et la préservation des ressources en eau. Déjà pratiquée en Italie et en Espagne (8 et 14% respectivement), peu développée en France où sur le gisement de 8,4 Mrds de m3 seuls 8 à 10 millions de m3 sont utilisés chaque année, alors que le gisement exploitable est 1,6 Mrds.
Et pourtant ces eaux usées présentent de multiples avantages pour l’agriculture – elles pallient un problème temporaire d’accès à l’eau d’irrigation – leur volume n’est pas soumis aux arrêtés préfectoraux de restriction d’usage de l’eau - si aucun traitement de dénitrification et de déphosphorisation n’est réalisé par la station d’épuration leurs teneurs en éléments fertilisants organiques n’est pas négligeable (8).
Bien sûr elles doivent obéir à une réglementation stricte et à des prescriptions sanitaires pour ne pas mettre en danger la santé publique. Suivant leurs qualités elles sont classées en quatre classes en fonction de l’usage :
- pour les cultures maraîchères, fruitières et légumières non transformées par un traitement thermique - qualité A
- pour les cultures maraichères, fruitières et légumières transformées par un traitement thermique – qualité A ou B
- pour les cultures céréalières et fourragères – qualité A ou B ou C*
Selon l’arrêté du 18 juillet 2015 relatif aux systèmes d’assainissement collectifs et non collectifs (legifrance.gouv.fr),
figure provenant du site Bonnes pratiques pour l’eau du Grand Sud-Ouest
Il ne faut pas se cacher que la procédure pour en arriver à l’irrigation est complexe, il faut avoir accès aux eaux usées par une collectivité ou une société locale d’eau et d’assainissement. Il faut ensuite confier le stockage et la distribution à une société prestataire agrée et financer ces opérations par le groupe d’agriculteurs concernés. Si dans les régions littorales le REUT est plus adapté car il vise à la réutilisation de l’eau douce avant son rejet à la mer dans les régions continentales il pose plus de problèmes. D’autant que les prescriptions européennes en matière de classement semblent se durcir en 2023.
Jean-Claude Bernier
février 2023
Pour en savoir plus
(1) Série chimie et agriculture durable pour tous (vidéos), Mediachimie.org
(2) Les déchets valent de l’or ! (fiche Chimie et... en fiches, Mediachimie.org)
(3) Les nouvelles filières photovoltaïques (vidéo, CNRS)
(4) Comment fabriquer des engrais avec de l’air : la synthèse de l’ammoniac (série Une réaction en un clin d'oeil, Mediachimie.org)
(5) Chimie de synthèse et agriculture durable peuvent-elles faire bon ménage ? (fiche Chimie et... en fiches lycée, Mediachimie.org)
(6) Les chimistes dans : L’industrie des phytosanitaires (série Les Chimistes dans, Mediachimie.org)
(7) H2O, la molécule vedette de l’été (éditorial, Mediachimie.org)
(8) Fiche orientation : secteur du traitement de l’eau (Mediachimie.org)
Crédit illustration : Les Haines, licence CC BY 2.0, PxHere
La première chose à savoir est que nous ne sommes pas capables de synthétiser la vitamine C (i). Nous devons donc la trouver dans l’alimentation : les fruits colorés (agrumes, cassis, fraise, kiwi, ananas...) et les légumes frais (poivron, brocoli, chou de Bruxelles...). L'apport nutritionnel quotidien conseillé est d'environ 100 mg chez l'adulte. Comme elle est très fragile, il faut choisir des aliments frais et crus ou très brièvement cuits. Elle se trouve facilement en pharmacie, mais il faut prendre garde à ne pas en consommer plus de 1 g/jour, car en excès elle peut être métabolisée (ii) en oxalate (iii) de calcium et éliminée dans les urines où elle est le composant majeur des calculs rénaux.
Propriétés
Chimiquement, il s'agit de l'acide ascorbique (a).
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(a) acide L-(+)-ascorbique | (b) acide déshydroascorbique |
Nomenclature IUPAC : (5R)-5-((11S)-1,2-dihydroxyethyl))-3,4- dihydroxy-5-hydrofuran-one |
Ses propriétés viennent de sa capacité à s'oxyder en acide déshydroascorbique (b). C'est donc un antioxydant, qui élimine les dérivés réactifs de l'oxygène (ou radicaux libres). On dit qu'il protège les cellules contre le stress oxydatif, qui est une oxydation des constituants de notre organisme due à un excès de ces radicaux libres (iv) qui sont très instables et oxydent d'autres molécules, ce qui leur confère un important effet cytotoxique (v).
Il n'y a pas de véritable forme de stockage de la vitamine C, et lorsque l'apport cesse les réserves chutent de moitié en 10 à 20 jours.
Le nom ascorbique vient du préfixe a, privatif, et de scorbut. Le scorbut est devenu une maladie rare, mais était très fréquent dès la Renaissance et jusqu'au XIXe siècle chez les marins au long cours. Il s'agit d'une carence en vitamine C, qui provoque un déchaussement des dents, un pourrissement des gencives, des hémorragies et pour finir la mort. Les marins n'avaient pas toujours le loisir de faire escale pour s'approvisionner en fruits et légumes frais. On peut encore l'observer aux USA chez les adolescents suivant un régime alimentaire aberrant (beignets et café noir, sandwich au beurre de cacahuète !).
Rôles physiologiques
On la pare de toutes les vertus : combat la fatigue, le vieillissement de la peau, améliore le tonus, aide à combattre les infections... Sans qu'elle soit la molécule magique que pensent certains, elle possède bien ces propriétés, ce qui sera expliqué plus loin. En 1970, le prix Nobel de chimie Linus Pauling écrivit un article "Vitamin C and the Common Cold" (vi) où il prescrivait de combattre un rhume débutant par la prise de 1 g par jour de vitamine C, ce qui a plutôt fait consensus. Utilisée pendant de courtes périodes à cette dose, elle ne semble pas toxique, puisqu'il a vécu jusqu'à 93 ans !
Elle catalyse l'hydroxylation des acides aminés proline (c) et lysine (d), constituants du collagène, qui entre dans la composition de la peau, de l’os, des dents, du cartilage (on comprend les symptômes du scorbut).
![]() | ![]() |
(c) proline | (d) lysine |
La carnitine (e), obtenue à partir de ces mêmes acides aminés, est importante dans la synthèse des acides gras et aussi dans la maintenance de la masse osseuse ; elle joue aussi un rôle dans l'athérosclérose et le risque cardiovasculaire. La vitamine C est essentielle à la synthèse de la carnitine.
![]() |
(e) carnitine |
Enfin ses propriétés anti-oxydantes lui confèrent de multiples rôles (synthèse d'hormones, fonctionnement des enzymes, du système immunitaire, absorption du fer par l'intestin).
Plus généralement, les carences en vitamine C, même plus discrètes que dans le scorbut, se manifestent par de l’asthénie, de l’amaigrissement, des céphalées, des douleurs osseuses, une moindre résistance aux infections et des troubles hémorragiques. Le traitement curatif et prophylactique des carences, d’origine alimentaire ou provoquées par des conditions particulières, constitue une indication indiscutable de la vitamine C. Elle est aussi préconisée comme stimulant des défenses de l’organisme au cours des infections virales comme la grippe et le coryza. Il est donc essentiel d'en consommer journellement (fruits et légumes frais).
Nicole Moreau et l’équipe question du mois
(i) La vitamine C est découverte en 1928 par Albert von Szent Györgyi, un scientifique hongrois (prix Nobel de médecine en 1937)
(ii) Le métabolisme est l'ensemble des réactions chimiques qui se déroulent à l'intérieur des cellules d'un être vivant, soit pour lui permettre de synthétiser les molécules qui lui sont essentielles pour se maintenir en vie et se reproduire (anabolisme), soit pour dégrader des molécules en excès voire toxiques (catabolisme).
(iii) Acide oxalique C2H2O4 oxalate de calcium Ca2+, −OOC-COO− ou Ca(COO)2
(iv) Un radical libre est une espèce chimique qui possède un électron non apparié et est très réactif.
(v) Cytotoxique: du grec cyto, cellule et toxique. Il s’agit d’un effet toxique pour les cellules d'un organisme
(vi) « La vitamine C et le rhume »
Pour aller plus loin
Chimie et alimentation : produits de synthèse / produits naturels, Pierre Feillet, in La chimie et l'alimentation (EDP Sciences, 2010) p. 17
Le vieillissement cutané : prévention et réparation, Philippe Piccerelle, Colloque Chimie, dermo-cosmétique et beauté (2016), Le rôle des vitamines dans le vieillissement cutané §4.4. p 102-103
La découverte des vitamines, Louis Irissou, Revue d'Histoire de la Pharmacie (1953) n° 137
François Martin apothicaire et explorateur, Louis Irissou, Revue d'Histoire de la Pharmacie (1946) n° 116, sur le premier apothicaire français s’étant rendu à Sumatra et qui a fait paraitre en 1604 un « Traité du scorbut » à la suite de son voyage où il recommande comme traitement l'emploi du jus de citron.
Crédit illustration : balt/Pixabay
Vous qui n’avez pas la possibilité de venir à la Fondation de la Maison de la Chimie le 8 février 2023, vous pouvez assister en direct au « Colloque Chimie et Intelligence artificielle »
sur Mediachimie ou sur Youtube.
La captation des conférences sera par la suite disponible en ligne et leur mise à disposition sera indiquée sur la page d'accueil de Mediachimie.
En savoir plus sur le colloque
Retrouvez le quiz "Chimie et intelligence artificielle"
En cet hiver 2023 les prix de l’énergie jouent avec nos nerfs, plus de 15% pour l’électricité pour les particuliers, 400% pour certaines industries ou PME. Le prix du gaz durablement élevé autour de 140 €/MWh, sans oublier l’essence et le gasoil qui ne bénéficient plus des remises de 2022.
Les entreprises et industries adoptent des solutions radicales afin de diminuer leurs consommations, baisse de production, fermeture partielle, baisse de la température et de l’éclairage dans les halls ou les bureaux, etc. Mais que peuvent faire les particuliers chez eux dans la vie de tous les jours ?
L’isolation pour une meilleure efficacité thermique des bâtiments
Comment empêcher les calories de courir d’une source chaude vers une source froide ?
Il faut interposer une barrière avec des matériaux qui ont une faible conduction thermique (1).
Les maisons sont des passoires thermiques, les calories sont perdues par le toit (30%), les murs (15%), les fenêtres (15%) et la ventilation (20%).
Plutôt que construire avec de bêtes parpaing en béton, on peut :
- utiliser des briques céramiques avec des alvéoles et des ponts thermiques labyrinthes ;
- isoler les combles et doubler les murs avec des isolants de fibres de verre ou de laines de roches obtenus par filages à 1500°C ;
- utiliser des plaques de plâtres doublées de polystyrène expansé ou de mousses phénoliques pour les murs intérieurs, des polyuréthanes expansés pour l’isolation des sols et plafonds ou de nouveaux isolants tels que les aérogels de silice obtenus par élimination de l’eau des polymères Si-O-Si-O-SiOH-
- utiliser de nouveaux venus avec des nanoparticules comportant des pores inférieures au libre parcours moyen des molécules de l’air O2 et N2.
Pour les fenêtres : pourquoi chauffer le jardin ? (2)
Utiliser les vitrages super isolants qui entre deux lames de verres emprisonnent de l’argon deux fois moins conducteur que l’air et où sur l’une des faces intérieures du verre sont déposés de micro-cristaux métalliques qui réfléchissent le rayonnement infrarouge vers l’intérieur de la maison.
La moyenne des constructions et maisons a une dépense énergétique annuelle de l’ordre de 250 kWh/m2 (classement efficacité énergétique D). Les nouvelles constructions avec le règlement thermique 2020 doivent obtenir le label A (moins de 50 kWh/m2 ou 0 pour la maison passive) (3). Dans la nouvelle réglementation du ministère de l’Écologie les logements avec la classification F et G (300 à 450 kWh/m2) ne pourront plus être loués après 2025, ce qui rien qu’en région Île-de-France représente plusieurs centaines de milliers de logements.
La rénovation du parc existant est essentielle car la consommation énergétique du tertiaire et résidentiel représente plus de 48% de l’énergie totale en France. Pour les propriétaires et bailleurs sociaux cela représente parfois un vrai casse-tête. Dans Paris les immeubles haussmanniens ne peuvent être rénovés que par l’intérieur, la mise en place d’isolants thermiques diminue la surface des appartements de 2 à 5% ce qui au prix au m² à Paris représente des fortunes. Dans les immeubles collectifs la décision par assemblée des copropriétaires n’est pas facile et les travaux prennent plusieurs années de retard. Enfin nombre de propriétaires se plaignent de faibles résultats sur leur consommation après travaux, nombre d’entreprises n’étant pas vraiment qualifiées ou formées.
Et la chaleur latente ?
La physicochimie et la thermodynamique vous permettent de faire des économies, vous pouvez utiliser la chaleur de condensation lorsque qu’un gaz devient liquide, ou de solidification quand un liquide devient solide (4).
Prenons l’exemple de l’eau : pour élever la température de 0° à 100°C, il faut dépenser 418 kJ, alors que la chaleur latente de condensation est de 2250 kJ à 100°C soit 5 fois plus. Pour en profiter il faut essayer de récupérer la vapeur d’eau pour la condenser. C’est ce qui arrive dans les chaudières à gaz à condensation, la vapeur d’eau présente dans les fumées se condense pour réchauffer le circuit d’eau chaude et booste le rendement de la chaudière à 95%.
Plus simple encore, il vaut mieux couvrir avec un couvercle la casserole où vous cuisinez, les vapeurs se condensent sur le couvercle et vous récupérez les calories de la chaleur latente ce qui permet d’économiser de 15 à 20% d’énergie.
C’est aussi le principe du chauffage par pompe à chaleur comme son nom l’indique on va chercher les calories à l’extérieur dans l’air ou le sol avec un gaz généralement fluoré (les HCFC ou hydrochlorofluorocarbone qui ont remplacé les CFC) (5) et on le condense sous pression dans un échangeur qui chauffe la maison grâce à sa chaleur de condensation.
Si vous êtes riches !, vous pouvez aussi doubler vos murs par des cloisons d’un type placoplâtre particulier qui comportent des alvéoles avec des cires ou paraffines dont le point de fusion est compris entre 20°c et 26°C. Lorsque le mur est ensoleillé le jour, les paraffines fondent et la nuit lors du refroidissement les paraffines se solidifient en redonnant à la paroi la chaleur latente de solidification.
Dans la vie de tous les jours
Pour bouger, pour travailler, pour respirer, nous avons besoin d’énergie, dans notre corps la réserve est fournie par l’ATP, l’adénosine triphosphate, qui est le relais moléculaire pour toutes nos cellules. Par la nourriture nous consommons environ 2000 kcal/24 h contenues surtout dans les glucides et lipides (6). Leur conversion en ATP a un rendement d’environ 50%, l’autre moitié sert à dégager de la chaleur pour maintenir notre corps à 37°C. Pour absorber cette nourriture il faut la rendre agréable et souvent la cuire ou la réchauffer. Pour économiser l’énergie, utiliser à cet effet l’électromagnétisme avec les plaques à induction (7) : le courant haute fréquence généré à 25 kHz par des bobines à induction en cuivre placées sous la plaque vitrocéramique, entraîne des courants de Foucault dans le métal de votre récipient qui se renversent 25 000 fois par seconde et chauffent par effet Joule. Le gros avantage de l’induction est que l’on chauffe seulement le récipient et pas les bruleurs ou la plaque chauffante, l’économie d’énergie se chiffre à 30%.
De même avec le four à micro-ondes, on fait vibrer les molécules d’eau à environ 2450 MHz. Les dipôles constitués par les molécules d’eau (H2O) entrent en résonnance et le liquide chauffe très vite. Ici encore on ne chauffe que le contenu et pas le contenant d’où une économie d’énergie de 20 à 40% par rapport à un four classique.
Mais pour maintenir le bien être en hiver, en plus de l’isolation de nos maisons, des chauffages plus ou moins sophistiqués pour maintenir 19°C, nous avons aussi toute une panoplie de vêtements avec de nouvelles fibres agréables en hiver : les microfibres en polyéthylène recyclé, des pulls polaires à base de bouteilles en polyester (PET) recyclés, les fibres acryliques creuses légères donnant une bonne isolation thermique « Froid moi ? Jamais, j’ai mon…. !!!». Sans aller aux textiles imper-respirants et même thermo-régulants, les nouvelles fibres nous offrent un large panel qui nous permet de lutter contre une éventuelle panne d’énergie.
Jean-Claude Bernier
janvier 2023
Pour en savoir plus
(1) Quelles solutions pour améliorer la performance énergétique de l’habitat ?, S. Steydli, Chimie et... en fiches (lycée), Mediachimie.org
(2) La discrète révolution dans la performance énergétique des bâtiments, F. Michel, colloque Chimie et grandes villes, 9 novembre 2016 (Maison de la Chimie)
(3) Isolation dans l’habitat : la chimie pour ne pas gaspiller de calories, J.-C. Bernier, colloque La chimie et l’habitat (2011)
(4) Changements d’état, vidéo Palais de la découverte / SFRS / Université Pierre et Marie Curie 1997
(5) Chimie, atmosphère, santé et climat, une histoire partagée, E. Durocher, N. Baffier et J.-C. Bernier, Chimie et... en fiches (collège), Mediachimie.org
(6) La chimie dans la vie quotidienne : les apports de l’alimentation C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie dans la vie quotdienne, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2018)
(7) Les objets du quotidien : dans la maison et la cuisine C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie dans la vie quotdienne, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2018)
Crédit illustration : sumit kumar/Pixabay
Chers lycéens et professeurs, sachez que la chimie et ses disciplines voisines telles que le génie chimique, la biochimie, la science des matériaux vous offrent des formations scientifiques et technologiques qui conduisent à des métiers recherchés par de nombreux secteurs économiques, tels que ceux de l’énergie, la chimie, la pharmacie, l’eau…
Pour vous aider à les découvrir utilisez les outils d’informations que sont :
Et retrouver des fiches métiers, des parcours de formation et des vidéos dans l’Espace métiers de Mediachimie.
La phase des vœux sur la plateforme d’admission post bac Parcoursup est ouverte depuis le 18 janvier. Les lycéens peuvent y entrer leurs dix vœux sans ordre de préférence et ce jusqu’au 9 mars.
Crédits illustration : ©Ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation (MESRI)
La parution à la même période de l’interview d’Alain Aspect prix Nobel de physique 2022 (1) et de l’enquête sur la désinformation scientifique des jeunes à l’heure des réseaux sociaux (2) m’interpelle sur notre rôle, nous chercheurs et enseignants en science.
Le premier message d’Alain Aspect est destiné aux jeunes, montrant que l’on ne va pas régler les problèmes de la planète et de la société contre la science. Au contraire, l’amélioration des modèles complexes insuffisants pour le climat et la résolution des pandémies est le résultat d’encore plus de recherches en informatique et en biochimie. Il rappelle aussi combien à l’école et au lycée il a été marqué par les expériences simples des leçons de choses et par ses enseignants qui lui ont transmis les méthodes de base qui lui ont bien servi jusqu’à maintenant.
Alain Aspect insiste aussi sur la nécessité de donner des moyens financiers et humains à la recherche exploratoire sans laquelle par exemple son sujet l’intrication quantique n’aurait pu déboucher sur ce qu’on appelle « la seconde révolution quantique ». Pour lui un meilleur financement des start-ups et surtout une diminution des délais administratifs des financements parait aussi essentiel. Car le plan quantique peut déboucher sur d’importantes applications comme les ordinateurs quantiques et la cryptographie quantique susceptibles de développements remarquables. En conclusion il revient sur un message aux jeunes en leur rappelant que la sobriété en énergie du calcul quantique devrait leur parler.
Ce message et ces rappels de l’importance de la science sous tous ses aspects, santé, énergie, climat, pollution, environnement, est d’autant bienvenu qu’il télescope de front l’enquête IFOP sur la désinformation des jeunes (11 à 24 ans) sur la science. Qu’y apprend-on en effet ?
- Que seuls 33 % perçoivent positivement les bienfaits de la science (55% en 1972) et que 17% en pensent plus de mal que de bien (6% en 72).
- Qu’ils adhèrent de plus en plus aux vérités alternatives.
- 27% nient la longue évolution des êtres humains.
- 32% assurent que les vaccins anti-covid à ARN génèrent des protéines toxiques et des dommages irréversibles.
- 20% pensent que les Américains ne sont jamais allés sur la lune et 31 % que l’élection américaine a été faussée au détriment de D. Trump.
- Au total plus des 2/3 croient au moins à l’une de ces contre-vérités scientifiques y compris que la terre est plate (16%).
L’analyse sociologique montre que les populations les plus « désinformées » font partie des plus démunies, que leur religion a une influence mais surtout qu’ils sont très « addicts » aux réseaux sociaux YouTube et surtout TikTok et son moteur de recherche chinois, qu’ils consultent plusieurs fois par jour. On s’aperçoit que cette génération (11-24 ans) s’informe essentiellement sur internet (64%) en délaissant les journaux télévisés (23%) et qu’ils accordent la crédibilité de préférence aux influenceurs qui ont le maximum de « followers ».
Alors comment remonter la pente ? Alain Aspect nous en trace quelques chemins :
- illustrer des phénomènes physiques et chimiques de base par les professeurs des écoles ;
- donner les bases de l’esprit critique au sein de l’enseignement au lycée.
La Fondation de la Maison de la Chimie contribue à ces deux chemins. Elle soutient la Fondation de la Main à la Pâte qui met à disposition des enseignants des écoles et du collège, des ressources et des aides variées pour mener à bien des activités de sciences et de technologie, dont la chimie (3).
La Fondation de la Maison de la Chimie a également créé le site Mediachimie.org sur lequel sont disponibles de nombreuses données en chimie, vérifiées et scientifiquement sûres (4). En effet, cela fait maintenant plus de 10 ans qu’une bonne vingtaine d’enseignants et chercheurs bénévoles œuvrent pour mettre à disposition des jeunes, de leurs enseignants et du grand public, des documents, des fiches, des vidéos, des colloques sur la chimie et la science et aussi donner l’occasion de rencontrer ou de voir les témoignages d’hommes et de femmes de science ou de l’industrie leur parler d’expériences, de vécus et de métiers d’avenir. Il faudrait encore plus de sites dévolus à la science, si possible agréables et vivants.
Continuons à apporter notre pierre pour aider nos collègues enseignants du primaire et secondaire au service de l’information scientifique vraie. Ensemble nos efforts conduiront peut-être à de nouveaux prix Nobel pour cette tranche d’âge.
Jean-Claude Bernier et Françoise Brenon
Pour en savoir plus :
(1) On ne réglera pas les problèmes de la planète contre la science mais avec elle, interview d’Alain Aspect, Les Echos (13 janvier 2023)
(2) La mésinformation scientifique des jeunes à l’heure des réseaux sociaux Enquête IFOP pour la Fondation Jean Jaurès et la Fondation Reboot (12 janvier 2023)
(3) Partenariat LAMAP-Fondation de la Maison de la chimie, Séquences La main à la pâte – Mediachimie, site Mediachimie.org
(4) Site Mediachimie.org, Espace enseignants Mediachimie.org
Crédits : image d'illustration, Fox@Pexels , licence
En raison de la probabilité de circulation concomitante cet hiver des virus grippaux et de la Covid-19, la Haute Autorité de Santé (HAS) recommande de coupler les campagnes de vaccination contre la grippe et la Covid-19 à partir du 18 octobre 2022.
Plusieurs ressources ont fait le point sur les vaccins en général et sur le coronavirus (1). Le lecteur pourra s'y reporter. Rappelons que les vaccins dont nous allons parler ici sont des vaccins prophylactiques (2), et non thérapeutiques (3).
1. Le vaccin antigrippal
La grippe est une maladie respiratoire et aiguë qui est de retour chaque automne et ne disparaît qu’au printemps. Appartenant à la famille Influenza, les virus à l’origine de cette maladie sont de type A, B ou C.
Le vaccin contre la grippe est fabriqué à partir de virus inactivés et fragmentés. Il ne contient pas de virus vivant, et ne présente aucun risque de transmettre la grippe. L’organisme, au contact de ces fractions rendues inoffensives, va développer des anticorps, défenses immunitaires spécifiques qui le protégeront face au virus environ 15 jours après la vaccination.
Quelle est la composition du vaccin 2022-2023 ?
Les virus grippaux étant très changeants, il faut adapter chaque année le vaccin aux virus susceptibles de circuler (4) et revacciner chaque année. Le vaccin antigrippal pour l'hiver 2022-2023 cible les virus appartenant aux quatre différentes souches suivantes : un virus de type A/Victoria/2570/2019 (H1N1) ; un virus de type A/Darwin/9/2021 (H3N2) ; un virus de type B/Austria/1359417/2021 ; un virus de type B/Phuket/3073/2013.
On connaît déjà bien les virus H1N1 et H3N2, responsables essentiels de la grippe de 2018 caractérisée par 8 semaines d’épidémie en France et à l’origine de 1,8 million de consultations, de 65 600 passages aux urgences, de 11 000 hospitalisations et de 8100 décès (5).
Comment fabrique-t-on le vaccin contre la grippe ?
Les vaccins vivants atténués sont utilisés depuis 1921 comme le célèbre BCG (6) contre la tuberculose. Depuis une cinquantaine d'années, on fabrique les vaccins à l'aide d'œufs fertilisés. On injecte le virus par un petit trou à l'intérieur de ces œufs qui sont incubés 3 jours à 35°C. Le virus se multipliera à l'intérieur des cellules qui composent l'embryon de poulet. Une nuit à 5°C fait mourir les embryons, puis on récupère et purifie le blanc d'œuf. On tue alors le virus - et les bactéries éventuellement présentes - à l'aide d'un produit chimique (7), puis on purifie ces virus inactivés qui sont ensuite fragmentés (8), ce qui augmente la réponse immunitaire et diminue encore les risques. Le vaccin est alors prêt.
2. Le vaccin contre la COVID-19
Cette année en France, la Haute Autorité de Santé a recommandé des vaccins bivalents (9) qui protègent contre la souche initiale SARS-CoV-2 et son variant Omicron. Ce sont des vaccins à ARNm (10) dirigés contre les protéines de pointe (11) des virus. Les vaccins précédents restent efficaces contre les formes graves, les hospitalisations et les décès, mais les vaccins bivalents sont mieux adaptés aux virus qui circulent actuellement et peuvent éviter l'infection.
Le vaccin à ARNm est-il sans danger ?
La figure 1 montre comment la cellule eucaryote (12) va fabriquer les protéines : une cellule se compose d'un cytoplasme (13) à l'intérieur duquel est le noyau, séparé par une membrane difficile à franchir. À l'intérieur du noyau, l'ADN porteur de l'information génétique va être copié, c'est la réplication ; cet ADN va être reproduit sous forme d'ARN c'est la transcription ; cet ARN va perdre des fragments non utiles, c'est l'épissage qui conduit à l'ARN messager. Ce dernier traverse la membrane pour passer dans le cytoplasme, où il est traduit en protéines.
Figure 1.
Pour préparer le vaccin, comme l'ARNm est détruit dès qu'il pénètre dans l'organisme, on enveloppe l'ARNm fabriqué par synthèse (14) et codant pour les fragments de protéine de pointe dans une membrane artificielle (15) qui mime la membrane externe de la cellule. Lors de la vaccination, ce vecteur va pénétrer dans le cytoplasme où il introduit l'ARNm, mais il ne peut pas pénétrer dans le noyau. Il n'y a donc a priori pas de risque de modification du génome.
Mais ce premier vaccin à ARNm, préparé si vite, est-il vraiment sûr ? Il y a plusieurs arguments qui montrent que sa préparation n'a pas été « bâclée » :
- i) Depuis 1990, une chercheuse hongroise, Katalin Karikó, a proposé d'utiliser l'ARNm dans des buts thérapeutiques (16)
- ii) Ce nouveau type de vaccin a bénéficié des études de 2003 lors de l'épidémie de SARS CoV-1
- iii) La synthèse du fragment d'ARN codant pour un fragment de la protéine de pointe a été très rapide, ce qui a accéléré les choses par rapport aux vaccins classiques
- iv) La circulation très rapide du virus a permis d'obtenir des résultats plus rapidement.
3. Co-vaccination grippe Covid : est-ce sans danger ?
Selon une étude de Santé publique France (17), 25 % des personnes à risque comptent faire les deux vaccins en même temps. Dans un communiqué, l'Assurance maladie rassure : « la co-vaccination est sans danger : les données disponibles indiquent que la co-administration est généralement bien tolérée ». D'ailleurs, lors de la campagne de vaccination contre la grippe 2021-2022 qui était couplée avec celle contre la Covid-19, « aucun signal particulier n’a été identifié ». En cas d'impossibilité ou de refus de recevoir les deux vaccins en même temps, aucun délai n'est à respecter entre deux vaccinations.
Une question assez curieuse se pose : « pourquoi les gens ont-ils plus peur des vaccins que des médicaments ? " Il semblerait que ce soit d'abord la peur de la seringue ! Et le vaccin est une invention récente, du XIXe siècle, alors que l'homme se soigne avec des emplâtres, des tisanes depuis plus de mille ans. Enfin, de tout temps les hommes ont été plus préoccupés par la guérison des maladies que par leur prévention.
Nicole Jeanne Moreau et l’équipe Question du mois
(1) Zoom sur les vaccins (02/10/2020) ; Ensemble de ressources et de liens relatifs au coronavirus SARS-CoV-2 et à la pandémie de COVID-19 (mediachimie.org)
(2) Pour prévenir ou atténuer les effets d'une éventuelle infection par un agent pathogène naturel.
(3) Pour soigner ou aider le patient à lutter contre une maladie déjà survenue, par exemple un cancer.
(4) C’est l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui est chargée, en amont, de leur surveillance.
(5) Selon Santé publique France
(6) Bacille de Calmette et Guérin
(7) Formaldéhyde et/ou détergent
(8) Les vaccins à virions fragmentés contiennent des virus inactivés, qui ont été fragmentés au moyen d’un détergent, d’un solvant ou de ces deux substances. Réf: https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/rapports-publications/releve-maladies-transmissibles-canada-rmtc/numero-mensuel/2018-44/numero-6-7-juin-2018/article-2-resume-vaccin-sous-unitaire-vaccin-antigrippal-virion-fragmente.html
(9) Moderna ou Pfizer-BioNTech
(10) ARN messager
(11) Spicule ou spike
(12) Du grec eu, bien et caryos, noyau. Ce sont les cellules de tout être vivant autre que les bactéries.
(13) Du grec cyto, cellule et plasma, forme
(14) Ils sont synthétisés in vitro à l’aide d’une matrice d’ADN et d’une enzyme, l’ARN polymérase. L’ARN est ensuite purifié sur des colonnes de chromatographie, qui profitent des propriétés chimiques (pH ou affinité) pour séparer les composants de la solution et isoler le produit d’intérêt.
(15) Formée de lipides, de phospholipides et de cholestérol
Exemple de l’excipient du vaccin Pfizer :
source : wikipedia, domaine public, Lien
(16) Elle rejoint en 2013 BioNTech, un des deux laboratoires, avec Moderna, à l'origine du vaccin.
(17) https://www.has-sante.fr/jcms/p_3288855/fr/covid-19-et-grippe-la-has-precise-les-conditions-d-une-co-administration-des-vaccins
Crédits. Illustration : MasterTux/Pixabay ; Figure 1 : © N.J. Moreau
Le cycle des Colloques “Chimie &…” s'enrichit d'un nouvel opus :
Chimie et Intelligence Artificielle
Mercredi 8 février 2023
Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris
Bien que des mouvements sociaux sont annoncés par la RATP et la SNCF pour les 7 et 8 février prochain, le colloque Chimie et Intelligence Artificielle est maintenu.
De nos jours, les nouvelles technologies permettent de générer des données et de les stocker dans des supercalculateurs. À l’aide d’algorithmes, on peut les trier et les interpréter plus vite qu’il n’est humainement possible pour prendre des décisions complexes. Le but de l’intelligence artificielle (IA) est de permettre à des ordinateurs de penser et d’agir comme le feraient des humains. De nouvelles puissances et infrastructures de calcul permettent de disposer des masses de données sans précédent, le « Machine Learning » et le « Deep Learning » les interprètent pour des tâches aussi complexes qu’innovantes.
L’intelligence artificielle est un sujet d’actualité dont la mise en application touche tous les domaines de l’industrie, de la recherche et de notre vie quotidienne. Bien que déjà présente dans la R&D, l’IA est encore pratiquement ignorée de la majorité des chimistes, n’apparaissant dans l’enseignement au niveau supérieur que depuis peu alors que tout le monde est convaincu de la place qu’elle est en train de se créer. Nous souhaitons donc présenter dans ce colloque un nouveau domaine en développement non seulement dans la recherche universitaire et industrielle, mais aussi dans l’enseignement indispensable pour préparer l’avenir.
Pour cela nous avons fait appel d’une part, aux experts universitaires et industriels des principaux domaines d’utilisation dans lesquels chimie et IA sont associés, d’autre part, aux enseignants chercheurs des établissements d’enseignement supérieur qui ont mis en place des formations initiales et continues dans cette nouvelle spécialité.
Ce Colloque est ouvert sur inscription à un large public avec une attention particulière aux jeunes et à leurs enseignants. Pour que ce colloque puisse être accessible au plus grand nombre, il sera diffusé sur la chaine You Tube de Mediachimie.
Le niveau se veut accessible à tous pour permettre un large débat.
Danièle Olivier et Jean-Claude Bernier
Co-Présidents du Comité d’Organisation
Voir le direct sur Mediachimie ou sur Youtube.
Inscription gratuite et obligatoire : INSCRIPTIONS
Retrouvez le quiz "Chimie et intelligence artificielle"
La 20e édition du Village de la Chimie se tiendra les vendredi 10 et samedi 11 février 2023 à à la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris.
Le Village de la Chimie des Sciences de la Nature et de la Vie a été initié en 2003 par France Chimie Île-de-France avec le soutien du Medef Île-de-France et en partenariat avec l’Éducation Nationale afin de promouvoir, auprès des jeunes, les métiers de la Chimie et les filières de formation, y compris par l’apprentissage, pour les exercer.
Sont ainsi associés à cet évènement, les entreprises et leurs professionnels issues des industries chimiques mais également d’autres secteurs d’activité employant des chimistes. De même, participent à cette manifestation, l’ensemble des écoles et des universités et leurs professeurs enseignant la chimie. Enfin, de nombreux partenariats ont été tissés notamment avec la communauté scientifique : (Femmes et Sciences, Société Chimique de France, Pôle Emploi, Collège de France, Académie des Sciences, OPCO 2i , Infochimie, La Gazette du Labo, IDFM RADIO 98FM, CNRS, IGESR,...).
Pour répondre à ces enjeux, l’ensemble des acteurs du Village de la Chimie ont décidé de tenir sa 20e édition, les 10 et 11 février 2023, à la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris.
Pour en savoir plus : https://www.villagedelachimie.org/