| Un prix Nobel pour la « nanochimie »
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Le prix Nobel de chimie qui vient d’être décerné ce 4 octobre par l’Académie royale des sciences de Suède couronne trois chercheurs Moungi G. Bawendi (MIT), Louis E. Brus (Columbia University) et Alexei I. Ekimov (Nanocrystals Technology Inc.) pour le développement des « points quantiques » dénommés encore « boites quantiques » ou en anglais « quantum dots ».
Sous ces noms énigmatiques on trouve une très belle découverte due au savoir-faire des chimistes qui savent fabriquer des nanoparticules de semi-conducteurs tels que des séléniures ou tellurures comme CdSe et CdTe mais aussi PbSe et ZnSe. On part de précurseurs organométalliques et par un réducteur doux sont obtenues des suspensions colloïdales maitrisables où l’on peut arrêter la croissance des particules à quelques nanomètres (entre 2 et 10 nm). C’est plus de 10 000 fois plus petit qu’un cheveu.
Qu’arrive-t-il à ces minuscules particules de semi-conducteurs ?
Alors que dans un semi-conducteur les électrons se partagent entre 2 bandes d’énergie séparées par un gap, le fait que l’on diminue exagérément la taille du semi-conducteur, les niveaux d’énergie ne s’organisent plus en bandes mais se réduisent à des niveaux individuels discrets : on dispose alors de niveaux « quantiques » et les transitions électroniques s’accompagnent d’une émission lumineuse qui dépend de la taille de la nanoparticule bleu pour 2 nm, vert pour 3 nm, rouge pour 6 nm…
Déposés sur un écran plat de télévision éclairés par une LED bleue ils émettent par fluorescence des fréquences qui élargissent l’espace colorimétrique avec une énergie abaissée. Avec les téléviseurs QLED différents des OLED on gagne en intensité lumineuse et en nombre de couleurs.
Une autre qualité de ces nano semi-conducteurs c’est que sous l’influence de la lumière ils sont capables d’émettre des électrons et donc un courant. Avec un bon drainage de celui-ci on peut disposer de vitres transparentes puisque leur taille est plus petite que certaines longueurs d’onde du visible. Même si leur rendement est faible (moins de 3%) on commence à imaginer pour les immeubles des vitrages photovoltaïques grâce aux « quantum dots ».
Enfin en imagerie médicale leur taille réduite permet d’avoir des pixels très petits et une définition d’image améliorée pour la détection de cellules cancéreuses.
Jean-Claude Bernier
Octobre 2023
Les quantum dots sont des nanoparticules de semi-conducteurs qui, éclairées par une LED bleue, émettent une lumière dont la couleur dépend de la taille. Source : Chimie et lumière (EDP Sciences, 2021) p. 144. ISBN: 9782759825073
Pour en savoir plus
- Nanomatériaux et nanotechnologies : quel nanomonde pour le futur ?, P. Rabu, conférence et article, Colloque Chimie, nanomatériaux et nanotechnologies, Fondation de la Maison de la chimie (2018)
- Colloque Chimie, nanomatériaux, nanotechnologies, colloque Fondation de la Maison de la chimie (2018) ; Chimie, nanomatériaux, nanotechnologies (EDP Sciences, 2019) ISBN : 9782759823765
- La chimie s’invite dans la guerre des télés, J.-C. Bernier, éditorial Mediachimie.org (mars 2017)
- La lumière électronique : du tube cathodique aux écrans plats J.-C. Bernier, conférence et article, Colloque Chimie et lumière, Fondation de la Maison de la chimie (2020)
- Zoom sur les progrès de l’optoélectronique : des LED aux OLED J.-P. Foulon, Zoom sur… Mediachimie.org (mars 2023)
Crédit : Moungi Bawendi, Louis Brus et Alexei Ekimov. Prix Nobel de Chimie 2023. Ill. Niklas Elmehed © Nobel Prize Outreach.