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L’hydrogène au secours de l’économie européenne ?

Le 23 juillet 2020, la Commission européenne a présenté à Bruxelles les plans pour le système énergétique de l’avenir et pour l’hydrogène propre. Ces plans doivent ouvrir la voie à un secteur de l’énergie plus efficace et
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Le 23 juillet 2020, la Commission européenne a présenté à Bruxelles les plans pour le système énergétique de l’avenir et pour l’hydrogène propre. Ces plans doivent ouvrir la voie à un secteur de l’énergie plus efficace et plus interconnecté. Les stratégies prévoient un nouveau programme d’investissements dans les énergies propres dans le cadre du plan de relance, pour stimuler la reprise économique suite à la crise du coronavirus. Parmi ces programmes s’inscrit « la stratégie de l’Union européenne pour l’hydrogène » et dans la foulée se crée « l’alliance européenne pour un hydrogène propre » avec les industriels du secteur, la société civile, les ministères nationaux et la Banque européenne d’investissement.

À cet effet et concrètement, la feuille de route de la transition est la suivante :

Emboitant le pas à la marche politique triomphale vers le verdissement de ce gaz léger cher aux chimistes, l’Allemagne a annoncée fin juin vouloir devenir le numéro 1 du secteur avec 9 milliards € d’investissement suivi par la France qui en ce début septembre annonce y consacrer 2 milliards € dans le plan de relance.

L’hydrogène serait-il devenu comme le protoxyde d’azote un gaz hypnotique pour nos politiques ? Nos lecteurs de mediachimie.org connaissent bien l’hydrogène comme vecteur énergétique et ses applications.

C’est un gaz industriel important, 75 millions de tonnes sont fournis annuellement à l’industrie pour la désulfuration en pétrochimie (2), la synthèse de l’ammoniac et des engrais azotés (3), mais aussi pour l’alimentaire, l’électronique, la métallurgie sans oublier le spatial. En France la production est de 1 million de tonnes et à 96% cet hydrogène vient du vaporeformage (4) qui correspond à la réaction suivante 2 H2O + CH4 = CO2 + 4 H2 . Une réaction similaire est possible avec les hydrocarbures, et la production d’une tonne d’hydrogène s’accompagne donc de 6 à 10 tonnes de gaz carbonique d’où le nom d’ « d’hydrogène gris », dont le prix de revient est de l’ordre de 1 € /kg.

Actuellement, pour moins de 4%, l’hydrogène est produit par l’électrolyse de l’eau. Le procédé le plus mature est l’électrolyse alcaline avec une solution de potasse comme électrolyte. Les procédés modernes utilisent des électrodes bipolaires et travaillent sous une pression de 30 bars pour un rendement électrochimique supérieur à 70%. À l’anode on dégage de l’oxygène

2 OH- → ½ O2 + H2O + 2e-

et à la cathode se dégage l’hydrogène

2 H2O + 2e- → H2 + 2 OH-

Une autre méthode est l’échange sur membrane polymère avec catalyseur platine dite PEM pratiquement l’inverse de la pile à hydrogène, qui a un bon rendement mais moins mature du point de vue industriel.

Cet hydrogène issu de l’eau revient de 3 à 6 €/kg en fonction du coût de l’électricité. Si celle-ci est produite par procédé renouvelable, éolien, photovoltaïque ou l’hydraulique alors il est dit «  hydrogène vert ». On comprend bien que la politique de décarbonisation de l’énergie (5) conduit à condamner le vapo reformage et à fixer comme objectif la croissance des couples électricité renouvelable-électrolyseur.

Voyons si la stratégie européenne est compatible avec les contraintes électrochimiques, thermodynamiques et économiques.

De nombreux industriels maitrisent assez bien l’électrolyse. Plusieurs français dont McPhy commercialisent des installations de plusieurs MW. L’exemple d’Apex Energy ,qui dispose d’électrolyseur des 2 MW, produit environ 1000 m3/h soit environ 700 t /an. Si elle fonctionne avec une énergie renouvelable dont le taux de charge est au mieux de 25% on peut compter par MW de 100 à 120 t/an. Une installation de 1 GW produira alors 120.000 tonnes et les 6 GW prévus en Europe en 2024, 720.000 tonnes soit 7% de la consommation européenne de 10 millions de tonnes.

À quel prix ?

Une très belle étude de l’APHYPAC * donne pour 2020 un coût de l’ordre de 1000 € à 800 € /kW pour un électrolyseur couplé à un réseau d’électricité renouvelable soit donc 1 milliard € à 800 millions € par GW. On comprend alors le prix du ticket d’entrée pour cette transition.

Sur quelle surface ?

Avec les derniers progrès des électrodes bipolaires et la pressurisation pour l’électrolyseur on compte 45 m2 d’emprise au sol /MW soit donc 4,5 hectares pour 1 GW, auquel il faudrait ajouter l’emprise au sol du champ d’éoliennes ou de panneaux photovoltaïques, soit 200 éoliennes de 5 MW sur 100 hectares ou 1 GW de photovoltaïque sur 2000 hectares, à moins de produire en off-shore. On voit que les contraintes financières et physiques à l’échéance 2050 ou même 2030 ne sont pas aussi simples que l’on pense.

Alors, pourquoi cet emballement politique, financier et médiatique ?

C’est que les promesses de l’industrie de l’hydrogène sont importantes. Passons sur l’opportunité de l’hydrogène décarboné pour l’industrie chimique et métallurgique si son prix arrive à concurrencer celui du vaporéformage.

Le secteur du transport est lui bien concerné par un carburant non polluant ne laissant comme gaz d’échappement que de l’eau et de l’azote grâce à la pile à hydrogène (6) (7) fournissant l’électricité aux moteurs. Grâce à des champions européens Alstom, Air liquide et Linde les trains Coradia iLint (8) roulent déjà en Allemagne et vont bientôt remplacer nos vieux TER régionaux. Le secteur des poids lourds qui peuvent eux aussi supporter le poids du « pack » de la pile à hydrogène est en attente. L’exemple de la jeune société américaine Nikola Corporation spécialiste des camions à hydrogène valorisée à 30 milliards de dollars à son entrée en bourse est tout simplement fou. Pour l’automobile des particuliers, la bataille sera rude entre le véhicule électrique et celui à hydrogène (9). Le poids et le prix du « pack » et du réservoir composite tenant à la pression de 700 bars représentent près de 50% du prix de l’automobile (32.000 € sur 70.000 €). Le prix à la pompe du kg d’hydrogène, le manque de station haute pression, le mauvais rendement thermodynamique, handicapent pour l’instant son développement.

En sachant qu’un électrolyseur de nouvelle génération fournit environ 1 Nm3 d’hydrogène par 3,5 kWh, et si on suppose que l’hydrogène vert est issu d’une source électrique ne dégageant pas de CO2 alors l’électricité nucléaire à 4 centimes du kWh mettra le kg d’hydrogène à 1,30 € concurrent de l’hydrogène gris. Serait-ce l’hydrogène « vert clair » ?


* Production d’hydrogène par électrolyse de l’eau (fiche 3.2.1)-Association française pour l’hydrogène et les piles à combustible

Septembre 2020
Jean-Claude Bernier

Pour en savoir plus
(1) Qu’est-ce que l’hydrogène vert ? (Question du mois)
(2) Comment assainir l’atmosphère des villes ? L’hydrotraitement (Fiche Réaction en un clin d’oeil)
(3) Comment fabriquer des engrais avec de l’air ? La synthèse de l’ammoniac (Fiche Réaction en un clin d’oeil)
(4) Et revoilà l’hydrogène
(5)L’hydrogène, une source d’énergie pour le futur
(6) H2O ou comment la synthèse de l’eau conduit à la pile à hydrogène ? (Fiche Réaction en un clin d’oeil)
(7) Hydrogène, la roue libre (vidéo)
(8) Vive le Coradia iLint
(9) De nouveaux véhicules automobiles pas très verts !
 

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Le nitrate d'ammonium, un engrais dangereux ?

La récente explosion à Beyrouth au Liban qui a entrainé une véritable catastrophe humaine et matérielle est, semble-t-il en attendant les conclusions d’une commission d’enquête, due à l’explosion de 2700 tonnes de nitrate
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La récente explosion à Beyrouth au Liban qui a entrainé une véritable catastrophe humaine et matérielle est, semble-t-il en attendant les conclusions d’une commission d’enquête, due à l’explosion de 2700 tonnes de nitrate d’ammonium (NH4NO3) stockés depuis plusieurs années dans un entrepôt sur le port avec d’autres produits inflammables.

On peut rappeler que pour augmenter la production des cultures depuis l’Antiquité les hommes ont cherché à amender leurs terres. Les plantes pour croître ont besoin de soleil, de CO2 et d’eau pour la photosynthèse (1), mais aussi d’éléments minéraux comme l’azote, qu’ils ne peuvent fixer dans l’air. On ajoute alors des engrais azotés pour améliorer les rendements, l’ammonitrate a permis depuis deux siècles de multiplier par 10 les rendements des plantes vivrières et de faire face à l’augmentation de la population de la planète. Ce fut d’abord l’importation du « guano », excréments marins riches en azote des îles proche du Pérou, puis les nitrates de soude du Chili jusqu’au début des années 1900. Après 1909 deux chimistes allemands Fritz Haber et Carl Bosch (2) mettent au point la synthèse de l’ammoniac à partir de l’azote de l’air et d’hydrogène (N2 + 3H2 = 2 NH3), puis, par barbotage de l’ammoniac dans l’acide nitrique ou oxydation catalytique, on produit le nitrate d’ammonium NH4NO3. Cet engrais sous forme de granulés est très employé en agriculture. La production mondiale est proche de 120 millions de tonnes (en tonnes d’azote).

Le problème est que durant la Grande Guerre de 14-18 l’industrie allemande a utilisé le nitrate mélangé avec environ 6% d’hydrocarbure pour en faire des explosifs qui ont servi à faire des milliards d’obus et de munitions. Lors du traité de paix de Versailles en 1919 les brevets allemands furentl’objet de tractations sévères pour que la France puisse à son tour produire le nitrate qui a conduit à l’usine ONIA (Office national industriel de l’azote) à Toulouse devenue plus tard AZF, usine qui a explosée en septembre 2001. en effet,  mélangé à certains produits réducteurs (cellulose, huile, fuel) ou à des catalyseurs, le nitrate peut être déstabilisé. De même, avec la température, il peut se décomposer, fondre, puis au bout d’un certain temps, pris dans un incendie, exploser après l’apparition de vapeurs rousses qui sont de l’oxyde d’azote NO2 car NH4NO3 fait partie des « groupements explosophores » (3). NO3 est une réserve d’oxygène qui peut se combiner avec le carbone, l’hydrogène ou le soufre en dégageant des quantités phénoménales de gaz qui vont provoquer une onde de choc s’ils sont confinés dans une enceinte fermée, bâtiment ou navire. Regardons en effet la décomposition thermique :

NH4NO3 → NO + N + 2 H2O

La réaction stœchiométrique montre que 80 grammes de nitrate vont donner environ 80 litres de gaz. Comme la densité du nitrate est proche de 2 on a donc une expansion volumique d’un facteur 2000 cela veut dire que 8 tonnes de nitrates occupant approximativement un volume de 4 m3 vont exploser en donnant 8000 m3 de gaz dans une enceinte fermée de 100 m3 cela entraîne une pression de plus de 80 atmosphères qui fait tout voler en éclat. Imaginez alors que les 2700 tonnes de Beyrouth prises dans l’incendie vont dégager d ‘abord une fumée rousse de NO2 (NO oxydé avec l’oxygène de l’atmosphère) puis un mélange blanc d’azote et de vapeur d’eau d’un volume total de l’ordre de 3 millions de m3. Si le bâtiment de stockage faisait 3000 m3 la pression de l’onde de choc est de plus de 1000 atmosphères détruisant tout dans des kilomètres à la ronde. Décomposition et confinement sont les deux artisans de l’explosion destructrice.

Au cours du temps les accidents n’ont pas manqué :

  • en 1921 à Oppau sur le grand complexe chimique de BASF près de Ludwigshafen. Pour éviter de gratter à la pioche les tas de nitrates une équipe utilise des cartouches de dynamite. L’une d’elle, trop forte, provoque l’explosion de tout le stockage entrainant 586 morts, des milliers de blessés et la destruction du complexe chimique.
  • en 1947 à Brest un Liberty Ship norvégien avec 300 tonnes de nitrates prend feu. Le navire est éloigné du quai mais pour étouffer l’incendie on ferme les cales, entrainant confinement et explosion et causant 26 morts et plusieurs milliers de blessés.
  • en 1947 encore, à Texas City sur le port, un Liberty Ship français explose avec 2000 tonnes de nitrates. Presque tous les pompiers qui étaient mobilisés sur l’incendie sont tués.
  • en 2001 à Toulouse le dépôt de 300 tonnes de nitrate d’AZF explose : 31 personnes tuées, 2500 blessés et des dégâts considérables sur Toulouse.
  • en 2013, au Texas l’usine de la West Fertilizer Company explose lors un incendie : plusieurs centaines de morts.
  • en 2015, au nord de la Chine à Tianjin, l’incendie de plusieurs tonnes de produits chimiques dont 800 tonnes de nitrates provoque une explosion et plusieurs centaines de morts.

Ce sont les accidents les plus connus et les plus récentes catastrophes, cela n’empêche cependant pas que des millions de sacs de granulés sont chaque année utilisés par l’agriculture mondiale dans des conditions de sécurité exemplaires et respectées.

Jean-Claude Bernier
Août 2020

Pour en savoir plus
(1) Le CO2, matière première de la vie
(2) Comment fabriquer des engrais avec de l'air ? La synthèse de l'ammoniac
(3) Les nouvelles techniques d’investigation des explosifs

- Question du mois
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L’ozone : bon ou mauvais ?

On entend parler de bon et de mauvais ozone ; cette question a-t-elle un sens ? Première phrase rencontrée : Le trou de la couche d’ozone nous met en danger, l’ozone est « bon ».L’ozone dit stratosphérique (*) se forme
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On entend parler de bon et de mauvais ozone ; cette question a-t-elle un sens ?

Première phrase rencontrée : Le trou de la couche d’ozone nous met en danger, l’ozone est « bon ».

L’ozone dit stratosphérique (*) se forme dans la haute atmosphère sous l’action des rayonnements UV (ultraviolet) très énergétiques provenant du soleil (**). En absorbant des rayonnements UV-C, une petite quantité de dioxygène O2 se transforme en ozone O3. Celui-ci instable, redonne en partie du dioxygène, en absorbant d’autres rayonnements UV-C. Il s’établit naturellement un équilibre dynamique d’équation :

3 O2 = 2 O3

Il se créé ainsi une « couche d’ozone » essentiellement présente entre 20 et 40 km d'altitude et de concentration comprise entre 2 et 8 ppm.

Ainsi, l’ozone stratosphérique est indispensable car il nous protège de rayonnement solaire ultraviolet.

Toute perturbation de cet équilibre faisant diminuer la teneur en ozone en la consommant par des réactions parasites est donc source de danger. La Fondation belge contre le Cancer rappelle que plus la couche d'ozone est mince, moins elle arrête les rayons UV, et plus l’intensité du rayonnement UV est intense à la surface du sol terrestre. C'est au-dessus de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie que la couche d'ozone est la plus mince [1]. Les modèles informatiques prédisent qu’une diminution de 10 % de la concentration d’ozone stratosphérique pourrait provoquer chaque année 300 000 cancers cutanés, 4500 mélanomes et entre 1,60 million et 1,75 million de cas de cataracte de plus dans le monde [2]. Sans compter que les UV-B ont aussi des répercussions importantes sur les animaux, les organismes marins et les végétaux.

La mise en évidence en 1974 de la responsabilité des CFC (chlorofluorocarbure) dans la destruction de l’ozone stratosphérique (formation d’un trou au niveau de l’Antarctique au cours du printemps austral) a conduit aux accords de Montréal en 1987, limitant leur utilisation. Les scientifiques prévoient que la couche d’ozone dans l’Antarctique ne retrouvera son niveau initial (d’avant les années 1980) que vers 2050 à 2070, car la durée de vie des CFC est importante [3].

Deuxième phrase rencontrée : La présence d’ozone nous met en danger : l’ozone est « mauvais ».

C’est dans les années 1970 que Paul Crutzen (prix Nobel de chimie en 1995) montra que l’ozone est à la fois produit mais aussi détruit dans la troposphère (basses couches de l’atmosphère (*)) grâce à des réactions photolytiques (action de la lumière, ici UV-B) faisant intervenir des oxydes d’azotes [4].

D’une part production d’ozoneD’autre part consommation d’ozone

NO2 → NO + O
suivi de O + O2 → O3

NO + O3 → NO2 + O2

Les oxydes d’azote proviennent essentiellement des secteurs de l'industrie et de la production d'énergie (chauffage urbain entre autres) mais aussi des gaz d’échappement des véhicules à essence et diesel malgré l’usage des pots catalytiques qui en limitent le rejet [5].

Des études postérieures montrent que la formation d’ozone est également liée à la présence de Composés Organiques Volatils (COV), dont 10 % sont issus des activités industrielles et urbaines et 90 % sont d’origines naturelles (***) [6].

Ainsi l’ozone troposphérique est un polluant secondaire issu des polluants primaires que sont les NOx et les COV.

Concrètement la formation d’ozone dépend à la fois des quantités d’oxydes d’azote NOx et de COV présents dans la troposphère mais aussi du rapport de la quantité de COV par celle de NOx.

Cette chimie complexe explique que si l’ozone se forme en milieu urbain essentiellement par la présence des oxydes d’azote sa concentration n’y est pas maximale mais qu’elle l’est en milieu rural proche de la ville car la production de COV par la végétation y est plus forte et celle de NOx plus faible [6], [7].

En quoi cette accumulation d’ozone, accentuée depuis l’ère industrielle est-elle néfaste ?

C’est d’abord un gaz à effet de serre qui va donc participer au réchauffement de la troposphère [6].

C’est aussi un puissant agent oxydant pouvant générer des radicaux hydroxyles (HO) selon les réactions [7]

O3 → O2 + O          suivi de          O + H2O → 2 HO

Ces radicaux hydroxyles ont une grande importance sur la santé humaine, en provoquant des problèmes respiratoires et des irritations ophtalmiques.

L’ozone intervient aussi dans le dépérissement de la forêt [8] et nos productions alimentaires souffrent de l’augmentation de ce polluant dans la troposphère ; ainsi la production des tomates ou du blé pourraient être diminuée de 10 % dans les zones les plus polluées (Asie et pays méditerranéens) [9].

Ces dernières années des études épidémiologiques suggèrent que l’ozone troposphérique pourrait jouer un rôle dans le développement et la progression de l’insulino-résistance, associée au diabète de type 2 [10].

Du bon usage de l’ozone dans certaines applications industrielles [11].

Dans le cadre d’usage industriel, l’ozone est produit sur le site d’utilisation par décharge électrique à haute tension dans un flux d’oxygène.

L’ozone étant un oxydant puissant il est utilisé dans différentes étapes du traitement de l’eau pour obtenir de l’eau potable mais aussi pour traiter les eaux usées ainsi que de nombreux effluents industriels. Il sert pour la désinfection des eaux de certaines piscines en remplacement de l’eau de javel. Parmi les applications industrielles, on peut citer son usage dans certains procédés de blanchiment de la pâte à papier et dans l’agroalimentaire pour le blanchiment du sucre de canne.

Autres sources d’ozone et cadre professionnel [12].

Quant à la santé au travail, une attention particulière est apportée aux professionnels utilisant des appareils (imprimantes, photocopieuses, spectrophotomètres) utilisant des rayonnements UV ou laser susceptibles de former de l’ozone à partir du dioxygène.

Lydie Amann et l’équipe Question du mois

 

(*) La troposphère est la partie de l’atmosphère comprise environ entre 0 et 15 km de la Terre. La stratosphère est comprise environ entre 15 km et 50 km de la terre.
(**) Les rayonnements sont caractérisés par leur longueur d’onde exprimée en nanomètres (nm) : UV-B : 280−315 nm ; UV-C : 100−280 nm. Les UV C sont les plus énergétiques.
(***) COV liés à l’activité humaine et industrielle : évaporation d’hydrocarbures lors du raffinage, ou de solvants organiques ou de carburants imbrûlés non retenus par les pots catalytiques ;
COVB ou COV biogéniques, d’origine naturelle : émis par les plantes ou certaines fermentations végétales ou animales. Ils se biodégradent plus ou moins lentement.

 

Pour en savoir plus :
(1) Rayonnement ultraviolet, site de la Fondation contre le Cancer
(2) Effets du rayonnement UV sur la santé, site de l’Organisation mondiale de la santé
(3) 2019 Ozone Hole is the Smallest on Record Since Its Discovery, site de la NASA (National Aeronautics and Space Administration)
(4) Le prix Nobel 1995 couronne la chimie vitale de la stratosphère, L’Actualité chimique n° 192 (décembre 1995) p. 57
(5) Les oxydes d’azote (NOx) : définition, sources d’émission et impacts, site de l’ADEME (Agence de la transition écologique)
(6) Les défis de la santé et du bien-être en ville : pollution atmosphérique, nuisances thermiques, odeurs, de Jacques Moussafir, in La chimie et les grandes villes (EDP Sciences 2017), pp. 193-216
(7) L'ozone troposphérique : production/consommation et régimes chimiques, de Marie Camredon et Bernard Aumont, Pollution atmosphérique, n° 193 (janvier-mars 2007) pp. 51-60 (voir Figure 2 : Profil type de la vitesse de production d'ozone en fonction de la quantité de NOx)
(8) État des forêts d’altitude en relation avec la pollution de l’air par l’ozone dans la région niçoise, de Laurence Dalstein-Richier et al., Pollution atmosphérique, n° 193 (octobre-décembre 2005) pp. 503-519
(9) Impacts de l’ozone sur l’agriculture et les forêts et estimation des coûts économiques, de Jean-François Castell et Didier Le Thiec, Pollution atmosphérique, n° 229-230 (avril-septembre 2016) pp. 142-152
(10) Pollution atmosphérique et diabète… Quel lien possible ? Une exposition expérimentale à l’ozone chez le rat induit une insulino-résistance périphérique, de Roxane E. Vella, Alain Géloën et Christophe O. Soulage, Pollution atmosphérique, n° 231-232 (octobre-décembre 2016) pp. 105-116
(11) Oxydation et réduction appliquée au traitement de l’eau- Ozone, de Sylvie Baigh et Pierre Bouchet, Techniques de l’ingénieur, mars 2017
(12) Ozone : Fiche toxicologique n° 43, site de l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles)

 

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Colloque Chimie et Agriculture durable - mercredi 4 novembre 2020

[Modification : 2 novembre 2020] Mesdames, Messieurs, Dans les circonstances actuelles où le confinement est la règle commune, nous avons essayé d’organiser ces derniers jours, uniquement à distance grâce aux connections
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[Modification : 2 novembre 2020]

Mesdames, Messieurs,

Dans les circonstances actuelles où le confinement est la règle commune, nous avons essayé d’organiser ces derniers jours, uniquement à distance grâce aux connections de tous les participants via le réseau internet, le colloque « chimie et agriculture durable » qui devait se tenir le mercredi 4 Novembre 2020 à l’initiative de la Fondation.

Force est de constater que pour des raisons techniques, et notamment les limites en terme d’interactivité et d‘échanges entre les conférenciers et le public, en accord avec le Président de la Fondation de la Maison de la Chimie, les membres du comité d’organisation du colloque et les conférenciers ont décidé de reporter le colloque sous sa forme initialement prévue (même programme, mêmes conférenciers) en présentiel à une date ultérieure qui vous sera communiquée dès que cela sera possible au plan sanitaire.

Nous vous prions de bien vouloir nous en excuser et vous remercions de votre compréhension.

Bernard Bigot
Président de la Fondation de la Maison de la Chimie

 


Le cycle des Colloques “Chimie &…” s'enrichit d'un nouvel opus :

Chimie et agriculture durable : un partenariat en constante évolution scientifique
Mercredi 4 novembre 2020

Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris

 

Les relations actuelles entre Agriculture, Chimie et attentes de la Société sont loin d’être simples, comme l’illustrent les prises de positions publiques récentes de certains. Pourtant, des relations sereines entre ces trois acteurs sont indispensables, ainsi que ce fut longtemps le cas. Par exemple, la synergie entre l’agronomie scientifique et la chimie a permis au 20e siècle la découverte des fondements de l’alimentation des plantes et de la lutte contre les bio-agressions, si utiles à la production agricole et aux consommateurs.

Au 21e siècle, face aux besoins planétaires en termes d’alimentation et d’environnement, l’urgence est de développer une Agriculture raisonnée qui limite son impact sur les sols, l’eau et l’air, qui préserve la biodiversité et qui consomme le minimum d’énergie envisageable. Pour produire mieux et plus, il faut développer la recherche et l’innovation technologique. La Chimie a sa place dans cette stratégie avec la conception de nouveaux produits en étroite liaison avec la biologie et l’écologie, et en fonction d’évaluations complètes et intégrées de leurs effets.

Le citoyen et le consommateur souhaitent que les innovations de la chimie contribuent à une amélioration de l’alimentation proposée et de la protection des plantes. Ces enjeux majeurs reposent sur une coopération transdisciplinaire accrue. Des exemples de cette coopération vous seront présentés par des experts scientifiques, universitaires ou industriels, dans les principaux thèmes actuels de la recherche agronomique et agro écologique.

Ce colloque est ouvert à un large public avec une attention particulière aux lycéens et à leurs enseignants. Le niveau des interventions se veut accessible à tous pour permettre un large débat.

Bernard BIGOT
Président de la Fondation internationale de la Maison de la Chimie
et Directeur Général de l’Organisation internationale ITER
 

En savoir plus

Programme du colloque (PDF)


[Modification : 22 octobre 2020] Le présentiel est annulé. Le colloque sera retransmis en direct tout au long de la journée, depuis la Maison de la Chimie, sur la chaîne Youtube de notre médiathèque mediachimie.org.

- Question du mois
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Parasite, champignon, bactérie et virus : quelles différences ?

Différentes sortes d’agents infectieux provoquent maladies et infections chez l’Homme. Cela peut être des parasites, des champignons, des bactéries, des virus. On a aussi eu le prion, il y a plusieurs années. Les
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Différentes sortes d’agents infectieux provoquent maladies et infections chez l’Homme. Cela peut être des parasites, des champignons, des bactéries, des virus. On a aussi eu le prion, il y a plusieurs années.

Les parasites

Les parasites sont des êtres vivants qui vivent aux dépens d’un autre organisme appelé l’hôte. Par exemple, le sarcopte responsable de la gale, qui est un acarien (Fig. 1), les vers comme le ver solitaire, des protozoaires comme l’agent de la malaria. Ce sont tous des eucaryotes (1) ce qui signifie que leurs cellules ont un noyau, comme les nôtres.

Les champignons et les levures

L’infection provoquée par les champignons et les levures est alors appelée une mycose ou une infection fongique. Champignons et levures sont aussi des organismes pluricellulaires eucaryotes. Ils causent des maladies souvent de la peau (teigne) et des muqueuses (bouche, muqueuses génitales), mais peuvent aussi causer des infections bien plus graves des organes internes comme les poumons (Aspergillus fumigatus par exemple) (Fig. 2).

Les bactéries

Louis Pasteur, Robert Koch sont des pionniers de la bactériologie. Les bactéries (2) ne sont pas des eucaryotes, mais des procaryotes (3), qui n’ont pas de noyau. Ce sont les plus connus des agents infectieux : Escherichia coli, Staphylococcus aureus (staphylocoque doré), Vibrio cholerae (bactérie du choléra), Mycobacterium tuberculosis (tuberculose). Comme les bactéries diffèrent des cellules humaines, les médicaments qui les éliminent sont moins toxiques que les antiparasitaires ou les antifongiques. Mais le problème est la résistance bactérienne : les bactéries devenues résistantes ne sont plus éliminées par les antibactériens et l’infection ne guérit pas. C’est devenu un problème très important.

Parasites, champignons, bactéries sont tous des organismes vivants, capables en général de vivre et de se multiplier dans un milieu nutritif acellulaire : un peu de sucre, de graisse et de protéines (bouillon de culture).

Les virus

Schématiquement, les virus (4) sont des sacs contenant des molécules biologiques, acides nucléiques, protéines ; plus exactement, ce sont des acides nucléiques enfermés dans une capside protéique (Fig. 4 et Fig. 5) ; ils n’ont pas de système métabolique (5). On dit alors qu’ils ne sont pas vivants, en ce sens qu’ils ne peuvent pas vivre et se multiplier dans un bouillon de culture comme le font les agents précédents. Ils ont besoin d’une cellule hôte « qui fait le travail pour eux » : quand ils y entrent, ils lui transmettent leur acide nucléique, ADN (6) ou ARN (7). Pour cultiver les virus, on cultive des cellules, puis on les infecte par le virus. Une fois fixé sur la cellule, le virus va fusionner avec elle. À ce moment, il libère à l’intérieur de la cellule son acide nucléique, et c’est la machinerie enzymatique de la cellule infectée qui se chargera de répliquer ces acides nucléiques et in fine d’aboutir à un ARN messager traduit en protéines pour le compte du virus. On va ainsi synthétiser d’autres virus, qui vont se créer une enveloppe au moyen de celle de l’hôte (Fig. 7), sortir et se disséminer. La cellule hôte est ainsi affaiblie, ce qui conduit le plus souvent à sa mort par lyse (8) : elle éclate, libérant les particules virales qui vont infecter d’autres cellules, etc.

Parmi les virus capables d’infecter l’Homme, il y a ceux qui donnent la grippe ou plutôt les grippes, la poliomyélite, l’hépatite A (jaunisse), la fièvre jaune, la variole, le SIDA, le virus Ebola (fièvre hémorragique), les virus oncogènes - capables d’entraîner des cancers, etc. Ils sont responsables de nombreuses épidémies et même pandémies, souvent respiratoires apparues depuis un siècle, la première étant la grippe espagnole de 1918, qui a causé près de 30 millions de morts. En 1957-1958, la grippe asiatique a entrainé 2 millions de morts ; en 1968-9 la grippe de Hong-Kong, 1 million. Durant les six dernières années, nous avons eu au moins six grandes épidémies.

Et le coronavirus ?

Son nom officiel est coronavirus SARS-CoV-2, en français SRAS pour Syndrome Respiratoire Aigu Sévère. Le nom « Covid-19 « que l’on trouve parfois désigne la maladie et non le virus qui la provoque, 19 indiquant l’apparition en 2019. C’est un coronavirus (9), car l’enveloppe virale (Fig. 4 et Fig. 5) est « décorée » de protéines qui forment des protubérances, dont le cliché en microscopie électronique rappelle les images de la couronne solaire. Ce sont ces protéines qui permettent au virus de se fixer sur la cellule et d’y entrer. Les coronavirus sont des virus à ARN. Ils ont été découverts dans les années 1930 dans des élevages de volailles où ils causent diverses infections. On connaît 7 coronavirus responsables de maladies chez l’Homme, allant d’infections de l’appareil respiratoire bénignes (rhumes et maux de gorge) à graves et à très graves (SARS et MERS).
Ces coronavirus sont d’origine animale, probablement les chauves-souris, puis transmises à des mammifères (civette, dromadaire…) ou à des oiseaux (volailles de marché en Chine). Une fois franchie cette barrière entre espèces, la transmission d’homme à homme devient très facile. Pour le SARS-CoV-2, on compte à ce jour plus de 9.600.000 cas et près de 500.000 morts dans le monde, les pays les plus touchés étant les USA avec 2.400.000 cas et 120.000 morts, puis le Brésil, le Royaume Uni, l’Italie, la France, l’Espagne, respectivement 54.900, 44.500, 34.600, 29.700, 28.300 morts (10).

Nicole Moreau et l'équipe Question du mois
 

 

Notes :
(1) Du grec eu, bien et karuon, noyau
(2) Du grec bacterion, qui veut dire bâtonnet
(3) Du grec pro, avant et karuon, noyau
(4) Du latin virus, venin ; mot établi au XVIe siècle par Antoine Paré
(5) Du grec metabolein. Le métabolisme est l’ensemble des réactions de synthèse, génératrices de matériaux (anabolisme), et de dégradation, génératrices d'énergie (catabolisme), qui s'effectuent au sein de la matière vivante à partir des constituants chimiques fournis à l'organisme par l'alimentation et sous l'action de catalyseurs spécifiques.
(6) ADN : acide désoxy-ribonucléique
(7) ARN : acide ribonucléique
(8) Du grec lusis, action de délier, dissoudre.
(9) Il n’est pas le seul coronavirus, mais est l’un des plus gros, mesurant de 50 à 200 nm de diamètre.
(10) la date du 26 juin 2020 (https://gisanddata.maps.arcgis.com )
 


Figure 1 : Aceria anthocoptes, image obtenue par microscopie électronique à balayage
Source : Wikimedia
 


Figure 2 : Aspergillus fumigatus vu au microscope électronique.
Source : Wikimedia
 


Figure 3 : Différents types de procaryotes
Source : Maulucioni /Wikimedia (licence CC BY-SA 3.0)
 


Figure 4 : Représentation schématique d’un virus (HIV)
Source : wikimedia
 


Figure 5 : Représentation schématique d’un coronavirus
Source : https://www.scientificanimations.com (licence BY-SA 4.0)

- Éditorial
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Des métaux qui guérissent ?

On sait que pour être en bonne santé, les oligoéléments jouent un rôle majeur dans notre organisme ce sont des composés du zinc, du fer, du manganèse, du magnésium… En revanche on connait moins les vertus antibactériennes
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On sait que pour être en bonne santé, les oligoéléments jouent un rôle majeur dans notre organisme ce sont des composés du zinc, du fer, du manganèse, du magnésium… En revanche on connait moins les vertus antibactériennes (antivirales ?) des métaux purs. En cette période de pandémie de la covid-19, il n’est pas étonnant qu’un renouveau des recherches sur des applications sanitaires se manifeste et notamment sur l’or, l’argent et le cuivre dans l’ordre décroissant des prix !

L’or (1) par sa couleur jaune a des reflets complexes dus au plasma de surface fluctuant qu’engendrent ses électrons de valence faiblement liés. Les plasmons de surface font actuellement l’objet d’études en particulier pour les nanoparticules (2) sans cependant que ces propriétés de surface fassent l’objet d’applications autres qu’en catalyse. L‘or métal est toutefois utilisé en chrysothérapie et en homéopathie.

L’argent est un métal qui a des propriétés germicide et bactéricide. Dans l’Antiquité (3) on se servait de plaques d’argent pour purifier l’eau. Couverts et plats revêtus d’argent eurent une réelle utilité tant qu’on ne pouvait pas disposer d’eau potable. De là vient l’usage d’offrir en cadeau de baptême aux enfants une timbale en argent. Cette propriété est maintenant redécouverte et utilisée avec les nanoparticules d’argent issues de solutions colloïdales (4). Elles sont utilisées comme germicides dans les textiles sportifs et pour les chaussettes afin d’éliminer les odeurs de transpiration. Dans les dispositifs médicaux, bandages et pansements, ce sont leurs propriétés bactéricides qui sont recherchées, de même dans les emballages alimentaires et les revêtements de parois de réfrigérateur. Avec la pandémie, des tissus imprégnés de particules d’argent et résistant plus de 20 fois au lavage ont été utilisés pour la fabrication de masques de protection.

Le cuivre (5). Parmi les nombreuses études sur le coronavirus, celles des universités de Californie (Los Angeles et Princeton) publiées dans le New England Journal of Medicine ont montré que le coronavirus SARS-CoV-2 (6) peut subsister entre 2 et 3 jours sur du plastique ou de l’acier inoxydable mais disparaît en moins de quatre heures sur le cuivre. Ces observations rejoignent les travaux du professeur Bill Keevil de l’université de Southampton qui depuis plusieurs années étudie la diminution drastique de colonies bactériennes sur le cuivre : Legionella, Escherichia coli par exemple, sont éliminées en quelques heures sur les surfaces, voire quelques minutes sur une poignée de porte en cuivre. Il semblerait d’après l’auteur que les ions Cu(I) et Cu(II) pénètrent dans la cellule des bactéries, y empêchent le transfert d’oxygène et cassent son ADN. Les vertus sanitaires du cuivre sont bien reconnues, ne serait-ce que par l’utilisation massive du cuivre dans nos habitations pour les canalisations et la distribution de l’eau sanitaire. En cette période, les fabricants innovent : une société américaine a sorti un masque en tissu imprégné de cuivre CuTEC antibactérien et le teste contre la Covid-19, une société chilienne a multiplié sa production par 25 en trois semaines avec un masque réutilisable contenant de fins fils de cuivre incrustés dans le tissu. Le Chili, qui est le premier producteur mondial de cuivre, espère profiter de ce marché nouveau. Dans les hôpitaux de ce pays le cuivre est largement utilisé pour les plans de travail, les ustensiles médicaux, les poignées de portes… Un industriel français Lebronze alloys (alloys signifiant alliages en anglais) précise ainsi que ses poignées de portes et ses mains courantes en alliage de cuivre sont aussi une barrière à l’infection, notamment dans les EHPAD.

La lutte contre la pandémie (7) est ainsi devenue métallurgique et variée, des autocollants en cuivre des universitaires américains aux masques à nanoparticules de cuivre (moins chers que l’argent) au Chili jusqu’aux équipements d’hôpitaux. On est loin des bassines en cuivre pour les confitures (8) qui nous paraissent d’un autre temps... Le temps d’avant ?

Jean-Claude Bernier et Catherine Vialle
Juin 2020

Pour en savoir plus
(1) L’or, élément chimique ou magique ?
(2) Nanomatériaux et nanotechnologie : quel nanomonde pour le futur ?
(3) Les métaux au fil de l’histoire (dossier pédagogique) (1266)
(4) Caractérisation des nanoparticules inorganiques dans les produits du quotidien : les méthodes d’analyse et les applications (2548)
(5) Comparaison de quelques alliages de cuivre et de zinc (956)
(6) Le coronavirus, un défi pour la chimie du vivant (2919)
(7) Covid-19 : la chimie médicinale à l’assaut des mécanismes de propagation virale (3032)
(8) Peut-on faire de bonnes confitures sans bassine en cuivre ? (1261)
 

Illustration : casque de cavalerie de Nimègue, masque de fer gainé de bronze et d'argent, seconde moitié du premier siècle, Museum het Valkhof, Nimègue (Pays-Bas)
Following Hadrian/ Flickr - Licence CC by-nc-sa 2.0

- Éditorial
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Pollution à Paris : une expérience grandeur nature

On a lu et entendu des arguments contradictoires sur l’influence du confinement imposé après le 15 mars sur la pollution à Paris. Une polémique avec sans doute quelques intentions électorales opposait les partisans d’une
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On a lu et entendu des arguments contradictoires sur l’influence du confinement imposé après le 15 mars sur la pollution à Paris. Une polémique avec sans doute quelques intentions électorales opposait les partisans d’une réduction drastique de la circulation automobile aux automobilistes convaincus que la pollution n’était pas seulement imputable à leurs engins. La réduction de la circulation automobile de plus de 80% en mars et avril était bien sûr une façon de vérifier les deux options et dire si la pollution à Paris avait vraiment diminué.

Notons en passant que le discours dominant repris par tous les media véhicule souvent des approximations. Il ne faut que se pencher sur les résultats d’un sondage Ipsos de 2018, qui posait la question : la pollution dans vos villes augmente-t-elle ou diminue-t-elle ? Les réponses étaient : elle augmente beaucoup pour 63%, un peu pour 25%, elle ne diminuait que pour 1% des sondés. En réalité depuis 20 ans grâce au sans plomb, à la désulfuration des carburants, aux pots catalytiques et au AdBlue, la chimie et les progrès en catalyse (1) ont réussi à faire diminuer nettement l’émission des polluants : -87% pour le CO, -80% pour C6H6, -44% pour NOx, -70% pour les particules fines, -80% pour SO2, et -100% pour le plomb (*).

Il était donc très intéressant de se faire une opinion basée sur des chiffres de mesures officielles d’Airparif et non sur des impressions vagues ou tendancieuses (2).

En effet l’île-de-France est particulièrement bien fournie en capteurs spécialisés par polluant et dispersés de façon très intelligente pour gommer tous aléas climatiques ou accidentels. C’est près de 110 stations qui traquent et mesurent SO2, CO, O3, NOx, PM2,5, PM10 24 heures par jour et 365 jours par an (3).

Airparif donne chaque jour l’indice Atmo et l’indice européen Citeair noté de 0 à 100 et il a été possible de consulter les graphiques mensuels (0 à 50 vert, 50 à 70 orange, plus de 70 rouge).

Pour février 2020 les indices sont tous verts avec une moyenne de 30 sauf 2 jours orange à 50. Jusqu’au 15 mars on est aussi dans une moyenne de 30 après le 15 apparaissent 6 jours consécutifs orange avec des indices supérieurs à 50-60 puis deux jours, le 27 orange et le 28 rouge avec un indice à 80. Pour le mois d’avril : 7 jours orange au-dessus de 50 jusqu’au 21 avril, ce qui est assez comparable à avril 2019 avec 14 jours orange au-dessus de 50.

On aurait vite fait pour certains de dire que les moyennes des indices de pollution pendant le confinement sont plus élevées qu’en période normale alors que le trafic automobile a diminué de plus de 80% et l’activité économique de plus de 30% et donc que la pollution a été plus importante durant le confinement à Paris. En réalité les choses sont bien plus complexes. Pour les 6 polluants mesurés l’indice Citeair est « l’indice du pire », il ne fait pas une moyenne pondérée des sous-indices. Si par exemple pour SO2, NOx, O3, PM10 les mesures donnent respectivement 50, 30, 70, 40 l’indice Citeair prendra le plus élevé (70) sans tenir compte des autres même s’il y a amélioration pour l’un.

On peut alors faire des moyennes en teneur réelles à partir des chiffres Airparif. De février jusqu’au 15 mars et du 16 mars au 20 avril sur le tableau suivant (**) :

 stationssans confinementavec confinementdifférence
trafic 831483%
PM102317,624,4+39%
PM 2,5137,914,7+87%
NOx405736-37%
O32256,667,5+19%
CO50,1240,006-71%
SO260,660,58-12%

 

On peut alors voir que la baisse de la circulation a fait nettement baisser la teneur en oxydes d’azote mais pas dans les mêmes proportions que la baisse de la circulation (40% comparée à 80%), ainsi que la teneur en oxyde de carbone et oxyde de soufre (4). On pourrait aussi y ajouter que les émissions de CO2 ont aussi baissées. Par contre, et c’est un peu paradoxal, on constate une augmentation des particules fines dont on sait qu’elles sont encore plus nocives que les oxydes d’azote ainsi que la teneur en ozone qui tendrait à dire que la qualité de l’air s’est détériorée au cours du confinement.

Plusieurs explications sont proposées par les spécialistes. Tout d’abord les particules notamment les PM2,5 les plus petites peuvent provenir de l’agriculture avec une saison printanière marquée en Île- de-France et aussi du chauffage au bois lors des soirées plus fraiches (5). Pour l’ozone on sait que les réactions entre les oxydes d’azote et les composés organiques volatils conduisent à sa production, on peut soupçonner les émissions volatiles des arbres et parcs reverdis et non taillés durant la période, plus importantes qu’en hiver (6).

La conclusion est que si le confinement et la baisse drastique de la circulation automobile a montré une diminution des oxydes d’azote et de carbone, elle n’a pas mis en évidence une remontée spectaculaire de la qualité de l’air dans Paris. D’autres sources de pollutions, le chauffage au fuel ou au bois, les vents apportant les poussières et aérosols de l’agriculture y contribuent. C’est donc, malgré les contraintes sanitaires de la distanciation, les recours aux transports en commun et pour les plus riches au véhicule électrique qui devraient être encouragés, en sachant cependant que cela ne résoudra pas l’équation complexe de la pollution des grandes villes.

Jean-Claude Bernier
Mai 2020

(*) Ch Gerondeau, L’air est pur à Paris… mais personne ne le sait ! (éd. L’artilleur, 2018)
(**) Rémi Prud’homme, Confinement : moins de voitures, plus de pollution

Pour en savoir plus
(1) Un exemple de matériau spécifique : pots catalytiques et dépollution automobile
(2) Démocratiser l’information environnementale pour mieux respirer en ville
(3) Les défis de la santé et du bien-être en ville : pollution atmosphérique, nuisance thermique, odeurs
(4) Comment assainir l’atmosphère des villes ? L’hydrotraitement
(5) Ah, un bon feu de bois dans la cheminée !
(6) Chimie atmosphérique et climat

Illustration : Avenue de la Grande Armée, Paris 26 mars 2020, Eric Salard/FlickR, Licence CC BY-SA 2.0

- Éditorial
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Oui la chimie avance masquée

Avec la crise sanitaire occasionnée par le Covid-19 et avec le déconfinement qui s’annonce, la France veut devenir auto-suffisante en masques sanitaires, chirurgicaux mais aussi FFP2 et FFP3 (1). Il existe déjà plusieurs
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Avec la crise sanitaire occasionnée par le Covid-19 et avec le déconfinement qui s’annonce, la France veut devenir auto-suffisante en masques sanitaires, chirurgicaux mais aussi FFP2 et FFP3 (1). Il existe déjà plusieurs producteurs français Kolmi-Hopen, près d’Angers, qui a reçu récemment la visite du président Macron, Paul Boyé Technologies en Haute-Garonne, Valmy dans la Loire, Macopharma à Mouvaux dans le Nord. Depuis le début de la crise et devant la demande en masques, ils ont accéléré leurs productions, ce qui a permis d’arriver progressivement à 10 millions par semaine fin avril, avec pour objectif 20 millions fin mai puis 40 millions en octobre. Devant la demande importante sur ce marché et avec l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) par le ministère de l’Économie, de nouveaux acteurs se lancent aussi dans cette fabrication.

Ce sont à nouveau la chimie, et notamment la chimie des matériaux, qui est alors sollicitée. En effet pour que la France soit indépendante elle doit assurer son approvisionnement en matières premières, en particulier celles qui permettent d’obtenir la composition des 3 couches du masque standard SMS (spunbond-meltblown-spunbond) de tissus non tissés. Or il n’existe qu’une seule unité de production de textile non tissé par extrusion-soufflage (meltblown), Fiberweb, une filiale d’une société américaine située dans le Haut-Rhin, qui annonce investir dans une nouvelle ligne pour tripler sa production, mais qui ne couvrira pas sans doute les besoins des producteurs de masque de l’hexagone.

Deux techniques de production des non-tissés (2) sont possibles :

  • l’extrusion-soufflage ou meltblown qui consiste à extruder rapidement un polymère fondu et à le souffler sous forme de fibres, un peu comme on couvre nos greniers de laine de verre en soufflant les fibres pour l’isolation thermique. On utilise des thermoplastiques comme le polypropylène (3) ou le polyester (4).
  • l’electrospinning ou électrofilage qui permet l’obtention de micro et même nanofibres par extrusion fine assistée par électrostatique, également à partir de polymères fondus ou en suspension dans un solvant.

Ces techniques sont matures et connues dans l’ingénierie des polymères, la seconde permet l’élaboration de membranes non tissées (5). La maîtrise de la structure des fibres, le contrôle de l’organisation des nanofibres dans la micro-structuration du matériau et la composition chimique à l’échelle de quelques dizaines de microns permettent aussi les applications pour la santé (6). On peut aussi jouer sur les mélanges de polymères hydrophobes ou hydrophiles ; polypropylène, polyimide, sur les électrostatiques ; polyester, acrylique. Selon les combinaisons et leurs tailles, les microfibres ou nanofibres piègent par liaisons de van der Waals ou par électrostatique les gouttes des aérosols et/ou les bactéries ou les virus (7).

Espérons que de nouveaux candidats plasturgistes se déclarent intéressés par ces nouvelles activités, le ministère de l’Économie est prêt à subventionner à hauteur de 30% les investissements encore faut-il assurer l’émergence d’un marché pérenne.

Jean-Claude Bernier et Catherine Vialle
Mai 2020
 

Illustration : Fibres polymères vues au microscope électronique à balayage (Daltster - travail personnel, CC BY-SA 3.0, Wikimedia)

Pour en savoir plus
(1) Comment fonctionnent les masques de protection respiratoire (sur le site de Pour la Science)
(2) Le textile, un matériau multifonctionnel
(3) Polypropylène (produit du jour de la SCF)
(4) Les chimistes dans l’aventure des nouveaux matériaux
(5) L’intelligence textile (vidéo)
(6) Chimie du et pour le vivant : objectif santé
(7) Electrospinning et nanofabrication pour la santé et l’énergie – ICPEES (CNRS - Université de Strasbourg)