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Plus vert que vert ; l’hydrogène blanc ou l’hydrogène naturel

Le dihydrogène H2 est un gaz très léger, insipide et incolore. Mais depuis quelques années en fonction de son origine on lui a collé presque toutes les couleurs de l’arc en ciel ! Noir ou gris s’il est préparé à partir du
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Le dihydrogène H2 est un gaz très léger, insipide et incolore. Mais depuis quelques années en fonction de son origine on lui a collé presque toutes les couleurs de l’arc en ciel ! Noir ou gris s’il est préparé à partir du charbon ou du méthane, vert ou jaune s'il est préparé par électrolyse de l’eau (1) avec une électricité issue des énergies renouvelables ou nucléaire, de gris il devient bleu si on récupère le CO2 lors de sa synthèse. Tout le code des couleurs y était passé jusqu’à ce que plus récemment on lui trouve la couleur blanche originelle ? oui… Puisqu’il s’agit de l’hydrogène natif issu tout seul de notre bonne vieille Terre comme des restes et souvenirs qui lui restent après les condensations des atomes à la suite du Big–Bang.

La première fois que j’ai entendu parler de l’hydrogène « naturel », c’est lors de discussions avec le professeur Armand Lattes lors de nos nombreuses rencontres à la SCF au milieu des années 2000. Il avait eu connaissance d’émanations d’hydrogène en Russie et en Ukraine et, par l’intermédiaire d’un de ses jeunes thésards à Toulouse Viacheslav Zgonnik, prit contact avec un géologue russe V. N. Larin qui était spécialiste du contexte géologique de ces émanations. À l’époque nous pensions (à tort) qu’il s’agissait de l’influence du réchauffement climatique sur le permafrost. Alerté par Armand Lattes l’IFPEN (i) ne dut qu’à la présence d’Hervé Toulhoat (2) de lancer un programme exploratoire qui a abouti à de très sérieuses connaissances scientifiques prolongé par un Groupement de Recherche (GDR) coopératif HydroGeMM sur l’hydrogène du sous-sol considéré au départ comme une joyeuse galéjade toulousaine !

20 ans après, avec l’engouement pour l’énergie décarbonée, les gisements géants d’hydrogène ne font pas que rêver les chercheurs du CNRS et de l ‘IFPEN mais aussi nombre d’entreprises minières dont 40 compagnies multiplient les explorations et forages de par le monde en 2024.

Comment se forme cet hydrogène « natif »

Au moins trois processus ont été identifiés :

  • a) dans les fosses océaniques profondes aux endroits où deux plaques continentales se chevauchent des émanations volcaniques ont été vues : des « fumées noires » avec des émanations de sulfures métalliques, de sulfates et d’hydrogène dans un fluide à 300° C , acide à pH 3 et constituant un milieu extrême prébiotique ou des archaebactéries transforment ces sources de soufre, d’oxygène et d’hydrogène en ATP (ii) source énergétique de la vie (3). Sont également vues des émanations de fumées blanches à températures plus basses 60° à 70°C et des excrétions de carbonate de calcium CaCO3, de magnésite principalement constituée de carbonate de magnésium et de silicates (4).
    On parle alors en ces domaines de serpentinisation avec des réactions suivantes :
    3 Fe2SiO4 + 2 H2O = 2 Fe3O4 + 3 SiO2 + 2 H2
    2 Fe3Si2O5(OH)4 + 6 Mg(OH)2 = 2 Mg3Si2O5 (OH)4 + 2 Fe3O4 + 6 H2
    (Chrysolite ferreuse) (iii) + Brucite (Mg(OH)2) = Serpentine (iv) + Magnétite (Fe3O4) + dihydrogène
     
  • b) La radioactivité naturelle dans certaines croûtes terrestre peut, par radiolyse, décomposer l’eau
  • c) l’oxydo-réduction dans des zones cratoniques
    Au début de l’Archéen, période de l’histoire de la Terre comprise entre 4 et 3 milliards d’années, l’océan était dépourvu d’oxygène et contenait du fer ferreux (Fe2+) en solution. Avec l’oxygénation des océans, ce fer ferreux s’est oxydé en fer ferrique (Fe3+) et il s’est déposé sous la forme de couches d’oxydes de fer tels que la magnétite (Fe3O4) et l’hématite (Fe2O3), alternant avec des dépôts d’argiles et de carbonates. Ces dépôts successifs, qui s’expliquent par une sédimentation sous une épaisseur d'eau variable avec une concentration plus ou moins importante d’oxygène, se sont formés au cours du temps, entraînant ainsi la formation d’importants gisements de minerais de fer (5)

    Les couches situées à moindre profondeur ont été oxydées par les pluies et les eaux de surfaces contenant de l’oxygène. Par contre celles situées à plus grande profondeur, plusieurs centaines de mètres, baignées par de l’eau anoxique d’un aquifère profond peuvent engendrer un flux d’hydrogène suivant la réaction :
    2 Fe3O4 + H2O = 3 Fe2O3 + H2

Une exploitation industrielle ?

Les flux d’hydrogène issus des rides médio océaniques et volcans sous-marins à très grande profondeur sont difficilement exploitables. Ces rides dues au mouvement des plaques continentales peuvent aussi s’observer à terre dans certaines régions dans l’Afar (en Éthiopie) ou en Islande par exemple. Des recherches sur la possibilité d’exploitation de l’hydrogène à côté de l’usage des calories en géothermie mériteraient d’être conduites. Par contre le mécanisme d’oxydoréduction par la magnétite ouvre un horizon immense car ces nombreuses zones cratoniques, aires sédimentaires anciennes datant de 2 à 3 milliards d’années, sont nombreuses dans le monde et incitent les compagnies minières exploitant le minerai de fer à aller voir plus en profondeur si des flux d’hydrogène sont décelables.

Le journal du CNRS de décembre 2023 citait la découverte de dihydrogène par le laboratoire de GéoRessources de Nancy lors de forages au-dessous de couches de charbon exploitées dans d’anciennes mines de Lorraine. D’abord menés afin de trouver du méthane, mais surprise, plus on descendait en profondeur plus la teneur en hydrogène dans le méthane augmentait pour atteindre 15% à 1100 m. Des travaux menés avec l’IFPEN et les géologues amènent à penser que par extrapolation la teneur pourrait dépasser 90% à -3000m !

D’où l’enthousiasme des chercheurs qui pensent avoir trouvé en Lorraine un gisement de plus de 40 millions de tonnes d’hydrogène naturel. De la découverte à l’exploitation il y a encore un long chemin. Une seule compagnie au monde, Hydroma au Mali, exploite depuis 4 ans, un puits qui produit de l’hydrogène pur à 96%, à la pression de 4 bars et utilisé pour alimenter une turbine à gaz qui produit de l’électricité localement. Par vision aérienne on a identifié des zones de dépression circulaires de rayon de quelques centaines de mètres où rien ne pousse ; en Russie, en Ukraine, aux Etats unis, au Brésil les géologues les appellent « les ronds de sorcière », de l’hydrogène s’en échappe de façon non constante et non continue mais non négligeable : ces zones sont dans des aires cratoniques.

Une nouvelle source d’énergie décarbonée ?

De nombreuses compagnies minières ou leaders dans l’énergie s’intéressent à ce nouveau paradigme non prévu dans la planification énergétique. C’est que le prix de l’hydrogène gris est en moyenne inférieur à 2$/kg, le vert proche de 6$/kg alors que le blanc revient à 1$/kg.

La compagnie NH2E (v) aux États-Unis a foré un premier puits au Kansas. En France la société 45-8 Energy a obtenu en décembre 2023 l’autorisation de recherche dans les Pyrénées, TBH2 en Aquitaine et plus de 40 compagnies se lancent dans de telles recherches. Car selon un modèle de l’institut d’études géologiques des États-Unis (USGS) de 2022, la captation efficace des réserves mondiales pourrait satisfaire la demande énergétique globale pendant plus de 1000 ans (6).

Revenons sur terre cependant : rien ne garantit que l’hydrogène natif tienne ses promesses, la captation, son stockage, sa distribution poseront les mêmes problèmes que l’hydrogène gris ou vert. Sa compression ou sa liquéfaction consomment plus de la moitié de son potentiel énergétique. Mais les optimistes font remarquer que si on s’était arrêté à la fin du XIXe siècle aux faibles manifestations de présence du pétrole en surface on n’aurait jamais exploité les immenses réserves de l’or noir.

En sera–t-il de même pour l’or blanc ?

Jean-Claude Bernier
Avril 2024

 

(i) IFP Energies nouvelles
(ii) Adénosine triphosphate
(iii) La chrysolite ferreuse est le silicate de magnésium et de fer II (Mg, Fe) 2 SiO4;
(iv) La serpentine est une famille de minéraux du groupe des silicates. Formule chimique : (Mg,Fe,Ni)3 Si2O5(OH)4
(v) Natural Hydrogen energy https://www.nh2e.com/
 


Pour en savoir plus
(1) Qu’est-ce que l’hydrogène vert ?, F. Brénon, Question du mois, Mediachimie.org
(2) IFPEN et l’hydrogène naturel, H Toulhouat, L’Actualité Chimique N° 483 (avril 2023) p. 11-12
(3) Les origines de la vie, du minéral aux biomolécules, d'après la conférence de T. Georgelin, Colloque Chimie, aéronautique et espace, novembre 2017, Fondation de la Maison de la Chimie
(4) Hydrates de gaz et hydrogène : ressources de la mer du futur, J.L. Charlou,  La chimie et la mer (EDP Sciences, 2009) isbn : 978-2-7598-0426-9, p. 99
(5) Action de l’eau sur le fer, G. Chaudron, C. R. Acad. Sci., 159 (1914) pp. 237-239, gallica.bnf.fr
(6) Le dihydrogène est-il une solution d’avenir pour lutter contre le réchauffement climatique ?, É. Bausson, F. Brénon et G. Roussel, Dossier pédagogique Nathan / Mediachimie (Mediachimie.org)

 

Crédit illustration : source image rcphotostock /pexels

- Question du mois
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Un stade plus écologique est-il possible ?

Rencontres régionales, nationales, européennes, coupes du monde et bientôt les Jeux olympiques à Paris, que d’occasions pour se retrouver dans les stades. Mais un stade est source de pollution comme tout lieu public
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Rencontres régionales, nationales, européennes, coupes du monde et bientôt les Jeux olympiques à Paris, que d’occasions pour se retrouver dans les stades. Mais un stade est source de pollution comme tout lieu public accueillant un grand nombre de personnes. De plus en plus d’installations sportives relèvent avec succès le défi climatique en intégrant de nouveaux dispositifs très prometteurs. Découvrons quelques solutions pour rendre un stade plus écologique.

Un constat : les chiffres sont impressionnants (1) (2)

L’arrosage des pelouses consomme énormément d’eau : cela représente près de 100 millions de m3 chaque année en France. La consommation électrique est de 100 000 kWh pour l'éclairage d’un stade pendant un match.

L’émission de dioxyde de carbone CO2 est considérable et concerne aussi bien celui généré pour fabriquer le béton utilisé pour la construction et les rénovations que celui émis pour les transports des supporters lors de chaque rencontre. Par exemple, « En prenant en compte les infrastructures, l’Euro 2016 en France, a de son côté engendré l’émission de 2,8 millions de tonnes de CO2e (i), avec 80% des émissions liées aux stades et un peu moins de 20% liées aux spectateurs. » (2)

Des solutions existent en repensant la nature des pelouses, les matériaux de construction, les transports, la gestion du stade, la limitation des déchets et même en faisant des médailles recyclées ! Nous citerons ici deux exemples où la chimie peut participer à cette amélioration.

Les pelouses hybrides

Il existe plusieurs natures de sols sportifs :

  • les sols classiques composés de terre et de sable, qui concernent surtout les clubs amateurs,
  • les pelouses naturelles,
  • les pelouses artificielles à base de matériaux plastiques,
  • les sols hybrides qui concernent depuis 15 ans tous les terrains pour les compétitions de haut niveau.

Apparu en 1990 le gazon hybride est constitué de plusieurs matériaux : du gazon naturel, des fibres de gazon synthétique et un substrat.

Ce gazon hybride, développé par la technologie AirFibr est donc constitué d'un gazon naturel, enraciné dans un substrat de synthèse breveté composé de granulés de liège, de microfibres synthétiques (1 % de la masse de gazon) et de sable fin. Le sable est le composant majoritaire du substrat.

Les microfibres synthétiques renforcent l'enracinement du gazon. Ces microfibres sont généralement faites de polyéthylène (PE), de polypropylène (PP) ou de polyamide (PA) partiellement renforcé de fibres de verre. Elles se présentent sous forme de mono-filaments ou elles sont « fibrillisées » afin de simuler les brins de gazon naturel et de mieux stabiliser les granulats de remplissage. L’insertion des fibres est maintenue en place par une deuxième base qui est faite de latex ou de polyuréthane. Les granulés de liège absorbent les chocs et réduisent les risques de blessure des joueurs (3).

Un terrain hybride améliore la vitesse de jeu, la transmission du ballon, la souplesse de la pelouse et rend le terrain praticable par tous les temps. Le drainage est immédiat, l’eau est absorbée très rapidement et l’évaporation est retardée. Ainsi, le terrain n’est jamais inondé, comme cela peut être le cas avec de la pelouse naturelle.

Ces pelouses peuvent aussi bien être engazonnées par semis que par rouleaux de placage. La surface de jeu homogène reste plane et stable, quelles que soient les conditions climatiques.

L'avantage de cette dernière technique offre aux stades une flexibilité dans la gestion du terrain. En effet, en moins d'une semaine, la pelouse est changée et jouable. Grâce à ce délai court entre le placage et l'accueil d’un match, il est désormais possible de multiplier le taux d'utilisation des stades, notamment en mutualisant le terrain (football et rugby), en accueillant des événements socio-culturels (concerts, festivals) tout au long de l’année. Ceci permet donc de diminuer le nombre de bâtiments avec en conséquence des économies multiples.

Remarque concernant les pelouses artificielles
L’utilisation de billes de pneu recyclés en tant que substrat pour un terrain synthétique, qui permet une utilisation plus intensive comparée à la pelouse et de réaliser une substantielle économie d’eau et d’entretien, est soumise depuis 2018 à une réglementation européenne (4) imposant une très faible teneur en HAP (Hydrocarbures aromatiques polycycliques). La Commission européenne a décidé en 2023 de les interdire à partir de 2031. Reste encore à trouver les solutions de remplacement (5).

Et des médailles à partir de téléphones portables recyclés !

Les médailles de la Coupe du monde de rugby disputée en France en 2023, en or, argent et bronze (alliage majoritairement composé de cuivre et d’étain) ont été fabriquées à partir de téléphones portables recyclés. Ce procédé a déjà été utilisé aux JO de Tokyo en 2021.

Pour cela 206 000 appareils ont été récoltés dans les clubs de rugby et 1491 médailles ont été frappées à la Monnaie de Paris. Le recyclage a été fait dans l’entreprise WeeeCycling [6], située en Normandie, affineur ne travaillant qu’à partir de déchets sans utiliser de minerai d’extraction. Des traitements chimiques et thermiques des déchets électriques et électroniques permettent d’en extraire des métaux précieux et stratégiques à très haut niveau de pureté, moyennant des émissions de CO2 « jusqu’à 2000 fois plus faibles que celles des procédés miniers ».

Après broyage et séparation mécanique, les déchets passent dans des fours permettant de former un alliage séparé des impuretés et des métaux communs, grâce à des réactions d’oxydo-réduction par voie thermique. Les métaux communs sont valorisés par ailleurs. Ces processus n’utilisent que des déchets et leurs pouvoirs calorifiques sont utilisés de manière optimisée avec une faible consommation énergétique (1500 à 2000 fois plus faibles que les procédés miniers traditionnels). La purification de chaque métal est obtenue par différentes phases de séparation et d’affinage chimique et électrochimique.
Ainsi, pour un téléphone de masse égale à 100 g, on obtient 25 mg d’or, 0,34 g d’argent, 8 g de cuivre et environ 1 g d’étain (6) (7a) (7b).

Quelques exemples de réalisations et de projets

Le stade de football de Rodez (8) est équipé d’une pelouse hybride. Un système composé d’arroseurs disposés de manière régulière sur l’ensemble du terrain permet une répartition optimale de l’eau et un arrosage rapide juste avant le match ou pendant la mi-temps, pour humidifier le terrain.

Le système d’arrosage est relié à un système de gestion centralisée lui-même relié à une station météo. Des sondes d’humidité fournissent des informations complémentaires au système sur l’air, l’humidité, les précipitations et le sol, permettant de réajuster la programmation de l’arrosage et d’apporter à la plante la juste quantité d’eau dont elle a besoin. Le terrain a été livré en octobre 2019. M. Rouquié, directeur des sports de la ville de Rodez précise qu’ « avec ce terrain hybride, les apports en eau sont plus fréquents mais moins importants et que la consommation en eau est passée de 5000 m3 à 3000 m3 ».

Un stade de football à Saint-Pol-sur-Mer, dans le Nord, vient d'être équipé d’une pelouse Mixto® de type hybride très drainante par l’entreprise idverde, pour un coût intermédiaire entre celui d’un revêtement conventionnel totalement en herbe et celui d’une pelouse hybride classique (9).

À Lyon, au Groupama Stadium, 50 000 m2 de panneaux solaires ont été installés dans son complexe d’activités pour couvrir une partie des besoins en électricité de l’enceinte (10).

En 4ème division anglaise, le club de Forest Green Rovers promet, d’après le journal La Croix du 15 novembre 2022, de « construire le stade le plus écologique du monde » (prévu pour 2025 avec 5000 places). Il sera entièrement composé de bois, le stade sera alimenté par des sources d’énergie renouvelable (panneaux solaires) et les pelouses seront hybrides sans pesticide. À suivre donc !

Enfin, pour l’ensemble des stades, les pelouses conventionnelles étant très régulièrement et longuement arrosées avant les matchs, on pourrait réutiliser l’eau de pluie.

Odile Garreau et l’équipe question du mois

 

(i) La notation CO2e est relative aux équivalents dioxyde de carbone qui sont une mesure de l'effet des différents gaz à effet de serre (GES) sur le climat. https://www.connaissancedesenergies.org/questions-et-reponses-energies/gaz-effet-de-serre-quest-ce-que-l-equivalent-co2
(ii) chiffres donnés avant l’installation de la station météo
 

 

Sources et Pour en savoir plus
(1) Euro 2016 : l’empreinte écologique démesurée du football en question, C. Fournier, Media youmatter.world
(2) Foot et climat : le bilan carbone du ballon rond, entreprise SAMI Plateforme climat Consultant carbone
(3) Pelouse hybride augmentée AirFibr, société Natural Grass, travail de recherche et développement réalisé en partenariat avec l'Institut de Biomécanique Humaine des Arts et Métiers ParisTech.
(4) Restriction guideline: Annex XVII entry 50, paragraphs 5 and 6 on PAHs: articles within or excluded from the scope, ECHA europa.eu
(5) Enquête Interdiction du pneu sur les terrains synthétiques : les Villes vont payer plus cher, actu.fr
(6) Les spécialités de traitement des déchets de la société WeeeCycling et Processus de transformation de la société WeeeCycling
(7a) Pourquoi ne faut-il pas jeter son smartphone hors d’usage ? F. Brénon, Question du mois, Mediachimie.org
(7b) Projet THYMO | Recyclage des métaux contenus dans les cartes électroniques des téléphones portables GeoRessources, TJFU, Institut Carnot ICEEL, CNRS Centre Est
(8) Stade de football de Rodez : Irrigation spécifiques des terrains hybrides,F. Martin, article de Irrigazette, The leading International Irrigation magazine
(9) idverde invente une pelouse sportive hybride très résistante, Stanislas du Guerny, article de Les Echos 25/10/2016
(10) L’équivalent de 7 terrains de foot ! OL Vallée en passe d’accueillir 50 000 m2 de panneaux photovoltaïques, Lyon Entreprises.com
 

Crédit illustration : image par Pexels /  Pixabay

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Expériences : vidéos et protocoles

Mediachimie.org vous propose un ensemble de ressources liées à l’enseignement des sciences expérimentales. Parcourez cette page listant des vidéos de présentations d’expériences, de techniques d’analyse ou de techniques
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Mediachimie.org vous propose un ensemble de ressources liées à l’enseignement des sciences expérimentales. Parcourez cette page listant des vidéos de présentations d’expériences, de techniques d’analyse ou de techniques expérimentales. Découvrez des protocoles testés et validés d’expériences de fluorescence et de chimiluminescence.

 

Vous trouverez également des ressources à explorer dans nos différentes séries :

Enfin si l’utilisation des microcontrôleurs en physique-chimie dans le cadre des nouveaux programmes de physique-chimie du lycée vous intéresse, vous pouvez également regarder des ressources proposées par L’Actualité chimique :

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Pourquoi les champions de marathon sont-ils presque tous des Africains vivant en altitude ?

L'athlète kényan Kelvin Kiptum, qui avait battu le record du monde du marathon en 2 h 00 min 35 s lors du marathon de Chicago le 8 octobre dernier, soit 34 secondes de mieux que le précédent record établi par le double
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L'athlète kényan Kelvin Kiptum, qui avait battu le record du monde du marathon en 2 h 00 min 35 s lors du marathon de Chicago le 8 octobre dernier, soit 34 secondes de mieux que le précédent record établi par le double champion olympique kényan Eliud Kipchoge lors du marathon de Berlin en 2022, est décédé dans un accident de la circulation ce 11 février 2024. Quand on pense que de 2000 à 2020, sauf en 2004 où c’était un Italien, ce sont des Kényans, Éthiopiens et Ougandais qui ont été médaillés d'or, et que de 1956 (1) à 2000 on a eu pour chaque olympiade des Africains sur le podium du marathon, on peut croire qu'il ne s'agit pas d'une coïncidence. Alors, quelle est l’explication ?

Explications plausibles

Il y a probablement une part d'explication que les outils des sciences sociales permettent de comprendre : les Africains ne participent aux jeux que relativement récemment. Les meilleurs sportifs préfèrent l'athlétisme sur piste et le marathon a mis plus de temps à être pratiqué que les autres distances. On ne trouve pas de marathoniens ivoiriens, togolais ou namibiens, mais essentiellement des Éthiopiens ou des Kényans. Pourquoi ?

Il y a une raison physiologique : ces pays ont des altitudes moyennes d'environ 1300 m et comportent de hauts plateaux (Vallée du Rift). Les populations vivent donc le plus souvent en altitude. Or en altitude, par suite de la baisse de la quantité d'oxygène, il y a augmentation de la fréquence cardiaque. Au bout d'un certain temps, l'organisme augmente sa production d'érythropoiétine, l'hormone qui dirige la synthèse des globules rouges. Ces globules devenant plus nombreux, il y a un meilleur transport d'oxygène et la fréquence cardiaque peut diminuer, ainsi que l'essoufflement. Et ces effets durent plusieurs semaines. C'est aussi pourquoi les athlètes vont s'entraîner en altitude (le Centre national d'entraînement en altitude de Font-Romeu est à 1850 m).

Vivant en altitude, Kényans ou Éthiopiens ont des modes de vie proches : les enfants vont à l'école à pied, souvent en courant, car c'est loin. Le parcours est accidenté et ils ne portent pas de chaussures de sport ; ils sont souvent pieds nus (cela leur donne un meilleur style de course les forçant à atterrir sur la pointe du pied). Cela leur procure un "entraînement" constant en altitude. Enfin les modes de vie restent rigoureux, et ils font tout à pied. On lira avec profit le travail de fin d'études de Nicolas Tilman (2). La nourriture est moins riche, et ils sont minces (Eliud Kipchoge, médaille d'or en 2020 mesure 1,67 m et pèse 52 kg), avec " de petits mollets ". C'est très important d'après le physiologiste Bengt Saltin (3) (4) car avec en moyenne 400 g de moins pour chaque jambe, il leur faut environ 8% de moins d'énergie pour la soulever. Ils utilisent aussi plus d'oxygène dans chaque inspiration, car leurs nombreux trajets à pied en courant ont augmenté leur capacité VO2(i). Selon Véronique Billat (5), directrice du laboratoire d'étude de la physiologie de l'exercice de l'INSERM, les Kényans courent par à-coups à l'entraînement, placent des accélérations, ralentissent, repartent et cela sur des terrains accidentés ; ils développent ainsi des fibres musculaires intermédiaires, entre lentes et rapides.

Fonctionnement de l'hémoglobine

L'organisme humain n'a que peu de réserve en oxygène. Il lui faut donc constamment en absorber. C'est le rôle de la respiration. Le transport de cet oxygène des poumons vers les organes qui en ont besoin se fait grâce à l'hémoglobine des globules rouges. Les muscles vont stocker cet oxygène grâce à une protéine, la myoglobine.

La myoglobine (figure 1) est une protéine contenant un hème (figure 2), où peut s'insérer un ion Fer(II), Fe2+. C'est lui qui fixe l'oxygène, donnant l'oxy-myoglobine.

L'hémoglobine (figure 3) est un tétramère, dont chaque sous-unité est proche de la myoglobine. Elle contient donc 4 ions Fe(II), Fe2+, et peut fixer jusqu'à 4 molécules de dioxygène(ii). Mais si on regarde les courbes de fixation du dioxygène sur ces deux protéines (figure 4), on voit une différence : la myoglobine le fixe rapidement et est vite saturée (à une pression partielle d'environ 25 mmHg). L’hémoglobine a une fixation sigmoïdale : elle fixe peu de dioxygène à faible pression partielle, puis de plus en plus ensuite à mesure que la pression est élevée. Cette différence vient de l'interaction entre les sous-unités de l'hémoglobine : la fixation du dioxygène modifie la structure de la protéine, la rendant plus apte à en fixer. On dit qu'il y a coopérativité entre les sous-unités. Ce phénomène se dénomme allostérie, phénomène découvert à l'Institut Pasteur par François Jacob et Jacques Monod (Prix Nobel 1965).


Figure 1. Myoglobine. Source : Wikimedia Commons. Domaine public.


Figure 2. Hème. Il s'agit d'une porphyrine, molécule formée de 4 cycles pyrroliques. Un Fe2+ se trouve au centre. On trouve des tétrapyrroles dans d'autres molécules biologiques, comme la chlorophylle, où c'est un Mg2+ qui est au centre. Source : Wikimedia Commons. Domaine public.


Figure 3. Hémoglobine. Il y a 4 sous-unités, semblables à la myoglobine.On voit les 4 porphyrines. Source : Wikimedia Commons. Domaine public.


Fig. 4 Fixation de l'oxygène par la myoglobine et l'hémoglobine. © Encylopaedia Universalis sous licence CC BY-NC

 

Les conséquences sont que :

  • au niveau des poumons où la pression en oxygène est forte, l'hémoglobine le fixera aisément, à 100% (plateau). Elle est alors de couleur rouge vif (sang artériel)
  • au niveau des organes, la pression est faible, donc l’affinité diminue, et la protéine accepte de donner son oxygène, là encore de manière allostérique : le départ de chaque oxygène rend le départ du suivant plus facile. Elle devient alors rouge foncé, proche du bleu (sang veineux). On n’a pas cette régulation pour la myoglobine, pour laquelle l’affinité est toujours forte, supérieure à celle de l'hémoglobine : elle ne perd donc pas son oxygène, même à faible pression partielle et est donc capable de le stocker dans les muscles.

Pour en revenir à nos athlètes, on comprend pourquoi l'entraînement en altitude, en augmentant la quantité de globules rouges, donc d'hémoglobine, donc la capacité à fixer et transporter l'oxygène permet à leurs muscles de mieux résister à la fatigue. Si on associe l'altitude à un mode de vie conduisant à un entraînement (involontaire) dès l'enfance, on comprend mieux les performances des athlètes d'Afrique de l'Est, sans avoir besoin de rechercher d'éventuelles caractéristiques génétiques.

Nicole Moreau

 

 

(i) La consommation maximale d'oxygène ou VO2 max est le volume maximal de dioxygène qu'un sujet humain peut consommer par unité de temps lors d'un exercice dynamique aérobie maximal. Rapportée à l'unité de masse corporelle, elle s'exprime en ml/min/kg. Cette valeur est un excellent indicateur de la performance potentielle du sujet dans les épreuves d'endurance : plus elle est élevée, meilleure sera la performance éventuellement réalisée.

(ii) L'hémoglobine fixe aussi le CO2, et participe à son élimination de l'organisme. A noter aussi l'affinité de l'hémoglobine pour le monoxyde de carbone, CO et l'ion cyanure CN-, d'où la toxicité de ces éléments.

 

Pour en savoir plus

(1) En 1956, Abebe Bikila, médaille d'or, Éthiopien, avait couru pieds nus ! Il réitérera son exploit en 1960, mais avec des chaussures.
(2) Cité par Véronique Billat La course à pied. Une histoire de Noirs. Origines d’une telle suprématie de Nicolas Tilman
(3) Bengt Saltin (1935–2014), Bangsbo J, Kjær M, Hellsten Y., J Physiol. 2014 Dec 1;592(23):5149-51. doi: 10.1113/jphysiol.2014.285411
(4) Mollets noirs et blancs mollets, Revue Jeune Afrique (2004)
(5) Fiche Wikipedia relative à Véronique Billat
 

Illustration : Marathon de Francfort (2017), JeLuF, travail personnel, CC BY-SA 4.0, Lien

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Des textiles d'athlètes pour les volontaires des JOP Paris 2024

À J -125, la tenue des 45 000 volontaires des Jeux Olympiques et Paralympiques élaborée par Décathlon a été dévoilée. Ces tenues, puisque plusieurs pièces (chaussures, chaussette, pantalon double fonction, tee-shirts,
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À J -125, la tenue des 45 000 volontaires des Jeux Olympiques et Paralympiques élaborée par Décathlon a été dévoilée. Ces tenues, puisque plusieurs pièces (chaussures, chaussette, pantalon double fonction, tee-shirts, chapeau, banane, marinière transformable, chapeau, sac) constituent ce bagage vestimentaire, ont été testées par les athlètes et élaborées par le fabricant en répondant aux critères suivants : déperlance, élasticité, résistance, ergonomie.

Cet uniforme des volontaires fortement identifiable allie fonctionnalité et confort. Il est annoncé comme éco-conçu, moderne et modulable. Dans une volonté d’éco-conception et d’éco-responsabilité, l’ensemble de cette panoplie, unisexe, a été réalisée avec une part importante de Made in France.

La chimie, une fois de plus, a œuvré pour proposer des textiles adaptés aux volontaires. Si dans ce cas la quête de performances sportives n’est pas de mise, il n’empêche que les textiles proposés répondent en tous points à ceux des sportifs de haut niveau et donc aux contraintes de température extérieure, de température du corps et aux critères fixés ci-dessus par le COJO.

Pour en savoir plus sur le sujet consultez nos articles :

Alors ouvrons grands les jeux !

Jean Gomez

 

Crédit illustration : © Paris 2024 x Decathlon
 

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Combinaisons en néoprène® calcaire ou en néoprène® aux coquilles d’huîtres : renouvelables ou non ?

Vous pratiquez la plongée sous-marine, le surf ou autres sports nautiques et vous utilisez des combinaisons isothermes en « néoprène® ». Au moment d’acheter votre combinaison vous vous posez la question : laquelle choisir
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Vous pratiquez la plongée sous-marine, le surf ou autres sports nautiques et vous utilisez des combinaisons isothermes en « néoprène® ». Au moment d’acheter votre combinaison vous vous posez la question : laquelle choisir qui soit à la fois performante et respectueuse de l’environnement ? Une recherche sur Internet avec le mot-clef « néoprène » vous propose des alternatives écologiques à leur fabrication.

Voici quelques propositions trouvées et reprises de très nombreuses fois sur Internet par les services commerciaux de vendeurs de combinaisons.

Alors décryptons tous ces mots et posons-nous la question : comment peut-on fabriquer une combinaison en néoprène® à partir de pétrole ou à partir de calcaire et celle-ci est-elle une alternative écologique ?

Tout d’abord qu’est-ce que le néoprène® ? [1] [2]

C’est un nom commercial (iv) devenu un nom courant pour désigner le caoutchouc de polychloroprène (noté souvent par le sigle CR pour Chloroprène Rubber). Il n’existe pas dans la nature (v), c’est donc un produit de synthèse.

Il faut disposer d’une molécule monomère, le chloroprène (vi), qui pourra réagir sur elle-même un très grand nombre de fois pour former de très longues chaines moléculaires où les atomes de carbone s’enchainent, pour conduire au polymère, le polychloroprène (cf. figure1).

chloroprène
polychloroprène
(n peut être de plusieurs milliers)
H2C=CH-CCl=CH2
-(CH2-CCl=CH-CH2)n-

Figure 1

 

Il faut donc tout d’abord créer le chloroprène.

Il existe 2 voies de synthèse : soit à partir du pétrole (de très loin la plus répandue depuis 1960) soit à partir d’un mélange de calcaire et de charbon [1] [2] [3] [4].

La première voie passe par l’obtention de butadiène molécule obtenue en très grande quantité (vii) au cours du vapocraquage des essences légères issues du pétrole (viii)(ix).

La deuxième voie passe par l’obtention d’acétylène à partir de calcaire ou limestone (x) et de charbon. Le calcaire est du carbonate de calcium CaCO3 et le charbon est la source de carbone C. 


Tableau comparatif des 2 voies par Françoise Brénon

 

Les atomes de carbone surlignés en jaune (C) proviennent du carbonate de calcium, ceux surlignés en turquoise (C) proviennent du charbon et ceux surlignés en rose (C) proviennent du pétrole. Mais bien sûr, la molécule de chloroprène qu’elle soit dérivée du pétrole ou du calcaire est chimiquement unique. Les atomes de carbone n’ont pas de mémoire !

Et observons que le carbone contenu initialement dans le calcaire se trouve dans CO2 formé (réaction 1).

Alors cette deuxième voie est-elle plus respectueuse de l’environnement ?

Certes elle n’utilise pas de pétrole, ressource non-renouvelable. Mais les mines de calcaire non plus ne sont pas renouvelables et surtout les atomes de carbone provenant du carbonate de calcium se trouvent dans  CO2 dégagé ! Au total, pour cette voie, le dioxyde de carbone formé provient pour moitié du carbonate, CO2, cf. réaction (1) et pour l’autre moitié du charbon CO2, cf. réactions (3 et 3’).

Enfin ce procédé très énergivore soulève la question de l’énergie électrique utilisée : est-elle verte et renouvelable, ou non ?

Peut-on dire que « le néoprène calcaire se compose à 99.7% de carbonate de calcium ? »

Cette phrase qui apparait dans de nombreuses communications commerciales n’a pas de sens : elle laisserait à penser que la combinaison est essentiellement constituée de calcaire pratiquement pur ce qui est absurde ou que les atomes de carbone du polychloroprène sont ceux issus du carbonate CaCO3, ce qui est faux.

En effet, pour que le carbonate de calcium soit considéré comme la matière première durable de la fabrication du néoprène, il aurait fallu que l’atome de carbone contenu dans CaCO3 soit la source des atomes de carbone qui constituent la chaine polymérique du néoprène. Or il n’en est rien : le carbone présent dans la chaine du néoprène -(CH2-CCl=CH-CH2)n- provient exclusivement du charbon. On devrait plutôt l’appeler le néoprène charbon !

Remplacer le calcaire des mines par des coquilles d’huîtres : quelle conséquence ? Cela rend effectivement le carbonate de calcium renouvelable, mais cela s’accompagne toujours du même dégagement de CO2 et ne change pas la source des atomes de carbone du chloroprène.

Quant à l’obtention de carbone, nécessaire à la réaction (2) issue de coke, elle est très polluante. Celle à partir de charbon de bois l’est moins et est biosourcée, mais peut être source de déforestation.

Le néoprène limestone est-il biologique ?

Le terme biologique signifie « Qui a rapport à la vie, aux organismes vivants ». Alors, affirmer que le néoprène calcaire ou limestone issu de mines est un néoprène biologique traduit ici une utilisation inappropriée voire trompeuse du terme biologique !

C’est la double utilisation de la coquille d’huître et de carbone biosourcé, ce qui n’est pas cité dans les articles, qui permettrait de donner à cette fabrication un caractère renouvelable (tout en restant très énergivore et en libérant du CO2).

Comment passe-t-on aux mousses néoprène ?

C’est en réalité ces étapes qui vont différencier les qualités des mousses dont sont faites les combinaisons.

Tout d’abord le chloroprène est polymérisé en polychloroprène (xi). Il existe plusieurs grades et viscosités de polychloroprènes. Il est à noter que le chloroprène est fabriqué seulement pour la synthèse du polychloroprène et qu’il existe peu de producteurs dans le monde (xii).

Les fabricants de mousse achètent le polychloroprène aux producteurs précédents. Pour réaliser la mousse, ce polymère est mélangé avec une huile qui sert de liant, des charges renforçantes comme le noir de carbone (xiii), des réactifs pour mener à bien la vulcanisation (xiv), c’est-à-dire créer des ponts entre les différentes chaines de polychloroprène, et divers additifs (xv) dont un générant des bulles de gaz in situ, pour conduire à des mousses alvéolées vendues sous formes de feuilles de différentes épaisseurs.

Le noir de carbone peut provenir de pneus recyclés qui vont subir d’abord une pyrolyse (xvi) [5].

Les procédés mis en jeu peuvent fortement varier d’un fabricant (xvii) à l’autre et vont conduire à des mousses néoprène de différentes qualités.

Et la combinaison ?

Le fabricant de combinaisons achète et sélectionne la qualité et l’épaisseur des feuilles de mousse de néoprène et les associe à des tissus extensibles (xviii) en plusieurs couches contre collées. Les étapes finales sont du ressort de la confection. La qualité des coutures, assemblage cousu-collé est importante pour l’étanchéité.

Alors quelle alternative au pétrole ou au charbon pour une combinaison néoprène ?

Utiliser par exemple des déchets ou résidus agricoles constituant une biomasse pour obtenir un butadiène biosourcé [6].

Les sociétés Michelin, IFPEN et Axens sont très impliquées dans cette approche à partir d’éthanol issu de cette biomasse et démarrent une unité expérimentale en France en 2024 (xix). Ce procédé présente globalement une très faible émission de gaz à effet de serre. Le chloroprène obtenu à partir de ce butadiène biosourcé serait une piste plus écologique.

Et dans une approche d’économie circulaire il faut récupérer les combinaisons usagées. Actuellement des filières se mettent en place. Pour le moment, certaines combinaisons sont broyées mais le résidu est utilisé dans d’autres applications (xx).

Remarque : il existe d’autres combinaisons pour les sports nautiques utilisant par exemple du caoutchouc naturel (naturel rubber NR) ou des mélanges. Elles ne doivent pas porter le nom de néoprène synonyme de polychloroprène. Certains noms commerciaux ambigus sont aussi des sources de confusion.

Conclusion

Il ne faut pas se laisser tromper par les termes chocs utilisés à mauvais escient sans prise en compte de la réalité scientifique comme argument de vente mais il faut développer son esprit critique. Afin de prouver techniquement et scientifiquement que l’option retenue puisse être déclarée « plus respectueuse de l’environnement », il est nécessaire de réaliser l’analyse du cycle de vie du produit fini intégrant toutes les étapes de fabrication et elle doit prendre en compte une multitude de critères selon les principes de la chimie verte [7].

Par exemple tenir compte ici :

  • du bilan énergétique global selon les deux voies, sans oublier l’extraction du calcaire ou le ramassage des coquilles et du transport à l’usine pour la voie acétylène ;
  • du type de source de carbone dans le cas de la voie acétylène à comparer à la source pétrole ;
  • des émissions de dioxyde de carbone et leurs éventuelles compensations lors de l’usage de réactifs biosourcés.

Françoise Brénon et Gérard Roussel

 

Ajout mai 2024 : vous pouvez également regarder cette vidéo de « Blablareau au labo » sur le sujet.

 

(i) https://yamamoto-bio.com/material-e/sus2.html

(ii) Des combinaisons de surf à base de coquilles d’huître, ADEME Magazine (mars 2021) ADEME, Agence de la transition écologique.

(iii) Par exemple dans Ouest France sous le titre « Des combinaisons marines fabriquées avec des coquilles d’huîtres » (publié le 2/06/2021) et dans Le Parisien avec le titre « A La Rochelle, une combinaison de surf fabriquée à base de coquilles d’huîtres » (publié le 1/02/2020)

(iv )Néoprène est un nom de marque de la compagnie américaine Dupont, donné dès 1930, à son produit à base de polychloroprène.

(v) Contrairement au caoutchouc naturel, (NR, pour Natural Rubber), obtenu à partir de la sève de l’hévéa.

(vi) En nomenclature il s’appelle le 2-chlorobuta-1,3-diène

(vii) Le butadiène est aussi très utilisé pour l’obtention d’autres caoutchoucs synthétiques et 40 % de sa production est consommée par les pneumatiques.

(viii) Raffinage pétrolier, fiche pédagogique sur le site Connaissancedesenergies.org

(ix) Vapocraquage = cassures de molécules en présence de vapeur d’eau, pour obtenir des molécules de longueur plus courtes. La température est voisine de 700 °C et varie selon la composition de l’essence légère dont on part. https://lelementarium.fr/focus/vapocraquage-des-hydrocarbures/ et https://fr.wikipedia.org/wiki/Vapocraquage

(x) Limestone est le mot anglais pour calcaire.

(xi) Exemples de grades de polychloroprène société DENKA (Japon)

(xii) Les fabricants de chloroprène et de polychloroprène sont, en 2024, Asahi Kasei (Japon), BRP Manufacturing (USA), Canada Rubber Group, Chongqing Changshou Chemical (Chine), Denka (Japon) qui a repris l’activité de Dupont de Nemours aux USA en 2014 et produit le CR aux USA à partir du butadiène, et au Japon à partir du calcaire et du charbon (voir page 9 et 10 de General Introduction and Some Advances on Denka Neoprene® Latex (PDF)), ARLENXEAO (Pays-Bas / France), Macro International (USA), SHOWA DENKO K.K. (Japon), Tosoh (Japon) et Zenith Industrial Rubber Products (Inde).
Sources : https://www.researchandmarkets.com/reports/5143078/global-neoprene-market-2020-2024?w=4 et https://www.usinenouvelle.com/article/arlanxeo-totalement-aux-mains-de-saudi-aramco.N1240402

(xiii) L’ajout de noir de carbone donne la couleur noire aux combinaisons. Mais c’est surtout un excellent agent de protection contre les UV et l’abrasion et il apporte une ténacité à la mousse caoutchoutique. Il peut représenter 30 % de la mousse.

(xiv) Le système de vulcanisation contient de l’oxyde de zinc ZnO, de l’acide stéarique, du soufre ou produits soufrés et des accélérateurs de vulcanisation.

(xv) Parmi ces additifs on trouve des antioxygène, anti-ozone, ignifugeant et des composés générant un gaz (azote en général).

(xvi) La pyrolyse des pneus, préalablement broyés, consiste en une décomposition chimique par une très forte augmentation de température en l'absence d'oxygène, pour conduire à du carbone.

(xvii) Le leader mondial du marché dans la production de mousse néoprène pour combinaison est la société SHEICO basée à Taïwan et qui a ses usines dans l’Asie du Sud-Est.

(xviii) Fibres synthétiques telles que le polyester ou l’élasthanne dérivé du polyuréthane.

(xix) Inauguration d’un démonstrateur en janvier 2024. Voir https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/inauguration-du-1er-demonstrateur-industriel-francais-production-butadiene-partir-dethanol-biosource et le schéma réactionnel sur le site de l’IFPEN.

(xx) https://surfwear.sooruz.com/webshop/fr/153-recyclage-combinaison-surf
 

 

Pour en savoir plus
[1] Le néoprène, L. Dollinger et P. Ledesma-Diaz-Caneja (2017) sur le site Ramène ta science (Chimie Paris ParisTech PSL)
[2] Manufacture and use of chloroprene monomer, M Lynch, Chemico-Biological Interactions, 135-136 (2001) pp. 155-167
[3] Chloroprène par la voie du pétrole sur le Portail Substances Chimiques de l’INERIS
https://substances.ineris.fr/fr/substance/getDocument/2557 (PDF)
[4] The footprint chronicles: green neoprene? (PDF) 2012 Patagonia
[5] Vidéo d’obtention de la mousse de néoprène (en anglais) par la société Sheico disponible sur YouTube
[6] Les chimistes dans : La chimie du végétal comme substitut du pétrole, F. Brénon et G. Roussel, Série Les Chimistes dans (Mediachimie.org)
[7] La chimie peut-elle se mettre au vert ?, Eric Bausson, Dossier pédagogique Éditions Nathan / Fondation de la Maison de la Chimie (Mediachimie.org)

 

Crédit illustration : Kate Baucherel / Pixabay, licence de contenu Pixabay