La découverte de la radioactivité par Henri Becquerel, Pierre et Marie Curie remonte à plus d’un siècle (1896-1898) et a conduit à leur décerner le prix Nobel de physique en 1903. Toutefois, des énigmes marquent le début de cette découverte.
Quand des élèves de Frémy discutent entre eux
Gabriel Bertrand dans un article publié en 1946 aux Comptes Rendus de l’Académie des Sciences, rapporte une histoire intrigante « Sur l’origine de la découverte de la Radioactivité » lorsqu’il travaillait encore au Muséum (1).
Mais qui était Gabriel Bertrand (1867-1962) ? Après avoir suivi les cours de l’École de chimie d’Edmond Frémy au Muséum, il s'inscrit à l'École supérieure de pharmacie et devient pharmacien en 1894. Il reste au Muséum, d'abord comme préparateur de Léon Maquenne (1889), au laboratoire de Physiologie végétale appliquée à l’agriculture de P.P. Dehérain, et ensuite, à 23 ans il est nommé préparateur à la chaire de Chimie appliquée aux corps organiques dirigée par le professeur Albert Arnaud successeur de Chevreul au Muséum. Puis en 1897, Émile Duclaux, qui avait succédé à Pasteur à la direction de l'Institut Pasteur, l'appelle au poste de chef de service. Gabriel Bertrand soutient sa thèse de doctorat en 1904, sur la biochimie de la bactérie du sorbose, ce qui lui vaut d'être nommé chargé de cours à la Sorbonne en 1905. Titulaire de la chaire de chimie biologique de cette l'université, il restera simultanément chef de service à l'Institut Pasteur.
Dans cet article de 1946 mentionné en préambule, Gabriel Bertrand rapporte un échange qu’il a eu avec Henri Becquerel en 1893 (1) (2). Rappelons que ce dernier a découvert et publié les propriétés des rayons uraniques trois ans plus tard, au début de 1896. Bertrand écrit : « Notre illustre Confrère vint un jour me voir au laboratoire que j’occupais dans la rotonde de l’amphithéâtre du Muséum, à quelques pas de la maison qu’il habitait et du laboratoire où il travaillait (maison de Cuvier). Il me présenta un petit bloc noir que je reconnus immédiatement à son aspect et à sa densité pour de la pechblende. Il avait enfermé dans un tiroir une plaque photographique, enveloppée dans du papier à aiguilles, après avoir posé dessus le morceau de pechblende. Lorsque, après quelques jours, il se servit de la plaque, une grande tache apparut au développement, tache qu’il reconnut de la grandeur et de la forme du morceau de pechblende. Pouvez-vous, ajouta-t-il en terminant, me donner comme chimiste une explication de ce phénomène ?
J’avais eu l’occasion d’étudier la pechblende quelques années avant dans le laboratoire de Frémy et d’en faire une analyse aussi complète que possible. Je répondis à Henri Becquerel que ce minerai était ordinairement très complexe, pouvait contenir des sulfures, que sous l’influence de l’air humide son échantillon avait peut-être dégagé des traces d’hydrogène sulfuré, imperceptibles à l’odorat, mais auquel la couche de gélatino-bromure d’agent était très sensible. Etant donnée la compacité de la pechblende, je ne tenais pas cette explication pour très probable, mais elle n’était pas impossible.
Quelques jours plus tard, H. Becquerel revint me voir et m’informa que mon explication n’était pas exacte mais, ajouta-t-il, j’en ai trouvé une. Je n’eus pas l’indiscrétion de lui demander en quoi elle consistait…. C’est la première observation qui fut faite par Becquerel de la radioactivité (rayons uraniques). L’impression fortuite d’une tache provoquée par la pechblende sur une plaque photographique. A quelle date se situe cette observation mémorable ? Elle est très notablement et même curieusement antérieure aux publications de 1896. Alors Becquerel n’était plus mon voisin. La chaire de chimie avait quitté le grand amphithéâtre et s’était installée au 63 rue Buffon (dans les locaux de l’école de Frémy, puis fermée en 1894). Ce devait être avant la fin de 1893. Mais on ne saura avec certitude ce qui s’est passé dans le laboratoire de physique du Muséum, entre 1893 et 1896 ».
Niépce de Saint-Victor : de la photographie aux rayons invisibles émis par les sels d’uranium ou une énigme peut en cacher une autre
De quelles informations H. Becquerel avait-il connaissance en 1893 ? Connaissait-il les travaux de Niépce de Saint-Victor, cousin de Nicéphore Niépce l’inventeur de la photographie. Ses expériences dans les années 1857-1867 utilisaient la photographie et recherchaient si la lumière pouvait se stocker dans des corps, autrement que par la phosphorescence ou la fluorescence (*). Niépce de Saint-Victor avait observé, par ce qu’il nommait une « photographie de l’invisible », qu’il ne s’agissait pas d’une phosphorescence, mais d’un rayonnement invisible ne traversant pas le verre. Niépce exposait à la lumière solaire une feuille de carton imprégnée d’une solution de sel d’urane formant un dessin, après insolation il l’appliquait sur une feuille de papier sensible et disposait le tout dans un tube métallique bouché, à l’obscurité. Le dessin se reproduisait en impressionnant le papier sensible. Bref, il avait observé un rayonnement particulier de l’uranium et ses observations avaient été transmises à l’Académie des Sciences par Eugène Chevreul.
En 1861, Niépce avait remarqué que le carton conservé à l’obscurité est encore actif six mois après son insolation. Une substance très efficace pour ces expériences était une solution aqueuse d’acétate d’uranium dont il imprégnait la feuille de papier. Cette activité à distance n’était donc pas due à la phosphorescence. Les travaux décrits dans les mémoires de Niépce de Saint-Victor sur la lumière, ses causes et ses effets étaient connus d’Edmond Becquerel. Il avait également remarqué que ce ne pouvait être dû à un phénomène de phosphorescence, dont la durée n’est pas aussi longue.
Niépce de Saint-Victor avait-il découvert l’activité des rayons uraniques avant Henri Becquerel ? Ce n’est pas clair, mais les Becquerel connaissaient très vraisemblablement les travaux de Niépce. Paul et Josette Fournier (3) ont bien mis en évidence la complexité des filiations pour aboutir à la découverte de la radioactivité, en particulier dans les recherches sur la photographie et la luminescence* qui préoccupaient physiciens et chimistes dans la deuxième moitié du XIXe siècle.
Photographie de Henri Becquerel par Paul Nadar
Note
* Les phénomènes de luminescence, fluorescence ou phosphorescence, apparaissent lorsqu’un corps absorbe la lumière visible ou ultraviolette, puis la réémet à une longueur d’onde plus grande (décalée vers la partie rouge du spectre). Les deux phénomènes de phosphorescence et fluorescence sont quasiment identiques. La différence est que le matériau phosphorescent continue d'émettre de la lumière dans le noir même si on arrête de l'éclairer. Après exposition à la lumière un matériau phosphorescent diffuse la lumière dans le noir alors qu’un matériau fluorescent n'émet pas de lumière dans l'obscurité, mais produit une couleur vive si on l'éclaire.
Bibliographie
1 - Gabriel Bertrand. Sur l’origine de la découverte de la Radioactivité. C.R. Acad. Sci., 223 (1946) p. 698-700.
2 - Michel Genet. La découverte des rayons uraniques : un petit pas pour Henri Becquerel, mais un grand pas pour la science. L’Actualité chimique, n° 220 (1998) p. 34-41.
3 - Paul Fournier et Josette Fournier. Hasard ou mémoire dans la découverte de la radioactivité. Rev. Hist. Sci., 52 (1999) p. 51-79. - Paul Fournier et Josette Fournier. Découverte de la radioactivité. Mediachimie.org. Petites histoires de la chimie.
Illustration : Photographie de Henri Becquerel par Paul Nadar / Adam Cuerden, Wikimedia Commons. Source de l'image : gallica.bnf.fr / BnF
Modes opératoires, liste produits et matériels ; conseils et notions à développer, explications.
Les modes opératoires proposés permettent de mettre en évidence l’interaction lumière matière et tout particulièrement l’excitation de molécules par l’absorption du rayonnement UV puis l’émission de lumière colorée par ces mêmes molécules lors de la désactivation.
Objets de ces 3 expériences
- Expérience 1 - Émission de lumière colorée par une molécule fluorescente soumise aux UV
La luminescence est un phénomène d’émission de lumière, ici visible donc colorée, par réarrangement électronique dans une molécule, par suite d’excitation de celle-ci par les UV. Quand ce phénomène n’a lieu que durant l’exposition à une source énergétique et cesse avec l’arrêt de l’exposition, le phénomène est appelé fluorescence (étudié ici). Si le phénomène perdure après l’arrêt à l’exposition aux UV il s’agit de phosphorescence (ce 2ème phénomène n’est pas étudié dans ces 3 expériences). - Expérience 2 - Chimiluminescence : émission de lumière provoquée par une réaction chimique réalisée avec le luminol
La chimiluminescence consiste en une émission de lumière visible provoquée par une réaction chimique. - Expérience 3 - Expérience combinée de chimiluminescence et de fluorescence réalisée avec du luminol et de la fluorescéine
Il est possible de combiner le phénomène de chimiluminescence et de fluorescence. Il y a alors émission de lumière visible par une molécule fluorescente préalablement excitée par l’énergie libérée par une réaction chimique.
Acquis préalables et notions générales à faire comprendre au cours des expériences
Rappeler que la lumière blanche est composée de lumières colorées et présenter un spectre obtenu par décomposition de la lumière blanche.
Spectre de la lumière visible
Rappeler que la lumière blanche est la superposition intégrale de toutes ces lumières (synthèse additive).
Observer que lorsqu’on va du rouge vers le bleu on va vers des rayonnements de plus en plus énergétiques.
Les UV sont des rayonnements de forte énergie (juste à gauche du violet sur le graphe) mais invisibles à nos yeux (ils nous paraissent incolores).
Faire comprendre la notion de niveau d’énergie et d’excitation des molécules puis de retour à un état plus stable.
Accompagner éventuellement le discours d’une représentation graphique des niveaux d'énergie.
Faire comprendre que s’il y a émission de lumière colorée par une molécule cela diffère de la couleur des objets qui nous entourent, qui elle résulte de l’absorption d’une partie de la lumière blanche provenant du soleil (absorption sélective ou synthèse soustractive).
Faire observer que le phénomène de fluorescence n'est observable que durant l'exposition à une source d’énergie (UV ou libération d’énergie provoquée par une réaction chimique) et que cela cesse dès qu'on arrête l'excitation.
Expérience 1 - Émission de lumière colorée par une molécule fluorescente soumise aux UV
Matériel
- 2 récipients au choix (éprouvette, bécher de 150 ou 200 mL, fiole jaugée ….) le plus photogénique !
- 1 lampe UV 365 nm
Produits
- Fluorescéine : en faire une solution bien jaune
- Schweppes® tonic (seul le tonic contient de la quinine)
- Papier blanc
- Surligneurs « fluos » de diverses couleurs
Mode opératoire
- Introduire dans le récipient choisi la solution de fluorescéine. Observer la couleur jaune à la lumière du jour (cette couleur jaune résulte de l’absorption sélective du bleu par la fluorescéine).
- Éclairer par la lampe UV et observer la lumière verte « flashie » (ou vert brillant) qui apparait sous UV et disparait sans UV.
- Insister ici sur le fait qu'il y a émission de lumière par la molécule (c’est ce qui donne l’aspect brillant).
- Puis arrêter les UV et retrouver la couleur jaune mat (sans émission de lumière).
- Faire de même avec du Schweppes® tonic. On observe une lumière bleue.
- Faire de même avec papier blanc. On observe une lumière bleue.
- Faire de même avec des encres de surligneurs préalablement étalées sur un papier.
Explications à adapter selon le public, élèves de lycée ou grand public
La fluorescéine est une molécule qui présente en son sein des électrons qui peuvent acquérir de l’énergie, cad monter à un niveau supérieur instable. Les électrons sont dits dans un état excité et tendent à revenir à un état stable. Lors de ce retour à l’état stable, ils émettent de l’énergie sous forme lumineuse. Ici il s’agit de la lumière verte.
Ce phénomène s’arrête si on éteint la lampe UV. Ce phénomène est appelé fluorescence. Et la fluorescéine est dite une molécule fluorescente.
On peut proposer un résumé du type :

Source : Le laboratoire des couleurs – Anne Guillerand - BUP vol. 104 ( Déc. 2010)
Avec du Schweppes® on observe une lumière brillante bleue sous UV. Elle est dû à la molécule fluorescente de quinine présente dans le Schweppes®.
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formule de la quinine
Avec du papier blanc
Pourquoi observe-t-on que le papier blanc émet du bleu quand on l’éclaire par la lampe UV ?
Dans la composition du papier il a été ajouté des produits fluorescents dits azurants (comme l’azur : bleu).
Pour faire un lien avec la vie de tous les jours, on trouve aussi ces additifs dans les lessives pour améliorer la sensation de blanc des tissus (« plus blanc que blanc » comme disent certaines publicités ou comme le caricaturait Coluche). Cette impression est due au fait que la lumière du soleil contient aussi des UV qui excitent les électrons des azurants.
C’est le même effet que l’on observe avec les chemises blanches dans les boites de nuits où l’on danse en lumière dite noire (qui sont en réalité des UV proches du visible).
Le phénomène est le même avec les traces de surligneurs qui ont été étalées sur du papier. Leur encre visible et résistante à la lumière sans pour autant masquer le texte lui-même,contient des agents fluorescents.
On peut citer d’autres composés fluorescents connus :
- Nombreux minéraux : fluorites (à l’origine du nom de la propriété), quartz, topaze…
- Monde végétal et vivant : chlorophylle, certains champignons, scorpions…
- Produit pharmaceutique : éosine
- Tubes d’éclairage fluorescents
- Utilisation de cette propriété dans l'art, aussi bien dans des peintures utilisant des pigments fluorescents que pour analyser les constituants des couches supérieures de peintures
- Utilisation pour certains diagnostics médicaux
Expérience 2 - Chimiluminescence : émission de lumière provoquée par une réaction chimique réalisée avec le luminol
Matériel
- 1 balance au 1/100e avec capsules plastiques pour pesées + spatules
- 2 grandes éprouvettes de 500 mL
- 1 très grande éprouvette de 1000 mL
- 2 éprouvettes de 5 mL ou pipettes graduées de 5 mL
- 1 pipette graduée de 3 mL ou 5 mL
- 1 propipette
- 1 cristallisoir
Produits
- luminol 0,1 g (le nom du luminol en nomenclature est la 5-amino-1,2,3,4-tétrahydrophtalazine-1,4-dione)
- solution d’hydroxyde de sodium NaOH (soude) à 10% 5 mL
- eau distillée (1 L)
- ferricyanure de potassium (ou (hexacyanoferrate(III) de potassium) solide 1,5 g
- eau oxygénée (ou solution aqueuse de peroxyde d’hydrogène) à 30% (3 mL)
Mode opératoire
- Préparer sous hotte devant le public ou avoir préparé à l’avance (sauf l’ajout de l’eau oxygénée qui doit se faire au dernier moment)
- Éprouvette A (ou fiole jaugée A facile à boucher si réalisée à l’avance) : dissoudre 0,1 g de luminol dans 400 mL d’eau et ajouter 5 mL de soude à 10%.
- Éprouvette ou fiole jaugée B : dissoudre 1,5 g de ferricyanure de potassium dans 400 mL d’eau. Ajouter à la dernière minute 3 mL d’eau oxygénée à 30%
- Rendre sombre la pièce, verser simultanément le contenu des 2 éprouvettes A et B dans un grand entonnoir déposé sur la grande éprouvette à pied : il se produit une magnifique lumière bleue !
On peut aussi dans l’éprouvette B ne mettre que l’eau et l’eau oxygénée et le mode opératoire est alors le suivant.
Introduire quelques cristaux de ferricyanure de potassium solide dans la grande éprouvette où aura lieu l’expérience. Rendre sombre la pièce, verser simultanément le contenu des 2 éprouvettes A et B via un grand entonnoir dans la grande éprouvette à pied : il se produit une magnifique lumière bleue !
Notions à développer sous forme de commentaires et à adapter selon le public pendant la démonstration
Présentation préalable des produits présents dans les éprouvettes :
Éprouvette B :
L’eau oxygénée : que tout le monde connait et a dans sa pharmacie ; mais ici elle est beaucoup plus concentrée. C’est un produit très réactif et oxydant, surtout si elle est concentrée.
Le ferricyanure est un composé contenant du fer à l’état oxydé [Fe (III)] C’est ici un catalyseur c’est à dire un produit qui va accélérer la réaction que l’on veut observer.
Éprouvette A :
La soude : elle créé un milieu basique propice à la réaction (on peut dire que tout le monde connait la soude soit sous ce nom soit sous forme de Destop par exemple et en a dans sa cuisine sous les lavabos !! ce qu’il ne faut pas faire pour protéger les enfants !!!).
Le luminol est une molécule complexe fragile en présence d’oxydant telle que l’eau oxygénée.
Si le public est un peu plus averti on peut ajouter que la fragilité concerne une partie seulement de la molécule, là où il y a 2 atomes d’azote liés entre eux. On peut aussi montrer le dessin de la molécule ou un modèle moléculaire et montrer les 2 atomes d’azote concernés.

formule du luminol
Explications
Quand les 4 produits sont mis en contact, le luminol et l’eau oxygénée en milieu basique, en présence de ferricynanure de potassium (comme catalyseur) réagissent vivement (ce qui libère une forte énergie) et il se forme du diazote, de l’eau et un di-anion aminophtalate dérivé du luminol, dans un état excité. Cet état résulte de l’énergie libérée par la réaction. Puis ce di-anion se désactive et émet une lumière bleue. La réaction chimique a ainsi créé de l’énergie que l’on observe sous forme lumineuse.
On peut proposer un résumé du type :
Source : Le laboratoire des couleurs – Anne Guillerand - BUP vol. 104 ( Déc. 2010)
Exemples dans la vie courante
- Cette expérience est réalisée par la police scientifique pour rechercher des traces de sang. En effet l’hémoglobine du sang contient du fer à l’état oxydé Fe(II) qui en présence de l’eau oxygénée passe à l’état de Fer(III) qui joue alors le rôle de catalyseur (à la place du ferricyanure que nous avons utilisé). Ce procédé a été repris dans un certain nombre de séries TV policières !
- Dans le monde animal, tout le monde a eu l’occasion de voir, lors de promenades nocturnes, des vers luisants ou des lucioles émettre des petites lumières jaunes à verdâtre. Cette lumière résulte d’une réaction chimique, propre à l’animal, dans le corps de la luciole. On parle aussi de bioluminescence. Ces émissions de lumière permettent aux couples de se trouver pour assurer la reproduction.
- Certains planctons et phytoplanctons sont aussi bioluminescents. Ce processus pouvant à la fois servir selon l’espèce pour le camouflage, l’attraction sexuelle, mais aussi la répulsion ou la communication.
Si on est en présence d’un public un peu plus averti, on peut préciser que dans les réactions de bioluminescence observées dans divers organismes vivants, le composé chimique à l'origine de la luminescence est presque toujours la luciférine. Celle-ci émet de la lumière en subissant une oxydation par le dioxygène grâce à l'intervention d’une enzyme, la luciférase qui joue le rôle de catalyseur.
formule de la luciférine
Expérience 3 - Expérience combinée de chimiluminescence et de fluorescence réalisée avec du luminol et de la fluorescéine
- Même matériel et mêmes produits qu’en 2 + solution de fluorescéine ou fluorescéine en poudre.
- Même mode opératoire qu’en 2, mais ajouter dans la solution A initiale de la fluorescéine en poudre ou en solution, de manière à obtenir une solution bien jaune.
- On peut sans doute utiliser pour cette derrière expérience les produits en quantités divisées par 2.
- Observer alors une lumière verte
Explications
La même réaction chimique du luminol et de l’eau oxygénée conduit au di-anion qui en se désactivant excite la molécule de fluorescéine. Celle-ci en se désactivant à son tour donne la couleur verte qu’elle émettait sous UV (rappel de la 1ère expérience).
Cela peut avoir lieu avec tout autre molécule fluorescente ajoutée. On obtiendra l’émission de la couleur caractéristique de la molécule ajoutée.
Exemples dans la vie courante
Les bâtons lumineux festifs que l’on peut acheter lors de concerts ou fêtes et que l’on doit casser délicatement. Lors de la fracture du petit tube de verre intérieur, qui séparait les produits, les réactifs sont mis en contact et il se produit une réaction comparable à celle que nous venons d’observer, avec l’eau oxygénée, le luminol et la fluorescéine.
Il y a différentes couleurs selon les réactifs fluorescents introduits dans chacun des bâtons.
Le phénomène s’arrête quand tous les produits chimiques contenus dans le bâton ont été consommés.
Illustration : Capture d'écran vidéo Fluorescence © Mediachimie/Blablareau au labo
Source : luminol, fluorescéine, UV, émission de lumière, bioluminescence, investigation policière, sang,
Le colloque « Chimie, recyclage et économie circulaire » qui a eu lieu le 8 novembre 2023 au sein de la Fondation de la Maison de la Chimie, a mis en lumière certains enjeux du recyclage des matériaux dont les progrès à réaliser dans la collecte des déchets mais aussi les objets usagés et la nécessité de sans cesse innover pour améliorer les procédés existants.
Tout cela s’inscrit dans la transition écologique nécessaire pour évoluer vers un nouveau modèle économique et social qui apporte une solution globale et pérenne aux grands enjeux environnementaux de notre siècle et aux menaces climatiques qui pèsent sur notre planète. La chimie est bien entendu très sollicitée pour y parvenir.
Dans ce dossier, après avoir défini les contours de l’économie circulaire, nous aborderons le recyclage de quelques familles de matériaux.
Chimie, recyclage et economie circulaire
- Terminale générale, spécialité physique-chimie — Partie « Constitution et transformations de la matière » — 3. A et C : Prévoir l’état final d’un système, siège d’une transformation chimique — 4. Élaborer des stratégies en synthèse organique
- Première STI2D et terminale STI2D, programmes de physique-chimie et mathématiques —Partie « Matière et matériaux » / Oxydo-réduction
- Terminale STL, programmes de physique-chimie et mathématiques — Partie « Constitution de la matière » / Réactions d’oxydo-réduction
Suite au tragique incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, un vaste chantier de rénovation a vu le jour, avec pour objectif ambitieux de reconstruire le monument à l’identique. Quatre ans et demi plus tard, et à un an de sa réouverture au public prévue le 8 décembre 2024, la charpente est achevée et la flèche qui vient tout juste d’être posée culmine à nouveau à 96 mètres de haut. Si le public se réjouit de voir la cathédrale renaître de ses cendres, la prochaine étape de reconstruction de la toiture ravive néanmoins des inquiétudes suite au choix de garder le plomb comme matériau de couverture. En effet, lors de l’incendie, plusieurs centaines de tonnes de ce métal à la toxicité avérée sont parties en fumée et se sont dispersées dans l’atmosphère parisienne.
Comment peut-on mesurer l’impact de l’incendie de Notre-Dame sur la pollution au plomb à Paris ?
Parties des programmes de physique-chimie associées
- Radioactivité et datation
- Terminale, spécialité physique-chimie — Thème « modéliser l’évolution temporelle d’un système, siège d’une transformation » partie B
- Première, enseignement scientifique — Thème « Une longue histoire de la matière »
- Terminale, spécialité SVT — Thème « À la recherche du passé géologique de notre planète »
Maurice Goldhaber meurt le 11 mai 2011 à Setanket-East Setauket dans le comté de Suffolk situé dans l’état de New York à plus de cent ans puisqu’il était né le 18 avril 1911 à Lemberg dans l’Empire austro-hongrois. Cette ville est, de nos jours, en Ukraine et porte le nom de Lviv.
Après la première guerre mondiale, la famille s’installe à Chemnitz dans l'est de l'Allemagne. À Chemnitz, Maurice Goldhaber fréquente le lycée. Il apprend le latin, le français et l’anglais en plus des matières scientifiques. Il obtient l’abitur, équivalent du baccalauréat, en 1930 et décide d’entreprendre des études de physique à Berlin.
À cette époque, de nombreux physiciens de renom enseignent à Berlin comme Max Planck (1858-1947), Albert Einstein (1879-1955), Max von Laue (1879-1960), Walther Nernst (1864-1941), Erwin Schrödinger (1887-1961), Otto Hahn (1879-1968) et Lise Meitner (1878-1968). Il reste trois ans à l’université à Berlin et trouve le cours de Lise Meitner sur la physique nucléaire très stimulant. C’est dans le cours de von Laue qu’il rencontre Gertrude Scharff (1911-1998) qui deviendra son épouse.
En 1933, avec les recommandations d'Erwin Schrödinger et de Max von Laue, il est accepté par Ernest Rutherford (1871-1937) comme étudiant au laboratoire Cavendish. Ce laboratoire est le département de physique de l’Université de Cambridge, il a été fondé en 1874 et porte le nom d’un physico-chimiste anglais talentueux Henry Cavendish (1731-1810). Rutherford le dirige de 1919 à sa mort en 1937.
Maurice Goldhaber a rapidement apporté sa première contribution majeure lorsqu'il a suggéré à James Chadwick (1891-1974), qui avait découvert le neutron en 1932 que le deutéron pourrait être désintégré par des photons à haute énergie. Ils travaillent ensemble et ils publient en 1934 la première mesure précise de la masse du neutron. Grâce à Chadwick la structure de l’atome a été complétée, le noyau est constitué de charges positives les protons et de charges neutres les neutrons autour sur des trajectoires elliptiques se déplacent des charges négatives les électrons ; l’atome est neutre électriquement, il possède autant de protons que d’électrons. Le deutéron encore appelé deuton est le noyau du deutérium, isotope naturel de l’hydrogène. Il contient un proton et un neutron. Les isotopes d’un même élément chimique possèdent le même nombre de protons et un nombre de neutrons différents.
Ces travaux lui permettent d’obtenir le doctorat en physique à l'Université de Cambridge en 1936. Dans le journal Le Temps du 15 septembre 1936, on peut lire dans la rubrique Causerie scientifique : « Or, tout dernièrement Chadwick et Goldhaber ont ouvert une nouvelle voie en montrant qu’un deuton frappé par les rayons gamma se dédouble en donnant un proton et un neutron. » Les rayons gamma sont un rayonnement électromagnétique d’un photon, ils ont une grande énergie et sont de nos jours utilisés en médecine nucléaire ainsi qu’en imagerie médicale.
N’obtenant pas de poste, il part aux États-Unis en 1938 et accepte un poste de professeur à l'Université de l'Illinois. Il est reconnu comme un expérimentateur créatif dans le domaine nucléaire. Mais Il va quitter l’Illinois car sa femme, Gertrude Scharff Goldhaber ne peut pas obtenir un poste rémunéré. Il part, en 1950, au laboratoire national de Brookhaven car sa femme est embauchée. Ce laboratoire a été créé en 1947 sur le site d’une ancienne base militaire américaine Camp Upton sur Long Island. Il dépend du département de l’énergie des États-Unis et son domaine est la physique nucléaire.
Il détermine en 1968, l’hélicité du neutrino avec Lee Grodzins (1926- ) et Andrew Sunyar (1920-1986). Ils montrent que le neutrino a une hélicité gauche car son spin est orienté dans le sens opposé à son mouvement. Le neutrino est une particule élémentaire électriquement neutre. Le spin est une des propriétés des particules en physique quantique. Il caractérise le moment angulaire intrinsèque. Un électron se déplace autour du noyau de l’atome, il a un moment angulaire orbital, il tourne aussi sur lui-même, c’est le moment angulaire intrinsèque ou spin. Si le spin est entier ou nul, les particules portent le nom de bosons. Si le spin est demi-entier, les particules sont nommées fermions. Les électrons et les neutrinos sont des fermions.
Au nom de la commission de l’énergie atomique des États-Unis, en 1968, il dépose un brevet pour l’invention d’un composé hélium-néon permettant l’étude des interactions du neutrino dans les chambres à bulles. Il dirige le département de physique à partir de 1960 et en 1961, il est nommé directeur, poste qu’il conservera jusqu’en 1973. Avec Edward Teller (1908-2003), il propose le modèle dit Goldhaber-Teller qui décrit la résonance géante dipolaire, celle-ci est due à la vibration groupée des neutrons en opposition à la vibration groupée des protons. La société américaine de physique l’élit président en 1982.
Bien que retraité en 1985, il continue de travailler jusqu’à plus de 90 ans. Sa dernière publication date de mai 2011, elle est écrite avec son fils Alfred. Il a obtenu de nombreux prix. En 1971, le prix Tom Wilkerson Bonner en physique nucléaire lui est attribué. Ce prix existe depuis 1964 en mémoire de Bonner (1910-1961). Il récompense des travaux en physique nucléaire et est décerné tous les ans.
Il reçoit le prix J. Robert Oppenheimer en 1982 attribué par le centre d’études théoriques de l’université de Miami depuis 1969. Robert Oppenheimer (1904-1967) est le père du projet Manhattan qui conduira à la fabrication de la bombe A qui a été utilisée à Hiroshima et à Nagasaki.
Puis en 1983, il reçoit la médaille nationale des sciences. Cette médaille est décernée par le président des États-Unis qui choisit les personnes à récompenser parmi une liste établie par la Fondation nationale scientifique. Elle récompense un travail important dans le domaine des sciences sociales, de la biologie, de la chimie, de l’ingénierie, des mathématiques et de la physique ainsi que des sciences du comportement.
Il obtient le prix Wolf en physique en 1991. Ricardo Wolf (1887-1981) est un inventeur d’origine allemande qui a été ambassadeur de Cuba en Israël et qui a créé une fondation. Depuis 1978, la Fondation Wolf attribue tous les ans en Israël six prix à des personnalités pour des réalisations dans l’intérêt de l’humanité et des relations pacifiques entre les peuples sans considération de nationalité, de religion, de couleur, de sexe ou d’opinion politique. Les prix Wolf récompensent des travaux en agriculture, mathématiques, médecine, chimie, physique et art, ils ne sont pas remis tous les ans. En physique et en chimie, les prix sont justes un peu moins prestigieux que le prix Nobel, souvent les lauréats du prix Wolf obtiennent le prix Nobel dans les années qui suivent.
Enfin, en 1999, le prix Enrico Fermi lui est attribué. Ce prix, décerné par les États-Unis à des scientifiques ayant œuvré dans le domaine de l’énergie, est administré par le département de l’énergie des États-Unis. Une médaille en or à l’effigie d’Enrico Fermi (1901-1954) est remise à celui qui reçoit ce prix.
En 2001, le laboratoire national de Brookhaven crée les bourses Gertrude et Maurice Goldhaber en leur honneur. Ces bourses sont décernées à de jeunes scientifiques qui ont déjà des titres et aussi du talent ainsi que des compétences exceptionnelles et dont les recherches montrent une indépendance d’esprit et une curiosité pour des domaines proches de leur sujet.
En 2008, le laboratoire célèbre le 50e anniversaire de la découverte de l'hélicité des neutrinos en donnant une conférence. Maurice Goldhaber, qui a 97 ans, est présent et monte sur l’estrade afin de présenter son point de vue sur l'avenir de la physique.
En août 2009, il déménage près de son fils, Alfred, un professeur de physique à l'Université Stony Brook. Son travail, bien que plus lent, continue. Avec son fils Alfred, il s'est mis à démontrer l'impraticabilité de remarquer l'hélicité inversée des neutrinos, l’article est publié dans Physics Today en mai 2011.
Maurice Goldhaber décède après une courte maladie le 11 mai 2011. Il a formé de nombreux chercheurs et plusieurs de ses élèves ont obtenu le prix Nobel.
Pour en savoir plus
Maurice Goldhaber, P. D. Bond et L. Grodzins, Physics Today (2011) 64 (10), 65
Maurice Goldhaber - A biographical memoir (PDF), R. P. Crease and A. S. Goldhaber, sur le site de National Academy of Sciences
Revue Scientifique 1/01/1939 p. 122 sur Gallica (BNF)
Illustration : Maurice Goldhaber probablement en 1937 GFHund — Travail personnel / Wikimedia, CC BY 3.0
Dans la région provençale, la garance est cultivée pour donner la couleur garance utilisée en teinture. À Avignon, la chambre de commerce propose un concours en 1858 sur la garance : Trouver un procédé usuel propre à reconnaître d’une manière sûre et facile, dans la Garance et les divers produits qui en dérivent, toute espère d’altération ou de mélange ayant un caractère frauduleux. Jean-Henri Fabre (1823-1915), professeur de physique et de chimie au lycée impérial d’Avignon, entreprend des travaux sur la garancine qui est de la poudre de racine de garance. Ces derniers sont récompensés par la chambre de commerce car il obtient le premier prix.
Dès 1826, Pierre-Jean Robiquet (1780-1840) et Jean-Jacques Colin (1784-1865) étudient la racine de garance et isolent deux colorants l’alizarine et la purpurine.
De 1859 à 1861, Jean-Henri Fabre dépose quatre brevets d'invention touchant à l'analyse des fraudes, mais surtout à l'alizarine pure, qu'il a réussi à extraire. Le 30 juillet 1859, le brevet porte le titre de L’obtention d’une garance épurée, au pouvoir tinctorial accru : la paludine.
Mais, en 1868, alors qu’ils travaillent chez BASF, Carl Graebe (1841-1927) et Carl Liebermann (1842-1914) découvrent l’alizarine synthétique qu’ils obtiennent à partir de l’anthracène tiré du goudron de houille. Un brevet est déposé et l’alizarine est commercialisée dès 1871. À un jour près, William Henry Perkin (1838-1907) réalise la même synthèse. L’alizarine est la 1,2-dihydroxyanthraquinone de formule C14H8O4 et de formule développée :
Cette découverte est catastrophique économiquement pour les régions où la garance est cultivée comme la Provence, l’Alsace et la Hollande car l’alizarine synthétique est peu chère et les quantités obtenues sont très importantes. En 1885, l’Allemagne produit en 20 jours autant d’alizarine que le département du Vaucluse et ses environs en une année entière.
Pour Jean-Henri Fabre aussi, c’est une catastrophe car il vient de passer pratiquement dix années à trouver des procédés pour améliorer l’obtention de l’alizarine naturelle et tout ce travail n’aura servi à rien.
C’est ainsi que les soldats français sont partis au combat en août 1914 avec des képis et des pantalons rouges, colorés non plus par la garance issue des cultures françaises mais par l’alizarine produite par l’Allemagne !
Cette tenue historique, nécessaire à la visibilité du soldat sur le champ de bataille enfumé par la poudre noire, devenait un handicap après l’invention de la poudre sans fumée en 1884. Après des tergiversations politiques et idéologiques, il fut décidé qu’il s’agissait maintenant de combattre sans être vu. Ce n’est que fin 1915 que l’intégralité des soldats français a pu disposer de la tenue « bleu horizon » dont le colorant provenait de l’indigo synthétique produit par les Britanniques.
Pour en savoir plus
- Altérations frauduleuses de la garance et de ses dérivés : Mémoires récompensés au concours ouvert à Avignon sur cette question, Chambre de commerce et d'industrie (Avignon), sur le site Gallica (bnf.fr)
- Jean-Henri Fabre, Thèses, Brevets inédits et Mémoires, sur le site e-fabre.com
- L’œuvre de Jean-Henri Fabre, A. Lécaillon, Revue pédagogique (1916) 68-1, pp. 278-297
- L'uniforme du fantassin français en 1914 et 1916, PDF disponible sur le site du Musée de l'Armée-Invalides (rubrique Fiches objets > Dans les collections)
- Rouge garance : une couleur martiale, F. Deherly, Le Blog Gallica (2021)
Illustration : Soldat français de la Première Guerre mondiale en 1914 (in coll. Mémorial de Verdun) Image retouchée (Antonov14)/Wikimedia, licence CC BY-SA 3.0
L’intelligence artificielle est un des domaines de l’informatique qui prend une place de plus en plus importante dans notre quotidien (moteurs de recherche, itinéraires routiers...) mais aussi dans la recherche depuis quelques décennies. En doublant tous les dix-huit mois, la puissance des ordinateurs n’a cessé d’augmenter de façon très significative au fil des ans. Ceci a permis d’accroître les capacités de ces machines à exécuter des tâches normalement associées à l’être humain pour résoudre, entre autres, des problèmes complexes en analysant des données en nombre de plus en plus colossal. Depuis les années 1960, les chimistes utilisent ces machines capables de traiter des données et les applications liées à leur utilisation permettent d’optimiser la recherche et le développement de nouvelles molécules.
Parties des programmes de physique-chimie associées
- Programme d’enseignement scientifique de terminale, thème 3 :Une histoire du vivant, partie 5 : De la machine de Turing à l’intelligence artificielle
- Programme de la spécialité physique-chimie de terminale générale, partie « Constitution et transformations de la matière », 2.a : Suivre et modéliser l’évolution temporelle d’un système, siège d’une transformation chimique, 4. : Élaborer des stratégies en synthèse organique
- Programme de physique-chimie de terminale STL : partie « Chimie et développement durable » / Synthèses chimiques
- Programme de physique-chimie et mathématiques de première STL : partie « Transformation chimique de la matière » / Cinétique d’une réaction chimique
Les mers et océans représentent 71 % de la surface totale de notre planète pour un volume de près de 1,33 milliard de km3 (soit 98 % des eaux de la planète) et une profondeur moyenne de 3 700 mètres. Contrairement aux écosystèmes terrestres, les écosystèmes marins restent encore très peu explorés : on estime que seulement 5 % des espaces marins ont à ce jour fait l’objet d’études approfondies. Il est vrai que c’est seulement au XXe siècle que l’on a commencé à disposer de technologies et d’équipements adaptés pour explorer les grands fonds (jusqu’à près de –11 500 m dans la fosse des Mariannes). L’extrême diversité de sa faune, sa flore, ses ressources, son potentiel énergétique… font de l’espace marin une réserve de richesses dont on a du mal aujourd’hui à en évaluer l’étendue.
Source : Série Les chimistes dans
Lorsqu’en 1774 paraît le premier tome des Voyages métallurgiques entre 1757 et 1769, son auteur Antoine Gabriel Jars, dit le Jeune, est mort depuis 1769. C’est son frère ainé Gabriel Jars (1729-1808) dit l’Ancien, qui fait imprimer l’ouvrage en trois tomes, les deux derniers tomes seront publiés jusqu‘en 1781. Le premier tome est consacré à la houille et au fer, les deux autres à la métallurgie non-ferreuse. L’ensemble est constitué de mémoires.
Gabriel Jars le Jeune est né en 1732 à Lyon. Son père est Directeur des mines et Jars le Jeune s’intéresse très tôt à la métallurgie. Remarqué par ses professeurs, il entre à l’École royale des Ponts et Chaussées à Paris en 1752 dans une classe spéciale réservée aux mines. Cette école fondée en 1747 par Daniel Charles Trudaine (1703-1769), a pour mission de former les techniciens et les ingénieurs. Trudaine comme Jean Hellot (1685-1766) veut faire avancer le bien-être de la société grâce au progrès technique par l’éducation, la formation et l’apprentissage. Le jeune Gabriel est envoyé en stage dans les mines de plomb argentifères de Poullaouen en Bretagne. Puis sur d’autres sites comme les mines d’argent de Sainte-Marie aux Mines en Alsace.
Ses études terminées, il revient dans l’exploitation familiale où il met en œuvre un four à réverbère où la chaleur du four est réfléchie par la voute du four, ainsi qu’un four à cuivre.
Grand ingénieur d’Etat, sa réputation lui vaut dans les années 1750-1760 de devenir membre correspondant de l’Académie royale des Sciences de Paris en 1761 puis d’être élu, simultanément à Antoine Laurent Lavoisier (1743-1794), au fauteuil de chimie laissé vacant en 1768 par le Théodore Baron d’Hénouville (1715-1768). Gabriel Jars est ainsi récompensé pour son apport.
Gabriel Jars voyage dans une grande partie de l'Europe Centrale et en Grande-Bretagne, afin de rapporter en France le meilleur des pratiques techniques qu’il croise et relève en chemin. Trois années durant, de 1757 à 1760, accompagné de Jean-Pierre-François Guillot-Duhamel (1730-1816), il visite des mines et des fonderies dans de nombreuses régions : Saxe, Autriche, Bohême, Hongrie, Tyrol, Carinthie et Styrie. Puis, de nouveau à la demande du gouvernement, il part l’année 1765 complète en Angleterre. À peine revenu en France, il repart vers les pays du nord en compagnie de son frère. Ils commencent leur périple par la Hollande et ses manufactures, puis le Hanovre, séjournent quatre mois dans les montagnes du Harz, parcourent une partie de la Saxe puis se rendent à Hambourg, de là à Copenhague, puis aux mines d'argent de Kongsberg en Norvège et enfin en Suède.
Ensuite, il réalise des missions en France afin d’étudier les mines près de Langeac, actuellement en Haute-Loire. Mais la forte chaleur le rend malade et il est ramené à Clermont-Ferrand où il meurt d’insolation le 20 août 1769.
Il a passé l’essentiel de sa vie à voyager à travers l’Europe et à observer les techniques employées dans les forges, pour les introduire sur le territoire français, avec le souci permanent de lier théorie et pratique. Son journal de voyage permet de recueillir des informations au jour le jour et ce travail devient au XIXe siècle, l’exercice obligé de tous les élèves ingénieurs des Écoles des Mines de Paris comme de Saint-Étienne.
Gabriel Jars le Jeune est un métallurgiste, créateur de la sidérurgie française et aussi un innovateur en introduisant des nouveaux procédés. On lui doit la fonte au coke ; le procédé de fabrication du minium, qu’il présente à l’Académie des Sciences en avril 1768. Pour lui, le charbon et le fer sont les éléments essentiels du développement technique. Enfin, il installe au Creusot un grand centre industriel qui existe toujours.
Son ami, Jean-Pierre-François Guillot-Duhamel continuera l’œuvre de Gabriel Jars en introduisant des procédés nouveaux comme la cémentation de l’acier. Il collaborera à l’Encyclopédie méthodique d’Antoine-François Fourcroy (1755-1809) en rédigeant les articles concernant les mines et la métallurgie.
Pour en savoir plus
- La famille Jars et sa contribution à l'exploitation des mines lyonnaises au XVIIIe et au XIXe siècles, Alexis Chermette, Publications de la Société Linnéenne de Lyon (1981) Vol 50-5 pp. 1-11
- Jars Le voyageur innovant Anne-Françoise Garçon (2000) 〈halshs-00008092〉
- Les Voyages métallurgiques de Gabriel Jars (1774-1781), un imprimé au service de l’art de l’exploitation des Mines, Isabelle Laboulais, in Les circulations internationales en Europe (1680-1780), Presses Universitaires de Rennes (2010) pp.181-196
Les hommes ont utilisé des métaux dès la préhistoire, mais il faut attendre la fin du XVIIIe siècle pour voir apparaître les premières constructions métalliques. L’une des plus anciennes au monde et la première en France, est située au Muséum sur le sommet du monticule que recouvre le labyrinthe du Jardin des Plantes. Cette butte, incluse dans le Jardin royal des Plantes médicinales dès sa fondation avec l’acquisition du Clos Coypeaux (1633), n’est pas naturelle, mais a été constituée au Moyen Âge par l’accumulation de détritus et de gravats provenant de Paris et de ses faubourgs. Avant 1609, sur son sommet tournait un moulin à vent, qui a été supprimé par la suite.
Aujourd’hui, le promeneur du Jardin des Plantes attiré par cette butte, son labyrinthe végétal et son cèdre historique, ne manque pas d’être intrigué par une étonnante construction métallique qui la domine. Issue d’un cheminement à but initiatique, empreinte des sociétés secrètes et des grands initiés de la fin du XVIIIe siècle, la Gloriette nous plonge en plein ésotérisme.
Aménagements de la butte et du labyrinthe
À l’origine, la butte Coypeaux, censée être affectée aux plantations botaniques, avait été plantée de variétés de vignes dont le vin était apprécié des administrateurs. Colbert les avait fait arracher en 1671 pour les remplacer par diverses espèces de plantes et d’arbres rares. Au sommet se trouvait dès 1640 un robinier. Sous le nom de « grand labyrinthe » la butte était une promenade parcourue par un chemin en spirale. Vers 1784, le botaniste André Thouin, jardinier en chef, projeta de l’embellir par l’aménagement d’une statue de Georges-Louis Leclerc comte de Buffon (1707-1788) pour lui rendre hommage. Mais Buffon refusa, disant qu’il ne pouvait « consentir à aucune dépense qui aurait trait à sa gloire personnelle ». Fut alors proposée, à la demande de Buffon la construction d’un kiosque, nommé Gloriette (i), réalisée et érigée en 1786-1787. Elle est classée au titre des Monuments Historiques depuis 1993.
C’est Edme Verniquet (ii) (1727-1804), architecte du roi Louis XVI, qui en a dessiné les plans et Claude-Vincent Mille, serrurier du roi, qui l’a construite. Sa structure métallique est en fer et en fonte, produits dans les forges de Buffon à Montbard, où le naturaliste faisait beaucoup d’expériences pour en améliorer la qualité.
La Grande Forge de Buffon à Montbard
Au milieu du XVIIIe siècle, de nombreuses expériences sont réalisées sur la résistance des matériaux, tout particulièrement sur celle du fer. Parmi celles-ci, on doit distinguer celles de Buffon qu’on peut considérer comme l’un des pionniers de la métallurgie. Dès 1768 il avait fait construire une forge dans sa propriété de Buffon, sa ville natale proche de Montbard en Bourgogne et avait fait un laboratoire de sciences appliquées. Son but était d’optimiser les étapes de la fabrication du fer forgeable et ainsi d’améliorer la qualité de la fonte de fer.
À la fin du XVIIIe siècle, 400 ouvriers y travaillaient à produire environ 450 tonnes de fer par an. Elle était considérée comme la plus innovante de l’époque. Le minerai de fer y était chauffé à 1200°C pendant 12 h dans le haut-fourneau avec du charbon de bois ou du charbon de terre (coke), pour être alors réduit à l’état de fonte (alliage de fer et de carbone), puis dans la forge d’affinerie elle était transformée en un matériau plus résistant et plus flexible, le fer (iii). Enfin la production était facilitée par l’organisation des bâtiments industriels et leur proximité des logements des ouvriers. Cette forge avait aussi produit le fer utilisé par Buffon pour fabriquer les grilles qui entourent le Jardin des Plantes, ainsi que diverses rampes d’escalier et des ferronneries.
C’est vers cette époque que l’on a commencé à distinguer le fer, l’acier et la fonte, mais leur connaissance précise sur la base du taux de carbone qu’ils contiennent ne viendra qu’au début du XIXe siècle. Buffon a été l’un des fondateurs de la « Compagnie pour l'exploitation du charbon de terre (houille/coke) », afin de développer la fabrication du coke déjà expérimentée par les Anglais à une échelle importante. Mais son vaste domaine forestier lui fournissant du charbon de bois à bon compte il a plutôt utilisé ce dernier. Buffon était soucieux d’appliquer les sciences au service de ses entreprises. Il était ami d’Antoine-Gabriel Jars (le jeune), inspecteur des forges royales et célèbre pour ses « Voyages Métallurgiques » en Europe au cours desquels il étudiait les différentes méthodes utilisées dans chaque pays. S’en inspirant, Buffon écrivait en 1768 « je suis parvenu à faire avec nos plus mauvaises mines de Bourgogne du fer d’aussi bonne qualité que celles de Suède ».
La construction de la Gloriette, ses symboles et ses problèmes
Les travaux de la Gloriette ont commencé en avril 1786 et ont été terminés en mars 1787. Haute de plus de 8,1 m, de forme circulaire avec un diamètre d’environ 4,2 m, elle est composée de huit colonnes formant une armature en fonte de très haute qualité. Elle présente des superstructures et des décorations composées de divers métaux, qui dissimulent en grande partie l’ossature en fer. Elles étaient fixées par des rivets, car la soudure n’existait pas encore à cette époque.
A l’origine, la Gloriette était surmontée, d’une « sphère armillaire (iv) » en fonte et cuivre, modélisant le mouvement des étoiles. Elle renfermait un gong qui marquait le midi solaire : à midi, une loupe focalisait les rayons du soleil sur un fil de crin, ce qui le brûlait provoquant sa rupture et par suite déclenchait un mécanisme qui frappait les douze coups de midi sur un tambour chinois. Le fil était changé chaque jour. Ce mécanisme a aujourd'hui disparu.
Sans fonction matérielle en dehors de proposer un point de vue sur Paris, l’édifice a une valeur symbolique qui tient notamment à l’utilisation d’une variété de métaux. En effet, elle est caractérisée par l’emploi de sept métaux : or, argent, cuivre, fer, étain, plomb et mercure, renvoyant au symbolisme alchimique des éléments et à l’astrologie antique. Une correspondance avait été établie entre les sept « planètes », en fait le soleil, la lune et les cinq planètes observables à l'œil nu, reliées aux sept couleurs de l’œuvre alchimique et elles-mêmes associées aux dieux du panthéon gréco-romain.
Correspondance métaux-planètes-couleurs-dieux gréco-romains | |||||||
Métal (symbole) | ☉ = Au |
| ☿ = Hg | ♀ = Cu | ♂ = Fe | ♃= Sn | ♄= Pb |
Métal (nom) | Or | Argent | Mercure | Cuivre | Fer | Étain | Plomb |
Planète | Soleil | Lune | Mercure | Vénus | Mars | Jupiter | Saturne |
Couleur | jaune | blanc | mélé | vert | rouge | bleu | noir |
Mais outre le sens symbolique, le mélange de métaux a eu un effet néfaste sur la stabilité de cette construction en favorisant la corrosion par effet de pile, liée à l’exposition aux intempéries, pluie et atmosphère humide. La Gloriette au cours du temps s’est transformée en une pile polymétallique, ce qui a conduit à la dégradation des éléments constitutifs par électrolyse et par suite la corrosion de l’ensemble. Ces phénomènes d’électrolyse n’étaient pas connus au moment de la construction, car la découverte du courant électro-galvanique par Louis Galvani date de 1789 et le développement des piles par Volta est encore ultérieur.
Ainsi, malheureusement les matériaux, structure en fer et décorations, se dégradèrent rapidement par électrolyse, ce qui avait conduit à une première restauration en 1983 et l’édifice avait alors retrouvé son aspect originel. Mais ensuite, les intempéries, la pollution, la corrosion et la stagnation des eaux, entre autres, ont à nouveau détérioré les décors et fragilisé la structure, la rendant potentiellement dangereuse pour le public. Ce qui a contraint le Muséum à fermer son accès en 2016. Pour réaliser une rénovation intégrale, le Muséum a alors lancé un appel aux dons auprès du grand public et de ses mécènes, qui ont largement répondu, en particulier la Fondation de la Maison de la Chimie a fortement soutenu cette rénovation. La restauration, effectuée en atelier (par La Forge d'Art Loubière), a débuté par le sablage des principales pièces métalliques de la structure, afin de nettoyer le support en fonte sans l’abîmer et de permettre une bonne adhésion avec la couche métallique utilisée pour le protéger contre la corrosion et la rouille. Cette métallisation, deuxième étape de la restauration, a été réalisée par projection au moyen d’un pistolet à flamme, d’un fil constitué d’un alliage zinc/aluminium (85%/15%). Puis, les différentes pièces ont été « montées à blanc », c’est-à-dire assemblées provisoirement en atelier pour vérifier la stabilité de l’ensemble et enfin remontées définitivement sur le site.
En 2018, la Gloriette a été ainsi mise en sécurité et le lieu a retrouvé tout son charme, vérifiant la devise autrefois inscrite sur la corniche « Horas non numero nisi serenas (Je ne compte que les heures heureuses) ».
Notes
(i) Gloriette : nom issu des pavillons où les guerriers antiques étaient glorifiés.
(ii) Verniquet a été aussi l’architecte du Grand Amphithéâtre du Muséum (1787-1788) et a coordonné le Plan de la Ville de Paris dans sa nouvelle enceinte (1796) qui constitue la première représentation topographique exacte de Paris.
(iii) Fer/Fonte/Acier : la différence physique entre la fonte, le fer et l’acier tient à la teneur en carbone. Il faut attendre le début du XIXe siècle pour que la distinction entre « fer », « acier » et « fonte » se fonde sur le taux de carbone contenu dans l’alliage.
(iv) Sphère armillaire : utilisée autrefois pour modéliser la sphère céleste selon la représentation géocentrique (système de Ptolémée), et le mouvement apparent des astres autour de la Terre qui était considérée alors comme le centre de l’univers (du latin armilla, cercle ou bracelet).
* Iron Bridge : ce pont sur le fleuve Severn à Shropshire en Angleterre, au N-O de Birmingham, est la première grande structure métallique réalisée en 1779. D'une portée de 30,60 m, il est constitué de 384 tonnes de fonte de fer.
* Le pont des Arts est le premier pont métallique parisien. Construit en 1801, traversant la Seine il joint le Louvre à l’Institut. Sa passerelle était alors constituée de huit arches en fonte.
Pour en savoir plus
- Le belvédère du labyrinthe. Laissus Yves, Pronteau Jeanne, Gotteland Andrée, préface de Jean Dorst (1985) Ed. Muséum national d’Histoire naturelle - Hachette.
- Buffon. La nature en majesté. Laissus Yves (2007) Ed. Découvertes Gallimard Sciences et Techniques.
- Les Voyages métallurgiques, Gabriel Jars (1774) sur le site de la BNF ; Les Voyages métallurgiques de Gabriel Jars (1774-1781), un imprimé au service de l’art de l’exploitation des mines. Isabelle Laboulais (2010) Presses universitaires de Rennes, pp.181-196
- Des voyages métallurgiques au XVIIIe siècle. Catherine Marchal (site Mediachimie.org)
- L’acier en Europe avant Bessemer. Ph. Dillmann, L. Hilaire-Pérez et C. Verna ; Colloque. Internat. (2005) Musée des arts et métiers ; La question de l’acier en France au XVIIIe siècle : l’histoire d’un rendez-vous manqué entre science et industrie. Jean-François Belhoste. In : L’acier en Europe avant Bessemer (2011) Ed. Presses universitaires du Midi
- Histoires de fontes. Les descriptions du XVIIIe siècle. Partie III : Propositions pour l'interprétation physicochimique de l'affinage des fontes au bas foyer. Jean Le Coze. Comptes Rendus Chimie Vol. 12 (2009) pp. 297-318