Le colloque Chimie, Aéronautique et Espace a eu lieu mercredi 8 novembre 2017. Il a rassemblé 1250 participants dont plus d'un tiers de lycéens et leurs enseignants.
La captation vidéo de l'intégralité des conférences et des débats est maintenant disponible ici.
L’imbroglio politique à Bruxelles et à Paris sur le renouvellement d’autorisation de cet herbicide nourrit les polémiques qui s’étalent dans les journaux. Mais connaît-on bien en tant que chimiste cette molécule ?
Le glyphosate est un composé de formule brute C3H8NO5P appelé N-(phosphonométhyl)glycine. C’est un acide organique analogue à un acide aminé naturel auquel on a ajouté un groupement phosphonate (C–PO–(OH)2). Sa synthèse industrielle n’est pas trop complexe et il a été fabriqué initialement par Monsanto qui en a possédé le brevet jusqu’en 1974. Plusieurs firmes depuis le fabriquent. Il est commercialisé sous le nom de « Roundup », l’herbicide systémique le plus utilisé dans le monde. Il comporte des adjuvants pour accroître sa solubilité et la pénétration dans la plante, notamment un surfactif (tensioactif) : le polyoxyéthylène amine (POEA) ou Tallowamine.
Les agriculteurs souhaitent la poursuite de son autorisation car ils utilisent ce produit pour éviter la pratique des labours profonds qui changent la structure des sols (1) au détriment de la biodiversité. Les ONG et les écologistes souhaitent au contraire son interdiction en tant que produit chimique et susceptible d’être cancérigène (2).
En fait dès 1997, une étude coordonnée par l’Agence américaine de la protection de l’environnement avait montré que ce n’était pas le glyphosate mais plutôt le POEA et ses produits de dégradation qui étaient toxiques pour les poissons et batraciens en milieu humide (3). Les études réglementaires nécessaires pour la mise sur le marché pour le glyphosate jusque l’an 2000 ne montraient aucun danger tératogène ou toxique pour l’homme.
C’est un rapport en 2015 du CIRC (Centre international de recherche sur le cancer), agence de l’OMS, qui a classé le glyphosate comme cancérogène probable pour l’homme à forte dose. On se rappellera que c’est ce même organisme qui a classé le café dans la même catégorie probable et la charcuterie comme cancérigène certain. En 2016, l’EFSA pour l’Europe concluait qu’il était improbable que cette substance soit cancérigène ; l’ANSES (4) pour la France, plus prudente, considérait que le niveau de preuves était insuffisant pour le classer comme cancérigène mais recommandait de ne plus l’additionner du POEA.
Passons sur les polémiques qui d’un côté accusent les organismes officiels d’avoir repris une étude faite par Monsanto et de l’autre côté accusent un rapporteur indélicat d’avoir changé les conclusions du CIRC de peu probable en probable ! Elles n’apportent rien à la clarté scientifique.
Le monde agricole pose alors la question des produits phytosanitaires alternatifs ? (5) Sont proposés les acides gras qui n’ont une efficacité que sur 14 jours, l’acide pélargonique (géranium) ou l’acide caprique proposé par Bayer qui ne fonctionnent que sur de petites surfaces et de coût assez élevé. Un autre herbicide de Monsanto, le Dicamba ou acide 2-méthoxy-3,6-dichlorobenzoïque renoue avec les organochlorés encore bien pires et qui fait déjà l’objet aux États-Unis de nombreuses plaintes d’agriculteurs. Restent l’huile de coude pour le sarclage et l’arrachage à la main, difficilement compatibles avec la désertification rurale.
C’est le vrai problème de l’agriculture moderne, appelée à nourrir des milliards d’êtres humains et confrontée à l’usage de produits respectueux de l’environnement et de la santé alimentaire (6) et bien sûr de ses rapports avec la chimie. Si depuis 40 ans le nombre de molécules pesticides, herbicides et insecticides a été réduit des 2/3 et si les micropolluants des eaux se sont réduit de 60% (7) avec une belle amélioration de la chaine alimentaire, c’est que les organismes de réglementation et la recherche de solutions (8) ont travaillé ensemble mais l’on peut encore faire des progrès.
Jean-Claude Bernier
Novembre 2017
Quelques ressources pour en savoir plus :
1) Biogéochimie et écologie des sols (330)
2) Chimie et santé : risques et bienfaits (307)
3) Biochimie naturelle et traitement de l’eau : de la chimie des écosystèmes et des cocktails… (284)
4) Le défi posé aux chimistes pour la protection de la santé et de l’environnement. Le point de vue de l’ANSES (1099)
5) La chimie en agriculture : les tensions et les défis pour l’agronomie (313)
6) Réglementation de l’évaluation des risques alimentaires : la place de la chimie (285)
7) Les micropolluants dans les écosystèmes aquatiques : enjeux de la directive eau (1101)
8) La nature pour inspirer le chimiste : substances naturelles, phytochimie et chimie médicinale (292)
Qui dans sa vie n’a pas vu en automne le jeu des couleurs magnifiques des feuilles de la majorité des arbres qui nous entourent ? Jaune de toutes les nuances, orange, rouge feu, rouge byzantin…
En effet l’arbre, n’ayant pas des moyens de déplacement, ne peut s’abriter pendant les mois rudes de l’hiver. Il a donc développé sa propre stratégie de survie contre le gel.
Il préfère sacrifier ses feuilles, celles qui occupent le plus de surface exposée, pour se protéger de la dessiccation et garder ses branches, tronc et racines. L’ensemble des structures restantes est protégée soit par l’écorce (branches et tronc) soit par la terre (racines).
La chimie de la chute
Aussitôt que la luminosité baisse et que les premiers froids paraissent, l’arbre, grâce à des molécules senseurs (réceptrices), va réaliser la venue de l’hiver ; l’ordre va être donné pour secréter une petite molécule hormone qui s’appelle éthylène (1), molécule bien connue par ailleurs de l’industrie pétrochimique.
La biosynthèse de l’éthylène va alors se réaliser grâce à une succession complexe d’étapes chimiques à partir de la méthionine (2), qui est un acide aminé essentiel pour la constitution des protéines.
L’éthylène va déclencher un deuxième mécanisme, celui de fabrication de « liège » autour des veinules ou artérioles qui amènent la sève (le sang des arbres) vers le feuillage pour le nourrir et l’hydrater ; un « bouchon » est formé qui empêche l’alimentation des feuilles (3). L’avenir de ces feuilles dépend désormais du vent… L’hiver s’installe mais la chimie de l’arbre lui a encore sauvé la vie, pour une nouvelle année.
Les changements de couleur
La chlorophylle (4), cette molécule responsable de la couleur verte intense et qui assure le processus de la photosynthèse (5), va être progressivement dégradée par le froid.
Le vert disparait pour laisser place à d’autres colorants, cachés jusqu’alors par la couleur verte. Ce sont les caroténoïdes (6) (substances chimiques de la carotte) ou les anthocyanines (substances chimiques des choux).
La danse des couleurs est amorcée ; tous les jours, à chaque instant de la journée et en fonction de la luminosité, des nuances variées régalent nos yeux.
Pourquoi certains arbres ne perdent pas leur feuillage ?
Le cas des conifères en est un exemple didactique.
Leur feuillage en forme d’aiguilles diminue substantiellement la surface d’exposition. Par ailleurs, il s’agit d’arbres résineux qui laissent autour de chaque aiguille une fine couche de résine qui sert de vêtement de protection, comparable à la cire secrétée par les canards qui nagent dans l’eau, indifféremment de la température ambiante.
La stratégie des plantes est une source d’émerveillement ! (7)
Constantin Agouridas, Françoise Brénon et l'équipe Question du mois de Mediachimie
(1) Éthylène ou éthène H2C=CH2
(2) La méthionine existe sous 2 structures, images l’une de l’autre dans un miroir. Par exemple la S-méthionine a pour formule :
(3) Ce processus s’appelle l’abscission.
(5) Dans le processus de photosynthèse, la chlorophylle absorbe l’énergie solaire afin de permettre au dioxyde de carbone et à l’eau, présents dans l’air ambiant, de se combiner pour produire des hydrates de carbone (sucre) et libérer du dioxygène.
(6) Caroténoïdes : Il s’agit d’une famille contenant environ 600 molécules différentes. Elles ont en commun de présenter une longue alternance de simples et doubles liaisons, responsable de leur couleur. Par exemple le lycopène a pour formule :
(7) C’est ainsi que certains arbres sécrètent de l'éthylène et d'autres gaz pour empêcher la végétation d'envahir leurs pieds et que sous stress thermique les arbres émettent de l'éthylène, d'où l'inflammation rapide et spectaculaire de l'arbre entier lors des incendies de forêt.
L’Energy Observer, un ancien catamaran de course avec lequel l’australien Peter Blake avait gagné le trophée Jules Verne en 1994, a été transformé en 2016 en un superbe bateau de démonstration des énergies renouvelables, bourré d’innovations en chimie. Long de 30,5 mètres et large de 13 mètres, son capitaine, Victorien Erussard a entamé en août 2017 le tour du monde en 6 ans et 101 escales sans émettre un litre de gaz à effet de serre (1). Autonome en énergie, ce bâtiment accumule toutes les récentes technologies permises par l’innovation en chimie.
Cela commence par les 130 m2 de panneaux solaires (2) spécialement étudiés par le CEA–Leti avec des cellules bifaces à hétérojonction dont le rendement approche de 22% (3). L’ensemble des cellules couvre le pont, elles sont revêtues d’une couche antidérapante et donnent une puissance crête de 21 kW. L’électricité solaire générée est stockée dans des packs de batteries ion-lithium spéciaux, apportant une réserve d’énergie de 106 kWh (4). La propulsion se fait par deux hélices mues par deux moteurs électriques à fort rendement de puissance de 41 kW chacun et tournant à 3000 tours/minute capable de faire avancer ce navire en composite (5) à une vitesse comprise entre 10 et 15 nœuds. L’astuce de ces moteurs c’est qu’ils sont réversibles en hydrogénérateurs et lorsque le bateau court sur son erre, porté par le vent ou un courant, les hélices engendrent un courant et une puissance de 2x2,5 kW qui peut recharger les batteries. Il y a aussi une autre source d’énergie : sur le pont une trappe s’ouvre sur un cerf-volant automatisé qui sous le vent tire le bateau en augmentant sa vitesse et en réduisant les dépenses d’énergie. S’y ajoute une pile à hydrogène, aussi source d’énergie. En effet ce navire labo dispose d’un électrolyseur (6) qui dissocie l’eau en oxygène et hydrogène. Ce dernier est récupéré sous une pression de 30 bars puis compressé à 150 bars et stocké dans 8 réservoirs pour donner une réserve de 62 kg d’H2. On sait que l’hydrogène est un vecteur d’énergie (7) à travers la pile à combustible qui produit de l’électricité à partir de la recombinaison H2 + O = H2O (8). Pour compléter les sources, deux petites éoliennes à axe vertical peuvent fournir un appoint de 2 kW. On comprend dès lors qu’avec toutes ces technologies d’avant-garde ce « Solar Impulse des mers » (9) aura une autonomie énergétique complète. S’y ajoutent un désalinisateur d’eau de mer qui fonctionne en osmose inverse (10) et dans le dôme de navigation une électronique embarquée (11) et un super logiciel informatique connecté, optimisant la navigation, prenant en compte non seulement l’état de la mer et du vent mais aussi la nébulosité et la gestion de l’énergie.
L’Energy Observer fait route vers la Méditerranée et doit être début décembre en escale à Marseille. Les élèves du Lycée Galilée de Gennevilliers suivent attentivement cette odyssée, ils sont en ce moment à la Cité des sciences et de l’industrie pour se relayer devant une maquette et un démonstrateur d’électrolyse produisant de l’hydrogène et ainsi expliquer les technologies du bateau aux plus jeunes. Ils seront également en décembre à l'escale de Marseille.
Bon vent à cette nouvelle « calypso des mers » ! (12)
Jean-Claude Bernier
Octobre 2017
Quelques ressources pour en savoir plus :
1) Le changement climatique (Chimie et… junior)
2) Les panneaux solaires (vidéo, 2 :34)
3) Un exemple d’énergie renouvelable : panneaux solaires photovoltaïques
4) L’énergie : stockage électrochimique et développement durable
5) Chimie et construction navale
6) Production d’hydrogène par électrolyse de l’eau sur membrane acide
7) L’hydrogène, vecteur de la transition énergétique
8) Fonctionnement de la pile à combustible (vidéo, 1:30)
9) Solar Impulse 2 et la chimie
10) D’eau et de sel (vidéo, 14:00
11) Toujours plus petit ! (Chimie et… junior)
12) Site du projet Energy Observer : http://www.energy-observer.org
Depuis près de vingt ans le « nanomonde » s’est développé. Rappelons d’abord qu’un nanomètre (nm) est mille fois plus petit que le micromètre et qu’une particule de 10 nm est 50 000 fois plus petit que l’épaisseur d’un de vos cheveux. Si les microprocesseurs de nos smartphones sont de plus en plus puissants, c’est que par lithographie on grave les transistors à moins de 20 nm (1). De même les microcapteurs de CO ont des composants à dimensions nanométriques (2), la télévision HD utilise aussi des « quantum dots » nanométriques (3) et même en thérapie les nanomédicaments sont un espoir pour les traitements du cancer (4).
Cet été la presse s’est fait l’écho d’une enquête très médiatisée sur la présence de nanoparticules de TiO2 dans de nombreux aliments, plats cuisinés, pâtisseries, bonbons… Une publication de l’université de Séoul en mai attire aussi l’attention sur des poudres de carbone émises par les imprimantes 3D (5). Ces annonces peuvent semer le trouble dans l’agroalimentaire, chez les consommateurs et aussi chez les usagers d’imprimantes 3D. Pour ces dernières, qui se multiplient dans le grand public, la fabrication additive se fait le plus souvent par fusion de fils de thermoplastiques (PLA - acide polylactique, ABS - acrylonitrile butadiène styrène) à des températures de 150°C à 200°C qui peuvent permettre l’émission de vapeurs mais probablement pas de nanoparticules de carbone, d’autant que maintenant la plupart des imprimantes sont capotées. Plus sérieux est le cas des imprimantes 3D industrielles qui se multiplient chez les fabricants de pièces complexes à partir de poudres métalliques déposées en couches successives fondues par laser. La sécurité des opérateurs est assurée par des installations qui satisfont aux normes relatives aux locaux à pollution spécifique où les concentrations moyennes en poussière totale et alvéolaire de l’atmosphère ne doit pas dépasser 10 et 5 mg/m3 d’air. Les rangées d’imprimantes bien fermées sont disposées dans des locaux ventilées avec leurs propres alimentations de poudres, étanches, limitant les manipulations individuelles et obéissant aux normes (6).
À cet égard, il faut rappeler qu’il y a un domaine où les normes n’ont aucun pouvoir, il s’agit des nano-objets relevant de la pollution ambiante : nanoparticules de TiO2 des peintures, des cosmétiques, des nanosilices, des particules de CeO2 issues de pots catalytiques, etc…, tous objets non manufacturés de l’ordre de 20 000 à 30 000 nano-objets par mm3 (7). Cette situation relativise l’annonce médiatique des nanoparticules de TiO2 de l’additif alimentaire E 171. Car de plus, au-delà du « scoop », il faut rappeler que les autorités européennes par l’EFSA ont largement étudié la toxicité de cet additif depuis plusieurs années. Il comporte entre 0 et 39% de particules inférieures à 100nm et d’après cette agence, « les expositions à l’E171 ne sont pas de nature à entrainer un risque sanitaire ». Mais en France, avec le principe de précaution, l’ANSES a été alerté par divers ministères, suite à une publication (Bettini et al., dans Scientic Reports) sur d’éventuelles lésions du colon chez des rats soumis à un régime riche en nanoparticules de TiO2. L’expertise collective diligentée aussitôt a rendu ses avis en avril, après analyse des protocoles d’essais et audition des auteurs. La conclusion du panel d’experts ne remet pas en cause l’avis initial européen de l’EFSA, elle constate aussi que les réactions inflammatoires intestinaux ne sont que difficilement étayées et que les résultats ne permettent pas de conclure à une génotoxicité. L’ANSES rappelle par ailleurs que cela fait plus de dix ans que l’agence travaille sur les effets biologiques des nano-objets et qu’elle souhaite que des protocoles d’essais rigoureux et normés soient mis en place en ce domaine (8).
Jean-Claude Bernier
Ocotbre 2017
Quelques ressources pour en savoir plus :
1) Chimie et nanolithographie (vidéo, 8:20)
2) Micro-capteurs à semi-conducteurs pour la détection de CO (conférence)
3) La chimie s’invite dans la guerre des télés
4) Les nanomédicaments : une approche intelligente pour le traitement des maladies sévères
5) La 3D, troisième révolution industrielle ?
6) Production et utilisation des nano-objets : évaluation et gestion des risques
7) Les nano-objets : un avenir prometteur sous contrôle (chimie et… junior)
(8) Le défi posé aux chimistes pour la protection de la santé et de l’environnement. Le point de vue de l’ANSES
Dans le cadre de la Fête de la science, l’équipe de Mediachimie.org vous propose de rentrer dans le monde souvent surprenant et parfois magique de la chimie et de ses applications, au travers d’un quiz ludique et instructif.
C’est l’occasion de découvrir que la chimie est partout, qu’elle est présente en permanence dans notre quotidien et dans tout ce qui nous entoure. Source d'innovations et de progrès, elle accompagne les autres sciences et les autres technologies, dans tous les laboratoires de recherche, dans tous les domaines d'activités.
Avec ce quiz, testez vos connaissances et découvrez des innovations ou des applications inattendues, fruits de l'observation et de l'imagination des chercheurs, parfois aidés par ce que la Nature a su inventer avant nous.
À vos claviers !
Les allumettes que nous utilisons tant en cette saison de barbecue sont bien pratiques et faciles à utiliser. Pourtant elles sont le fruit d’une longue histoire. Elles résultent de nombreuses recherches et industrialisations suivies d’améliorations pour les rendre sûres et non toxiques. Elles nécessitent une friction pour s’enflammer et pour que ce soit d’un usage utile il faut que cette flamme dure suffisamment longtemps. Mais quels sont donc les ingrédients mis en jeu pour que cela fonctionne ?
Les composés présents sur la surface à gratter
Le grattoir est constitué de poudre de verre et de phosphore rouge.
Le phosphore rouge est la variété allotropique (1) stable du phosphore, non inflammable et non toxique.
Les composés présents sur la tête de l’allumette
La petite tige de bois de peuplier est imprégnée de phosphate d’ammonium et son extrémité est recouverte de paraffine. Sur cette extrémité est déposée une pâte constituée à environ 50 % de chlorate de potassium (KClO3) (2), de trisulfure de diantimoine (Sb2S3) et de phosphate d’ammonium (NH4)3PO4, le tout lié par une colle. Le colorant présent est ajouté pour la rendre jolie !
Cette tête est appelée le « bouton » dans le processus de fabrication.
Que se passe-t-il lors du grattage, et après ?
La poudre de verre permet la friction provoquant un échauffement. Cette augmentation locale de température provoque la transformation du phosphore rouge en phosphore blanc (3). Celui-ci, très volatil et inflammable, s’enflamme immédiatement en présence du dioxygène de l’air. Cette étape sert à amorcer la flamme.
Celle-ci se communique alors à la tête de l’allumette.
Le chlorate, oxydant, se décompose sous l’effet de la chaleur de la flamme en chlorure et libère de l’oxygène selon KClO3 → KCl + 3/2 O2 (gaz)
Le trisulfure de diantimoine est un réducteur et sert de combustible, permettant ainsi à la flamme de se maintenir.
Il se forme simultanément du trioxyde de diantimoine et du dioxyde de soufre, responsable de l’odeur que l’on perçoit.
Les réactions mises en jeu sont :
Sb2S3 + 9/2 O2 → Sb2O3 + 3 SO2
ou globalement Sb2S3 + 3 KClO3 → Sb2O3 + 3 SO2 + 3 KCl
Et ce bel enchaînement de réactions ne dure que quelques dixièmes de secondes !
La cire de paraffine, qui est aussi un bon combustible, va permettre à la flamme de se propager le long de la tige de bois.
Quant au phosphate d’ammonium dont le bois est imprégné, il joue le rôle de retardateur de combustion afin que l’allumette ne brûle pas trop vite, et limite la formation des fumées lorsque l’allumette s’éteint.
La fabrication des allumettes en France a pendant plus d’un siècle été un monopole d’état (représenté par la SEITA). La dernière usine de Saintines dans l'Oise a fermé en 1993, elle fabriquait environ 15 milliards d'allumettes sur les 22 milliards consommées en France et consommait alors 8400 m3 de bois de peuplier. Depuis la consommation chute de 2 à 4% par an, concurrencée par les allume-gaz et les briquets.
Pour voir en images et au ralenti le processus d’inflammation d’une allumette tout en identifiant les réactions qui se passent, regardez la vidéo « How Do Matches Work ? » sur la chaine Youtube de l’American Chemical Society.
Françoise Brénon
(1) Une variété allotropique correspond à une forme cristalline ou moléculaire. Le phosphore rouge a un enchainement structural semblable à un polymère :
source http://www.compoundchem.com/2014/11/20/matches/
(2) On utilise du chlorate de potassium qui est non hygroscopique (absorbe peu ou pas l’humidité de l’air) contrairement au chlorate de sodium.
(3) Le phosphore blanc est une autre variété allotropique du phosphore . Sa structure découle d’une « dépolymérisation « du phosphore rouge et est :
source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Phosphore_blanc
Il est très inflammable. On pourra lire à son sujet la ressource « Le phosphore et l’invention des allumettes ».
Lors d'une séance en classe de seconde en enseignement d'exploration « sciences et laboratoire », M. François Bourliot, professeur de physique-chimie au lycée Pierre Gilles de Gennes - ENCPB, utilise le site Mediachimie pour accompagner l’exploitation d’un TP.
À cette occasion, Mme Françoise Brénon, professeure de chimie et membre du comité éditorial de Mediachimie, présente ce site à l’aide d’exemples. Au cours de cette séance, deux vidéos ont été réalisées par le service vidéo de l’académie de Paris :
- une version courte (7 min) consacrée à la présentation de Mediachimie et dans laquelle M. François Bourliot explique pourquoi et comment il l'utilise dans son cours ;
- une version longue (14 min) inclut l’intégralité de la version courte et permet également de suivre une partie de la classe dans exploitation d'un TP d'exploration portant sur l’oxydo-réduction, avec l'utilisation de Mediachimie.
L’ouragan Harvey a ravagé la semaine dernière la côte est du Texas aux États-Unis. Il a fait au moins 33 victimes et il a aussi inondé une zone fortement industrielle près de Houston. C’est là que plusieurs sites de pétrochimie comme les raffineries ont dû s’arrêter noyées par les eaux mais des plateformes chimiques ont aussi souffert. C’est le cas de l’usine ARKEMA de Crosby au nord-est de Houston où plusieurs explosions suivies de dégagements de fumées ont été observées jeudi 31 août et vendredi 1er septembre. Les responsables de la filière américaine du groupe nous informent d’une situation jamais vécue, où 1,80 mètre d’eau dans l’usine ont fait sauter les alimentations électriques d’urgence et de secours. En conséquence les conteneurs de peroxydes organiques n’étaient plus réfrigérés et ont brûlé.
Qu’est-ce qu’un peroxyde organique ? Les peroxydes organiques sont des substances organiques liquides ou solides qui contiennent la structure bivalente -O-O- et qui, en tant que telles, sont considérées comme des dérivés du peroxyde d’hydrogène dans lesquels un ou les deux atomes d’hydrogène ont été substitués par des radicaux organiques. Ils dérivent presque tous d’une formule
et ils sont caractérisés par des doubles liaisons C=O et des ponts d’oxygènes greffés entre des radicaux carbonés. L’un des plus simples est le peroxyde d’hydrogène H-O-O-H ou eau oxygénée (1), antiseptique et comburant dans les fusées, mais aussi agent de synthèse oxydant en chimie organique. Les peroxydes sont utilisés en pharmacochimie (2) et aussi comme plastifiants (3), dans la fabrication des plastiques et des composites fibreux (4). Il y a plus de dix types de peroxydes organiques, citons le peroxyde de dibenzoyle utilisé comme agent thérapeutique contre l’acné et agent de blanchiment comme le peroxyde de lauroyle dans l’industrie alimentaire (5). D’autres peroxydes comme ceux des carbonates, de cétones et d’esters sont utilisés dans les polymères et diverses industries y compris cosmétiques (6), où l’on a besoin d’un réactif d’oxydation.
Ce sont des composés à la fois oxydants et comburants et donc instables car ils réunissent dans un même composé du carbone et de l’hydrogène (comburants) qui ne demandent qu’à réagir avec l’oxygène (oxydant) pour donner du CO2 et H2O. Ils se décomposent facilement sous l’action de la chaleur. La montée en température au-dessus de la « température de décomposition accélérée » (SADT en anglais) entraine une décomposition exothermique avec possibilité d’auto-accélération et auto-combustion d’où explosion (7).
C’est pourquoi on les stocke dans des containers refroidis où la température doit rester en général au-dessous de 20 °C. La panne d’alimentation électrique a provoqué la décomposition et la combustion des containers sur le site de Crosby, malgré toutes les précautions prise par les services de l’usine en doublant les circuits de réfrigération (8). La direction locale d’ARKEMA a décidé de déclencher l’incendie des produits restants en accord et liaison avec le « Chemical Safety Board », l’agence fédérale de sûreté chimique afin de mettre en sécurité le site (9).
Jean-Claude Bernier
Septembre 2017
Quelques ressources pour en savoir plus :
1) Découverte du peroxyde d’hydrogène (eau oxygénée)
2) Le vieillissement cutané : prévention et réparation
3) L’analyse des peintures automobiles
4) Matériaux composites à matrice polymère
5) Alimentation : les différentes facettes de la qualité
6) La chimie au cœur de l’innovation en parfumerie-cosmétique : le contexte économique et réglementaire et les défis de la recherche
7) Une enquête explosive
8) Apport de REACH dans l’amélioration de la connaissance des dangers des substances pour Arkema
9) Du produit aux installations : apport des sciences chimiques pour renforcer la sécurité