Sugar cane bagasse
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Le biocarburant 2G bientôt à la pompe

On se rappelle que pour les ajouts dans l’essence (SP95-E10) la production d’alcool à partir du sucre de la betterave ou de l’amidon du blé avait essuyé des critiques (1). En effet, non seulement l’efficacité énergétique
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On se rappelle que pour les ajouts dans l’essence (SP95-E10) la production d’alcool à partir du sucre de la betterave ou de l’amidon du blé avait essuyé des critiques (1). En effet, non seulement l’efficacité énergétique et le bilan CO2 n’étaient pas au rendez-vous, mais cette production était en concurrence avec les cultures vivrières et accusée de faire augmenter le prix des céréales.

C’est pourquoi des recherches intensives se sont développées pour obtenir l’éthanol (2) à partir de la biomasse « lignocellulosique » (3) : la paille, le bois les bagasses des végétaux. À côté de la voie thermochimique coûteuse en énergie, débouche la voie biochimique (4). Il fallait trouver les enzymes et bactéries capables d’extraire les sucres de la cellulose (5), et par fermentation obtenir l’alcool. Plusieurs groupes aux États-Unis, en Europe, en France font la course pour trouver le bon procédé industriel (6). Le challenge est d’améliorer par génie génétique un cocktail d’enzymes dérivés du Trichoderma reesi un champignon qui lors de la guerre du Pacifique Sud en 1944-1945 dévorait les toiles de tentes des Marines américains.

Il faut d’abord séparer la cellulose, l’hémicellulose et la lignine par un procédé mécanique ou chimique. Puis les enzymes à environ 50°C attaquent la cellulose et produisent deux sucres, l’un en C5 le xylose et l’autre en C6 le glucose qui par fermentation vont donner l’éthanol.

Dupont paraît le premier à se lancer au stade industriel (7), la compagnie vient d’inaugurer aux États-Unis la plus grande usine d’éthanol cellulosique dans l’Iowa. Elle produira 115 millions de litres par an à partir de 375 000 t. de tiges et feuilles de maïs ramassées par 500 agriculteurs dans un rayon de 50 km. Le cocktail « Accelerase® 1500 » transforme 80% de la biomasse en 80 heures et la fermentation pour obtenir des solutions à 30 % d’alcool exige le même temps.

En France, le projet « Futurol » lancé en 2008 avec 11 partenaires dont l’INRA et l’IFPEN est aussi arrivé à un « cocktail enzymatique » de première force et un procédé couverts par plus de 20 brevets. Une usine pilote près de Reims fournit déjà 180 000 litres et préfigure une unité industrielle de 180 millions de litres par an d’ici 2018 (8). La société de biotechnologie Deinove avec une souche enzymatique Deinol vient de réussir une étape préindustrielle en Finlande et s’attache à trouver une solution de production compétitive d’ici 2018 (8).

Le bioethanol 2G de source lignocellulosique (9) doit encore démontrer sa rentabilité économique face au prix très bas du baril de pétrole, mais avec le 3G (10) c’est vraiment à long terme l’avenir pour l’environnement.

Jean-Claude Bernier
décembre 2015

Quelques ressources pour en savoir plus :

(1) Des biocarburants pas si verts que ça
(2) L’éthanol (Produit du jour de la Société Chimique de France)
(3) Le végétal, un relais pour le pétrole ?
(4) Valorisation biologique des agro-ressources
(5) La cellulose (Produit du jour de la Société Chimique de France)
(6) Les enjeux de la R&D en chimie pour le développement des carburants et des biocarburants
(7) La chimie au cœur des énergies d’avenir
(8) Chimie du végétal, fer de lance de la chimie durable
(9) Biomasse : la matière première renouvelable de l’avenir
(10) Les algocarburants, de nouveaux diesels miracles ?

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Quizz interactif Mediachimie

Nous venons de remettre la tablette au lauréat du quizz interactif Médiachimie - Village de la Chimie 2015. Il s’agit de Meddy Elabaddy, élève au lycée Galilée, lycée polyvalent, labellisé lycée des métiers de la chimie,
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Nous venons de remettre la tablette au lauréat du quizz interactif Médiachimie - Village de la Chimie 2015.

Il s’agit de Meddy Elabaddy, élève au lycée Galilée, lycée polyvalent, labellisé lycée des métiers de la chimie, de la plasturgie et des biotechnologies. Il était en 1e STL-SPCL l’an dernier et cette année en Terminale STL-SPCL.

Initialement prévue lors du dernier colloque de novembre « Chimie et changement climatique » organisé par la Fondation Internationale de la Maison de la chimie et reportée à cause des derniers événements, cette remise a été organisée au lycée en présence du proviseur de l’établissement, accompagné de son adjointe, et son professeur de chimie, lorsque Meddy était en première l'an dernier, entouré de ses collègues de chimie et plasturgie.

Guy de Gaulmyn, Président du Village de la Chimie, et Philippe Souweine, au nom de la Fondation, ont remis cette tablette et tenus à féliciter ce jeune pour cette réussite. Ils ont tenu a lui faire part de toutes les opportunités professionnelles que peut offrir ce secteur d’activité riche en diversité et en innovation et de la diversité des métiers exercés dans une grande variété d’entreprises. « La chimie est présente dans un nombre d’activités de plus en plus important ».
 

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Première course internationale de nano-voitures

Le 27 novembre 2015 aura lieu à Toulouse la présentation des équipes internationales qui vont disputer pour la première fois au monde une course de nanovoitures sur la surface d’un monocristal d’or parsemé d’obstacles
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Le 27 novembre 2015 aura lieu à Toulouse la présentation des équipes internationales qui vont disputer pour la première fois au monde une course de nanovoitures sur la surface d’un monocristal d’or parsemé d’obstacles atomiques.

Ces molécules–voitures sont constitués d’un corps sur lequel sont greffés des cyclo-assemblages qui peuvent tourner autour d’un axe, par une prouesse architecturale des chimistes de coordination, elles doivent comporter au moins une centaine d’atomes. Sous ultra-vide et à basse température, elles sont propulsées par des électrons tunnel ou de la lumière autour de plots constitués d’atomes d’or déposés sur la surface.

Cette course qui peut durer plusieurs jours aura lieu en 2016 au Pico-Lab au CEMES-CNRS Toulouse. La présentation des cinq équipes a lieu le 27 novembre 2015 à Futurapolis. Il s’agit des voitures du NanoMobile Club français, du Nanocar Team austro-américain, du Nano-windmill Compagny allemand, du Nano–Vehicle MANA-NIMS Team japonais et du Ohio Bobcat nanowagon team américain.

Ces « molécules » sont fabriquées par des chimistes et mises en œuvre par des physiciens sous ultra-vide dans un microscope à effet tunnel. Cette première mondiale initiée en France par Christian Joachim sera une illustration des progrès accomplis dans le « nano-monde » où la manipulation d’atomes et de molécules un par un ou une par une devient une réalité.

En savoir plus :

Symbole CLP SGH07 (Classification, Labelling and Packaging) J'altère la santé
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Qu’est-ce qu’une attaque chimique ?

Après les attentats abominables qui ont entaché le 13 novembre dernier et révulsé tous les Français, nous avons entendu les hautes autorités de l’État nous mettre en garde sur l’éventualité d’une guerre chimique.
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Après les attentats abominables qui ont entaché le 13 novembre dernier et révulsé tous les Français, nous avons entendu les hautes autorités de l’État nous mettre en garde sur l’éventualité d’une guerre chimique. Qu’est-ce que cela signifie ? C’est la dispersion dans des endroits clos de gaz toxiques susceptibles d’altérer gravement la santé des personnes présentes et même de les empoisonner mortellement.

Quels sont ces gaz chimiques ? La célébration du centenaire de la grande guerre (1) a jeté quelques lumières sur ces gaz dont on rappelle la première attaque en avril 1915 par le chlore (2).

Au cours du conflit 1914-1918, les gaz utilisés ont été de plusieurs types :

  • les suffocants tels le chlore (Cl2) ou le phosgène (COCl2) qui détruisent les alvéoles des voies respiratoires ;
  • les sternutatoires dérivés de l’arsine non mortels mais provoquant éternuements et nausées ;
  • les vésicants très agressifs comme l’ypérite ou gaz moutarde S(CH2CH2Cl)2 qui par contact produisent des brûlures, des aveuglements et attaquent les poumons (3).

Les quantités à mettre en œuvre ou à déverser par de nombreux fûts ou des obus volumineux rendent difficile leur utilisation en pleine ville par des terroristes, sauf par attaque aérienne qui aurait échappé à la sécurité militaire aérienne.

Plus dangereux sont les organophosphorés dérivé de l’isopropanol comme le Tabun ou le Sarin (4) qui à concentration modérée par inhalation entrainent la paralysie respiratoire. C’est ce dernier qui fut utilisé en 1995 dans le métro de Tokyo par des terroristes de la secte Aun Shinrikyo qui a coûté la vie à 12 personnes et intoxiqué momentanément plusieurs milliers d’usagers. L’antidote principal est l’atropine par voie intraveineuse. C’est probablement la menace la plus dangereuse avec ces gaz innervants comme le VX, encore plus mortel. Cependant, leur synthèse reste assez complexe et dangereuse, difficile à réaliser sans équipements spécialisés et des chimistes professionnels. Par ailleurs, les méthodes nanotechnologiques (5) de détection de traces de ces dérivés (6) et d’explosifs sont de plus en plus perfectionnées (7) et à la disposition de la police scientifique (8).

Jean-Claude Bernier
novembre 2015

Quelques ressources pour en savoir plus :

(1) 1914-1918 : la guerre chimique
(2) Berthollet, le pharmacien Curaudau et l’identification du chlore
(3) Il y a cent ans : la guerre chimique
(4) De la difficulté d’éliminer les « armes chimiques » de Syrie
(5) Les nouvelles techniques d’investigation des explosifs
(6) La chimie au service de la sécurité de nos concitoyens
(7) Déjouer le terrorisme chimique : l’apport des nanotechnologies et des détecteurs de gaz toxiques
(8) La police scientifique

- Question du mois
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Le pain complet au levain : meilleur ou pas pour la santé ?

Quelques notions sur la chimie du painLa farine de blé est composée pour l’essentiel, d’environ 70% d’amidon (glucides complexes à base de glucose), 10% de protéines (gluten) et de vitamines parmi lesquelles la vitamine E
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Quelques notions sur la chimie du pain

La farine de blé est composée pour l’essentiel, d’environ 70% d’amidon (glucides complexes à base de glucose), 10% de protéines (gluten) et de vitamines parmi lesquelles la vitamine E est à la fois un anti-oxydant et est indispensable pour le système nerveux et musculaire.

Des éléments chimiques minéraux dits oligoéléments comme le magnésium, le potassium ou le sélénium sont aussi présents dans la farine de blé.

Ces derniers interviennent sur plusieurs fonctions physiologiques du corps humain parmi lesquels les équilibres cardiovasculaire, immunitaire et psychique. Ils participent à sa protection contre les radicaux libres intervenant dans le processus de cancérogenèse et responsables des phénomènes inflammatoires.

Et le levain dans tout ça ?

Le levain est une levure naturelle qui se développe dans un mélange de farine complète et d'eau, grâce aux bactéries présentes sur l’enveloppe du grain de blé. Celles-ci provoquent une fermentation s’accompagnant entre autre de la libération d’acides lactique et acétique.

Il y a plus de 70 familles de bactéries différentes, de compositions diverses, fonctions de facteurs tels que le lieu où le pain est fait, le degré d’hygrométrie, l’acidité, la température…

D’un point de vue diversités qui conduisent à des saveurs différentes, il y a de quoi épater les plus grands viticulteurs ! Comme la levure du boulanger, le levain va provoquer la fermentation de sucres avec comme conséquence le dégagement de dioxyde de carbone, lequel retenu par les couches de gluten (protéines) va aérer le pain.

En revanche le levain, grâce à son action spécifique différente de celle de la levure de boulanger, va de plus « découdre » par des enzymes (dites PHYTASES) les molécules chimiques complexes (dites PHYTATES), qui comme les filets du pêcheur emprisonnent les minéraux tels que le magnésium le potassium et le sélénium.

Les minéraux (oligoéléments), ainsi libérés, deviennent biodisponibles, traversent la barrière intestinale pour passer dans la circulation sanguine et provoquent les effets bénéfiques mentionnés.

Et c’est ainsi que le pain à base de farine de blé complet, fermenté avec du levain, devient plus digeste et apporte tous ses éléments bénéfiques avec de plus un degré de glycémie moindre.

BON APPÉTIT !

Constantin Agouridas


 

Airplane Trails in the Blue Sky
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Le C 919 concurrent de l’A320 ?

Un match Chine, Airbus et Boeing ! La Chine vient de dévoiler son ambition aéronautique. Un nouvel appareil le C 919 long de 39 mètres capable d’emporter 180 passagers sur près de 4000 km vient d’être dévoilé sur le site
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Un match Chine, Airbus et Boeing ! La Chine vient de dévoiler son ambition aéronautique. Un nouvel appareil le C 919 long de 39 mètres capable d’emporter 180 passagers sur près de 4000 km vient d’être dévoilé sur le site de l’usine de Shanghaï devant plusieurs milliers d’officiels et d’ingénieurs chinois. Dès 2016 il commencera son programme d’essais qui devra montrer que les vols se feront en toute sécurité afin de recevoir son certificat d’exploitation internationale à l’horizon 2018.

Avec cet avion, la Chine montre qu’elle veut produire, comme l’Europe et les Etats-Unis, ses propres avions commerciaux et devenir un acteur majeur du transport aérien. Le C 919 se positionne comme un moyen-courrier produit par la COMAC (Commercial Aircraft Corporation of China) dans un marché où Airbus augmente la cadence de production des A 320 compte-tenu du carnet de commandes bouclé pour 7 ans, comme celui de Boeing !

Le fuselage, où dominent les composites (1), et les ailes en aluminium (2) sont conçus et fabriqués en Chine. Une partie des autres éléments est achetée aux meilleurs sous-traitants qui fournissent déjà Airbus ou Boeing. Les moteurs par exemple (3) sont produits par CFM International, coentreprise franco-américaine entre l’américain General Electric et le français Safran, les systèmes électriques par Honeywell (4) et le système de recyclage des eaux usées par le français Zodiac–Aerospace (5) (6). Les trains d’atterrissages sont suisses mais les freins en carbone-carbone sont français (7). Il est bon de rappeler que le transport aérien, qui se développe notamment en Chine, demandera plus de 12 000 avions d’ici 2035 et que ce marché dépend beaucoup de la chimie et de ses innovations (8), bien sûr avec les matériaux mais aussi, ne serait-ce que pour éviter les problèmes électriques, avec les progrès de l’électrochimie (9) ou, pour diminuer l’empreinte carbone, avec les nouveaux carburants biosourcés tels que le biokérosène (10).

Jean-Claude Bernier
novembre 2015

Quelques ressources pour en savoir plus :

1) Matériaux composites à matrices polymères
2) Les alliages d’aluminium pour l’allègement des structures dans l’aéronautique et la carrosserie automobile
3) La combustion et les défis de la propulsion aéronautique et spatiale
4) Énergie en batterie. Des batteries pour la mobilité électrique
5) L’eau : ses propriétés, ses ressources, sa purification
6) L’eau, sa purification et les micropolluants
7) Les composites carbone/carbone
8) La chimie donne des ailes
9) Lithium–ion : de nouvelles batteries antiaériennes ?
10) Les bio-carburants de 2e génération, le projet Syndièse

- Événements

63e congrès de l'UdPPC du 27 au 30 octobre 2015

Université de La Rochelle - Pôle Sciences et Technologie - Bâtiment d'Orbigny Le congrès de l’Union des professeurs de physique et de chimie est l’occasion de formations, d’informations, d’échanges et de mises au point
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Université de La Rochelle - Pôle Sciences et Technologie - Bâtiment d'Orbigny

Le congrès de l’Union des professeurs de physique et de chimie est l’occasion de formations, d’informations, d’échanges et de mises au point sur tous les aspects de l’enseignement des sciences physiques. Mediachimie sera présent à ce congrès dans le cadre de l’activité de l’atelier A3-2 le jeudi 29 octobre 2015 "Utiliser Mediachimie en classe", atelier animé par Freddy MINC, professeur de physique-chimie en BTS chimiste et en classes préparatoires aux grandes écoles et professeur relais au Palais de la Découverte.

Afin de mieux transmettre les connaissances des chimistes d’aujourd’hui aux géné rations futures, la Fondation de la Maison de la Chimie s’est associée avec Canopé et EDP Sciences pour concevoir la première médiathèque dédiée à la fois à la chimie, à ses innovations, à ses métiers et à ses formations. Entourés de scientifiques, d’universitaires et d’experts industriels, la Fondation de la Maison de la Chimie, Canopé et EDP Sciences ont ainsi créé Mediachimie.org.
Comment utiliser le site Mediachimie ?
Comment mener un projet avec les ressources de Mediachimie ?

 

- Question du mois
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Peut-on faire de bonnes confitures sans bassine en cuivre ?

Le fruit est principalement constitué de longues chaînes de molécules appelées pectines. Ces chaînes sont associées aux membranes de cellulose assurant la stabilité intrinsèque du fruit. Deux opérations sont à réaliser
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Le fruit est principalement constitué de longues chaînes de molécules appelées pectines. Ces chaînes sont associées aux membranes de cellulose assurant la stabilité intrinsèque du fruit. Deux opérations sont à réaliser pour obtenir de la confiture : libérer les associations pectines-cellulose grâce à la chaleur et former des ponts entre les chaînes de pectines qui vont alors piéger les molécules d’eau de façon à obtenir un gel. Et c’est ainsi que l’on observe « la confiture prendre ».

Dans la pratique les recettes de confiture indiquent d’ajouter aux fruits du sucre, plus ou moins de jus de citron et de faire cuire fortement le tout, si possible dans une bassine en cuivre, bien propre.

La gélification après dissociation à chaud des chaînes de pectines

Mais que se passe-t-il donc ?

Pour avoir un bon gel il faut que les molécules de pectine soient reliées entre elles « par des ponts ». Les ponts sont essentiellement des liaisons hydrogène ou « ponts hydrogène ».

L’ajout de sucre a deux rôles. Le sucre fixe l’eau favorisant les ponts entre molécules de pectine au détriment des ponts entre l’eau et les pectines et permet d’augmenter la température de cuisson.

L’acidité naturelle des fruits ou du jus de citron ajouté favorise aussi la formation de ces « ponts hydrogène » en contribuant à mettre les pectines sous leur forme acide

Mais alors le cuivre dans tout ça ?

En milieu acide provenant des fruits ou du jus de citron ajouté, le cuivre est oxydé par l’oxygène de l’air en ion cuivrique (Cu2+). Ces ions favorisent la formation de ponts d’un autre type entre molécules de pectines et améliorent « la prise » de la confiture. Un inconvénient toutefois : les sels de cuivre sont toxiques à forte dose. Il faut donc utiliser une bassine en cuivre bien propre et décapée et éviter les vieilles bassines noircies ou ayant des traces de « vert de gris ».

Peut-on contourner l’usage d’une bassine en cuivre ?

C’est bien simple, remplacez la casserole de cuivre par une casserole en inox (inattaquable par les acides) et ajoutez des sels de calcium parfaitement inoffensifs qui joueront le même rôle que le cuivre et qui sont de surcroît excellents pour la santé ! On peut se procurer du carbonate de calcium sous forme de comprimés en pharmacie : il suffit de l’écraser dans un pilon pour en prélever une pincée.

Conclusion : au mélange fruits + sucre + eau dans la casserole en inox, ajoutez du jus de citron et … une pincée de carbonate de calcium.

 

Bonnes confitures et régalez-vous !
 

Constantin Agouridas

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Un prix Nobel de médecine très chimique

On peut regretter que le prix Nobel de chimie 2015 soit très biologique, mais il faut alors se féliciter que celui de médecine soit très chimique. L’irlandais William Campbell et le japonais Satoshi Omura sont récompensés
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On peut regretter que le prix Nobel de chimie 2015 soit très biologique, mais il faut alors se féliciter que celui de médecine soit très chimique. L’irlandais William Campbell et le japonais Satoshi Omura sont récompensés pour la découverte de l’avermectine, molécule base du traitement de l’onchocercose ou cécité des rivières transmise par une petite mouche responsable de plus de 500 000 cas de cécité en Afrique. Le japonais Satoshi Omura a étudié les propriétés antibactériennes de souches bactériennes dans le sol, il en a sélectionné une cinquantaine et c’est à partir de celles-ci que William Campbell et la société Merck ont découvert Streptomyces avermitilis très efficace contre les parasites d’animaux. La chinoise Youyou Tu, elle, a passé au crible 2000 herbes utilisées par la médecine traditionnelle chinoise, et, en étudiant particulièrement l’Artemisia annua, elle a identifié son principe actif, l’artemisinine. Première scientifique chinoise de l’académie de médecine traditionnelle à être couronnée, elle a démontré l’efficacité de cette molécule contre le plasmodium. C’était arrivé à point nommé pour lutter contre le paludisme alors que les traitements antipaludéens rencontraient de plus en plus de résistance dans les années 70-80.

Ces découvertes à partir de plantes (1) ou de microorganismes inspirées parfois par la médecine traditionnelle (2) dans une démarche « ethnopharmacologique » n’est pas nouvelle. Rappelons que l’action antipyrétique de l’acide salicylique (aspirine) (3) a été découverte 400 ans avant J.-C. avec les décoctions de feuilles de saule. Plus près de nous, de nouveaux anticancéreux ont été trouvés : le navelbine grâce à la pervenche de Madagascar (4) et le taxotère grâce aux aiguilles d’if (5) (6). Mais l’extraction de ces principes actifs à partir de ressources cultivées ne suffit généralement pas à couvrir les besoins de millions de malades. Il faut alors passer par la synthèse chimique (7) et c’est la chimie thérapeutique (8) qui doit en recherche trouver les réactions multi–étapes et développer le procédé industriel de fabrication. C’est le cas pour ces Nobel de médecine.

L’avermectine, commercialisée dès 1981, est fournie gratuitement par la société Merck pour permettre les campagnes de traitement en Afrique devant l’énorme problème de cécités engendrées par l’onchocercose. Pour l’artémisinine, la culture et la production à partir de l’armoise (artemisia annua) était insuffisante face aux épidémies de paludisme avec 200 millions de cas et 500 000 décès par an. C’est la société Sanofi qui à partir de levures génétiquement modifiées a préparé l’acide artémisinique qui par catalyse et photo–oxydation dans une réaction très complexe donne l’artémisinine. Ce sont 50 à 80 tonnes fabriquées en Italie qui sont mises sur le marché à prix coûtant. Sanofi a été récompensé pour cette opération en 2012 par le prix Pierre Potier de la fondation de la Maison de la Chimie, créé en 2006 par le Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie en partenariat avec la FFC et l’UIC (9).

Jean-Claude Bernier
octobre 2015

Quelques ressources pour en savoir plus :

1) La nature au labo : la phytochimie
2) La nature pour inspirer le chimiste : substances naturelles, phytochimie et chimie médicinale
3) L’aspirine (Produit du jour de la Société Chimique de France)
4) Un exemple de médicament extrait d’une substance naturelle : la pervenche de Madagascar
5) Taxol et taxotère (Produit du jour de la Société Chimique de France)
6) De l’if à la pervenche : les plantes qui soignent
7) De la conception du médicament à son développement : l’indispensable chimie
8) La chimie thérapeutique : de la biologie chimique à la découverte de nouveaux médicaments
9) Sanofi - Prix Pierre Potier 2012 (trophée) (vidéo 5:36)