| L’Energy Observer, un formidable laboratoire flottant
Rubrique(s) : Éditorial
L’Energy Observer, un ancien catamaran de course avec lequel l’australien Peter Blake avait gagné le trophée Jules Verne en 1994, a été transformé en 2016 en un superbe bateau de démonstration des énergies renouvelables, bourré d’innovations en chimie. Long de 30,5 mètres et large de 13 mètres, son capitaine, Victorien Erussard a entamé en août 2017 le tour du monde en 6 ans et 101 escales sans émettre un litre de gaz à effet de serre (1). Autonome en énergie, ce bâtiment accumule toutes les récentes technologies permises par l’innovation en chimie.
Cela commence par les 130 m2 de panneaux solaires (2) spécialement étudiés par le CEA–Leti avec des cellules bifaces à hétérojonction dont le rendement approche de 22% (3). L’ensemble des cellules couvre le pont, elles sont revêtues d’une couche antidérapante et donnent une puissance crête de 21 kW. L’électricité solaire générée est stockée dans des packs de batteries ion-lithium spéciaux, apportant une réserve d’énergie de 106 kWh (4). La propulsion se fait par deux hélices mues par deux moteurs électriques à fort rendement de puissance de 41 kW chacun et tournant à 3000 tours/minute capable de faire avancer ce navire en composite (5) à une vitesse comprise entre 10 et 15 nœuds. L’astuce de ces moteurs c’est qu’ils sont réversibles en hydrogénérateurs et lorsque le bateau court sur son erre, porté par le vent ou un courant, les hélices engendrent un courant et une puissance de 2x2,5 kW qui peut recharger les batteries. Il y a aussi une autre source d’énergie : sur le pont une trappe s’ouvre sur un cerf-volant automatisé qui sous le vent tire le bateau en augmentant sa vitesse et en réduisant les dépenses d’énergie. S’y ajoute une pile à hydrogène, aussi source d’énergie. En effet ce navire labo dispose d’un électrolyseur (6) qui dissocie l’eau en oxygène et hydrogène. Ce dernier est récupéré sous une pression de 30 bars puis compressé à 150 bars et stocké dans 8 réservoirs pour donner une réserve de 62 kg d’H2. On sait que l’hydrogène est un vecteur d’énergie (7) à travers la pile à combustible qui produit de l’électricité à partir de la recombinaison H2 + O = H2O (8). Pour compléter les sources, deux petites éoliennes à axe vertical peuvent fournir un appoint de 2 kW. On comprend dès lors qu’avec toutes ces technologies d’avant-garde ce « Solar Impulse des mers » (9) aura une autonomie énergétique complète. S’y ajoutent un désalinisateur d’eau de mer qui fonctionne en osmose inverse (10) et dans le dôme de navigation une électronique embarquée (11) et un super logiciel informatique connecté, optimisant la navigation, prenant en compte non seulement l’état de la mer et du vent mais aussi la nébulosité et la gestion de l’énergie.
L’Energy Observer fait route vers la Méditerranée et doit être début décembre en escale à Marseille. Les élèves du Lycée Galilée de Gennevilliers suivent attentivement cette odyssée, ils sont en ce moment à la Cité des sciences et de l’industrie pour se relayer devant une maquette et un démonstrateur d’électrolyse produisant de l’hydrogène et ainsi expliquer les technologies du bateau aux plus jeunes. Ils seront également en décembre à l'escale de Marseille.
Bon vent à cette nouvelle « calypso des mers » ! (12)
Jean-Claude Bernier
Octobre 2017
Quelques ressources pour en savoir plus :
1) Le changement climatique (Chimie et… junior)
2) Les panneaux solaires (vidéo, 2 :34)
3) Un exemple d’énergie renouvelable : panneaux solaires photovoltaïques
4) L’énergie : stockage électrochimique et développement durable
5) Chimie et construction navale
6) Production d’hydrogène par électrolyse de l’eau sur membrane acide
7) L’hydrogène, vecteur de la transition énergétique
8) Fonctionnement de la pile à combustible (vidéo, 1:30)
9) Solar Impulse 2 et la chimie
10) D’eau et de sel (vidéo, 14:00
11) Toujours plus petit ! (Chimie et… junior)
12) Site du projet Energy Observer : http://www.energy-observer.org