Les chimistes ont traduit leurs intuitions théoriques en expériences démonstratives et décisives au fur et à mesure, à partir du XVIIIe siècle, que la chimie devenait une science expérimentale. La synthèse de l’eau par Lavoisier ou celle de l’acétylène (éthyne) par Berthelot ont longtemps figuré dans les manuels scolaires. Certaines découvertes ont donné lieu à des controverses plus ou moins durables, d’autres ont constitué des ruptures dans les connaissances et les théories qui ont pu conduire à des avancées spectaculaires.

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Mots-clés : insuline, diabète, génie génétique, protéine recombinante, histoire, procédés

Voilà 100 ans, le 11 janvier 1922, que pour la première fois un enfant de 14 ans en coma diabétique reçut une injection d’un extrait de pancréas (et donc d’insuline) ; il fut sauvé et survécu 13 ans avec des injections régulières d’insuline.

Quel est le rôle de l’insuline ?

L’insuline est une hormone (i), secrétée par le pancréas, dès que la glycémie (taux de glucose dans le sang) dépasse un seuil. Cette sécrétion favorise un retour de la glycémie à une valeur de base. Son absence ou sa sécrétion insuffisante est responsable des divers types de diabète.

Quelle est la structure de l’insuline ?

L’insuline est une protéine. Sa structure a été décrite en 1955 par Frederick Sanger (ii) et représentée en 3 D par Dorothy Hodgkin (iii) en 1969.

De formule brute C257H383N65O77S6, sa masse molaire vaut 5807 g.mol-1. La structure de l’insuline est complexe. Un premier brin appelé chaine A contient 21 acides aminés (acides aminés notés aa par la suite). Un deuxième brin appelé chaine B contient 30 aa. Ces 2 chaines sont reliées entre elles par 2 ponts disulfures (S-S) entre 2 cystéines de A et 2 cystéines de B. Il existe aussi un pont S-S interne entre deux cystéines de la chaine A. L’ensemble des 2 chaines forme un monomère. Voir image ci-dessous.

Insuline humaine : enchainement des acides aminés et ponts disulfures. Image réalisée par Lydie Amann

Trois dimères se forment grâce à des liaisons hydrogènes entre des aa des chaines terminales de B et sont assemblés entre eux via des interactions avec deux ions Zn(II). L’insuline a donc une structure hexamère.

Insuline humaine et animale

La structure de l’insuline est particulière à l’espèce, mais celles de l’homme, du porc et du bœuf sont très voisines.

L’insuline humaine est différente de l’insuline porcine juste par un aa de la chaine B en position 30. Celle du bœuf diffère en plus par 2 aa de la chaine A en positions 8 et 10.

Les premières insulines administrées aux diabétiques insulino-dépendants

Elles sont extraites de pancréas de bœuf ou de porc, mise en solution acide (pH = 3) et malheureusement imparfaitement purifiées. Le patient doit avoir 3 ou 4 injections par jour. Les impuretés et la différence structurelle de ces insulines sont responsables de réactions locales ou d’allergies. Ainsi, de 1922 jusqu’en 1999 (en France) les diabétiques ont pu recevoir des insulines extraites du porc et du bœuf. Depuis les années 80, les insulines reçues par les diabétiques ont beaucoup évolué.

L’insuline porcine modifiée appelée insuline semi-synthétique humaine

Au début des années 80, l’insuline porcine a subi des transformations enzymatiques permettant de remplacer l’aa alanine en position 30 de la chaine B par l’aa thréonine ; ainsi on obtient une insuline semi-synthétique humaine. Bien qu’apportant au malade une plus grande efficacité, ce procédé nécessitait encore un approvisionnement en insuline porcine et provoquait dans certains cas des réactions de rejet.

Des insulines différenciées pour améliorer rapidité et durée d’action

La notion d’insuline différenciée est liée à la vitesse et la durée d’action. On parle d’insulines, rapides, intermédiaires ou lentes.

Ainsi des insulines rapides sous forme d’hexamères sont injectées pour éviter une augmentation de la glycémie trop importante au moment des repas, tandis que des insulines intermédiaires permettant de combler les besoins humains en insuline indépendamment des repas, sont injectées 2 à 3 fois par jour.

Ces insulines intermédiaires, nommées NPH (Neutral Protamine Hagerdorn), proposées dès 1923 par Hagerdorn, contiennent en plus de l’insuline humaine, des protamines (iv), une quantité variable d’ions Zn2+ et un milieu neutre grâce à un tampon phosphate. Cette formulation injectée diffuse alors lentement dans le corps humain.

L’inconvénient de ces premières insulines différenciées était leur délai d’action et la durée.

L’insuline humaine obtenue par le génie génétique appelée insuline biogénétique humaine ou recombinante

Dès le début des années 80 des insulines humaines obtenues par génie génétique sont apparues sur le marché et depuis 1999 (en France) seules ces insulines sont utilisées.

Très schématiquement, un gène (portion d’ADN) codant pour l’insuline humaine est inséré dans l’ADN d’une cellule hôte, la bactérie Escherichia coli. Celle-ci produit alors de l'insuline humaine grâce au gène supplémentaire intégré. Pour la production de grandes quantités, cette bactérie modifiée est introduite dans un fermenteur où elle se multiplie et produit le composé recherché. Des étapes de séparation et purification sont indispensables.

Pour concrétiser on peut citer pour exemples, deux modes de fabrication industrielle d’insuline recombinante. Ce ne sont pas les seuls.

Dans le premier, il est d’abord créé indépendamment, par génie génétique, les 2 chaines A et B rallongées volontairement par quelques aa dont la présence facilite l’étape chimique ultérieure. À l’issue de ces fermentations ces chaines sont séparées par ultrafiltration ou centrifugation. La création des ponts sulfure (S-S) entre les 2 chaines est alors réalisée par voie chimique. Une chromatographie préparative à basse pression par échanges d’ions est alors réalisée. Une nouvelle étape de réaction chimique ou enzymatique permettant la découpe des aa excédentaires est suivie d’une ultrafiltration puis d’une chromatographie préparative à haute pression (70 bars) sur gel de silice greffé ou non, pour conduire à l’insuline humaine recombinante purifiée à usage pharmaceutique.

Dans le deuxième mode, la bactérie est programmée pour reproduire au cours de la fermentation les chaines AB accrochées entre elles en une seule chaine. Après une séparation / filtration, une découpe par voie chimique ou enzymatique et la création des ponts sulfure sont réalisées suivies d’une chromatographie par échange d’ions. Une purification finale par chromatographie HP est également nécessaire.

Le génie génétique permet aussi de produire des insulines aux actions différenciées.

Les insulines analogues rapides ou lentes

La fin des années 90 a vu arriver les insulines dites analogues rapides et lentes. Elles sont aussi issues du génie génétique. Elles ont pour objectif de modifier la cinétique ou la solubilité de l’insuline.

Ce sont des insulines très légèrement différentes de l’insuline humaine par changement de quelques aa (addition ou soustraction ou échange) et de quelques adjonctions.

On distingue les insulines analogues rapides, à début d’action plus rapide et durée d’action plus courte que l’insuline humaine (lispro (v), en 1996, asparte (vi) en 2000 ou glulisine (vii) en 2004) qui par juste quelques changements (un aa par un autre) permettent de garder la même action au niveau de la glycémie. La rapidité d’action est due au fait que ce n’est plus l’hexamère qui est formé mais le monomère.

Inversement les insulines analogues lentes ou à action prolongée (glargine (viii) en 2000 et détémir (ix) en 2004) par des modifications d’aa permettent un changement du point isoélectrique. Solubles en milieu acide ces insulines précipitent au pH physiologique et les hexamères formés ont ainsi une durée d’action beaucoup plus longue.

On peut citer quelques fabricants d’insuline dans le monde : Novo Nordisk (danois) leader mondial, Eli Lilly (américain), Sanofi-Aventis (français), Biocon en Inde, Wanbang Biopharma en Chine, Julphar au Moyen Orient…

Proche de nous, on trouve des sites de production d’insuline à Chartres (Novo Nordisk), à Fegersheim (Lilly) et Francfort (Sanofi).

D’après le rapport 2019 de la FID (Fédération Internationale du Diabète), « 578 millions d'adultes seront atteints de diabète d'ici 2030 et 700 millions d'ici 2045 ». On mesure l’importance du savoir-faire indispensable pour la production d’insuline.

Aujourd’hui les axes de recherche dans l’amélioration du traitement sont tournés non plus vers une production d’insuline toujours plus active, mais plutôt dans des injections plus efficaces : pompes en boucle fermée avec mesure en continu de la glycémie et injection en continu d’insuline via l’intervention de l’Intelligence Artificielle (c’est ce qu’on nomme le pancréas artificiel). D’autres nouvelles thérapies sont en cours d’étude : ainsi des cellules souches (implantées directement sous la peau) se transforment en cellules béta des îlots de Langerhans (les cellules pancréatiques productrices d’insuline) et produisent de l’insuline directement utilisable par le corps humain.


Monomère insuline humaine

 

(i) En 1922 deux biologistes canadiens Frederick Banting et Charles Best découvrent l’insuline par extraction du pancréas.
(ii) Frederick Sanger a eu le prix Nobel de Chimie en 1958 pour son travail sur la structure des protéines, particulièrement celle de l’insuline.
(iii) Dorothy Hodgkin a eu le prix Nobel de Chimie en 1964 pour « sa détermination par des techniques aux rayons X des structures de substances biochimiques importantes  », ce qui lui permit de déterminer la structure tridimensionnelle de l’insuline en 1969.
(iv) Les protamines sont des petites protéines nucléaires (trouvées au centre de noyaux cellulaires) riches en aa arginine.
(v) Insuline lispro : la molécule comporte une inversion de deux aa en bout de chaîne B, qui ne modifie pas la liaison au récepteur, mais bloque la formation de dimères et d'hexamères d'insuline.
(vi) Insuline asparte : c'est une insuline analogue où un seul acide aminé a été modifié, en particulier une proline avec un acide aspartique à la position B28.
(vii) Insuline glulisine : insuline analogue où l’aa asparagine en position B3 est remplacé par la lysine et la lysine en position B29 est remplacée par l'acide glutamique.
(viii) Insuline glargine : remplacement de l'asparagine par la glycine en position 21 de la chaîne A et par l'extension carboxy-terminale de la chaîne B par 2 résidus arginine.
(ix) Insuline détémir : délétion de la thréonine en position B30 et fixation sur la lysine en position B29 de l’acide tétradécanoïque (ou myristique) de formule CH3–(CH2)12–COOH, ce qui lui permet de se complexer à l'albumine dans le sang. Puis lentement le complexe se dissocie et libère l’insuline.

 
 

 

Pour en savoir plus
(1) Histoire de l’insuline : entre le biologique et l’artificiel, G. El Mghari, S.Baki et N. El Ansari, Service d’endocrinologie, Laboratoire PCIM, Université Cadi Ayyad, Marrakech, Hegel vol. 4 n°2 (2014) p. 208 (DOI : 10.4267/2042/53793)
(2) L’insuline produit du jour Société chimique de France
(3) Les 90 ans de la découverte de l'insuline, par la Fédération Française des Diabétiques
(4) Les insulines, médicaments actuels et évolution dans la prise en charge du diabète insulinodépendant, Thèse Alexandre Bitil (2015), tout particulièrement les modes d’obtention pages 21 à 26 (HAL Id : dumas-01171688)
(5) Le génie génétique à la rescousse des diabétiques Musée Armand Frappier Canada
(6) État des lieux passé et actuel de l’insuline (thérapies, procédés) et perspectives d’évolution, Thèse d'exercice en pharmacie (Toulouse) de Delpech Romain (2015)

 

Crédits :
Illlustration : Monomère insuline humaine par Isaac Yonemoto. Transféré de en.wikipedia.org vers Commons. Premier téléchargement vers en.wp par Takometer, CC BY 2.5, Lien
Figure : Insuline humaine : enchainement des acides aminés et ponts disulfure réalisée par Lydie Amann. DR.

Auteur(s) : Lydie Amann et Françoise Brénon
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Mots-clés : carbone, énergie, feu, combustion, bois, charbon, gaz, pétrole, essence

Quelle réaction a eu le plus d’influence sur l’Histoire et le développement de l’humanité ? Si vous vous posez cette question, pensez donc à la combustion du carbone. […]

Auteur(s) : Jean-Claude Bernier pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : aldéhyde, aldol, cétol, Borodine, méthylisobutylcétone, MIBC, solvant, peinture

À l’académie de Saint-Pétersbourg, Alexandre Porfirievitch Borodine travaillait, sur les aldéhydes, tout en composant un opéra, Le Prince Igor. Mais pris entre ses deux centres d’intérêts, il oublia de publier ses résultats sur la dimérisation de l’aldéhyde valérique (pentanal, CH3(CH2)3CHO), et fut devancé par Kékulé. Son opéra quant à lui fut terminé après sa mort par Rimsky-Korsakov ! […]

Auteur(s) : Jean-Pierre Foulon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : fermentation alcoolique, anaérobie, levures, vin, Pasteur

Le vin est source de croyances profanes ou sacrées. Les Égyptiens l’auraient produit il y a 7 000 ans. Des peintures murales et des jarres trouvées dans les tombeaux l’attestent. Le vin est présent dans la région de Bordeaux depuis plus de 2 000 ans. […]

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.

Auteur(s) : Bernard Médina, Jacques Gaye et Jean-Pierre Dal Pont pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : liaison carbone-métal, magnésium, organomagnésien, Grignard, zinc, palladium, manganèse, cuivre, lithium

C’est par une note présentée à l’Académie des sciences, le 14 mai 1900, que les premières synthèses de couplage organométallique (création de la liaison C-C) sont décrites par Victor Grignard à Lyon, avec toutes les étapes intermédiaires. [...]

Auteur(s) : Jean-Pierre Foulon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Une pile : quel nom étrange ? Quelles sont donc les « choses empilées » dans cet objet ? Pour cela, il faut remonter à la fin du 18e siècle et aux observations de Galvani sur ce qu’il appelait alors « l’électricité animale ».

Luigi Galvani (1737 - 1798) était professeur d’anatomie à l’université de Bologne en Italie, ville pionnière pour l’enseignement de cette science. Au cours de la dissection d’une grenouille dans un laboratoire où étaient présentes des machines électrostatiques, l’un des assistants de Galvani, en touchant avec son scalpel le nerf crural de la grenouille, constata la contraction du muscle de la cuisse, en même temps qu’une étincelle éclatait dans une machine électrostatique à proximité.

Très intrigué par cette découverte, et après de nombreux autres essais, Galvani s’aperçu que cette contraction pouvait aussi être obtenue lorsque l’on mettait en contact deux fils constitués de deux métaux différents, reliés l’un au nerf crural et l’autre au muscle de la cuisse (l’« arc galvanique »). Il en tira la conclusion que les contractions seraient dues à une « électricité animale » qui proviendrait de l’animal et se déchargerait lorsque nerf et muscle seraient reliés par les métaux.

Alessandro Volta (1745-1827) était, lui, professeur de physique à l’université de Pavie. Très intéressé par les expériences de Galvani, il les reproduisit mais eut rapidement des doutes sur l’origine animale de l’électricité. Il lui est venu l’idée, pour amplifier l’effet, d’empiler alternativement des disques de métaux différents, d’abord du zinc et de l’argent, puis du zinc et du cuivre, séparés par des rondelles de carton imprégnées d’une solution saline, par analogie avec les « humeurs » au sein des organismes animaux. Il observa que cette pile pouvait le « frapper » quand il touchait les deux extrémités avec les mains nues, de façon analogue à une bouteille de Leyde (1). Mais, contrairement à cette dernière, déchargée après le premier contact, et à sa surprise, le « choc » était renouvelé à chaque fois qu’il touchait la pile. La pile électrique était donc née.

Les chimistes vont s’approprier cette invention, présentée par Volta, en 1800, à Paris, à l’Académie des Sciences devant Bonaparte, puis à Londres. Davy, à Londres, l’utilise pour isoler le sodium et le potassium, en 1807. Ensuite Gay Lussac et Thenard, isoleront en 1810, à leur tour, ces deux métaux, en utilisant « la grande pile », installée à l’école Polytechnique et construite grâce à un financement de l’empereur Napoléon. C’est la naissance de l’électrochimie.

(1) La bouteille de Leyde, connue depuis 1745, est constituée par une bouteille en verre d’où sort par le goulot une tige métallique, remplie de feuilles d’étain chiffonnées et entourée d’une feuille métallique. Elle était utilisée comme curiosité dans les foires pour donner des chocs électrostatiques.

 

Pour en savoir plus
Ressources issues du site Histoire de l’électricité et du magnétisme (CNRS) :


 


Gravure de U. Parent, extraite de L. Figuier, Les Merveilles de la science, 1867, p. 669 (collection privée)


Expérience de Galvani sur une grenouille (image : Archivist Adobe Stock)

Auteur(s) : Texte : François Nief et Françoise Brénon
Vidéo : Réalisation : François Demerliac ; Auteur scientifique : François Nief et Françoise Brénon ; Production : Fondation de la Maison de la Chimie / Virtuel
Mots-clés : pile, Galvani, Volta, grenouille, électrodes, électrolyte, solution saline, électrolyse, électrochimie
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Mots-clés : Rilsan®, polyamide technique, biosourcé, matériaux

L'’huile de ricin est un laxatif connu depuis l’Antiquité, mais cette réputation ne doit pas faire oublier que l’huile de ricin est à la base, aujourd’hui, du plus grand tonnage mondial de fabrication d’un polymère biosourcé avec plus de 500 000 tonnes par an ! […]

Auteur(s) : Jean-Pierre Foulon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : ammoniac, nitrate, dihydrogène, diazote, Haber, Bosch

Depuis l’Antiquité, les hommes ont cherché à amender la terre pour améliorer le rendement des cultures. Les excréments ont fait partie de ces nombreux agents fertilisants. Ceux des oiseaux marins se sont accumulés aux cours des siècles au point de constituer des gisements très riches en nitrates et composés azotés, connus sous le nom espagnol guano, dans des îles proches du Pérou. Épuisés vers 1870, la relève est venue des nitrates de sodium, présents dans le désert d’Atacama, devenu chilien en 1884, à l’issue de la guerre des nitrates opposant le Pérou, le Chili et la Bolivie. En 1900, 2/3 des besoins mondiaux en nitrates étaient assurés par le Chili. […]

Auteur(s) : Françoise Brénon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : eau, Lavoisier, électrolyse, pile à combustible, électrolyte, catalyseur, électricité

La formation de l’eau dans notre galaxie daterait de plusieurs milliards d’années. Après la formation du Soleil, le gaz résiduel poussé par le vent solaire se refroidit et se condense pour former des planètes gazeuses constituées au départ d’hydrogène H, d’hélium He, d’ammoniac NH3, de méthane CH4 et d’eau H2O. [...]

Auteur(s) : Jean-Claude Bernier pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : Joseph Louis Proust, hémioxyde d’azote, gaz hilarant

En 1798 Humphrey Davy (1778-1829) découvrait à Londres les propriétés euphorisantes de l’hémioxyde d’azote, appelé gaz hilarant et, à l’époque gaz nitreux. Il avait été obtenu en 1772 par Joseph Priestley (1732-1804) dans les produits gazeux de décomposition thermique du nitrate d’ammonium. Les informations circulaient vite entre savants, elles parviennent à Madrid où Joseph Louis Proust (1754-1826), avec d’autres chimistes expatriés français, décide de reproduire les expériences

Il en fait le compte rendu en 1802, à son ami Jean-Claude Delaméthrie (1743-1817), médecin encyclopédiste et directeur du Journal de physique à Paris. Sa lettre est publiée : “Je crois vous avoir écrit, docteur, que je me proposois de respirer l’oxyde d’azote pour prendre part à cette riante ivresse, que les chimistes anglais nous ont annoncée”. Il décrit son matériel, “de vastes vessies bien souples, avec des robinets” (ballons fabriqués avec des vessies d’animaux), il élimine une première partie du gaz, suffocante et comparable à l’impression d’une moutarde forte, “et enfin quand il se montre sucré”, il le recueille pour ses expériences. “Dispos, enfin, assis dans mon fauteuil, et plein de confiance, mais pourtant sous les yeux d’une personne qui pût me dire si les changemens qu’elle auroit aperçus s’annonçoient en moi par des signes d’extase ou des grimaces ; je me mis à respirer largement, après avoir évacué d’abord l’air de mes poumons ; mais, où suis-je ? Le trouble de ma vue, un étourdissement qui croissoit, l’anxiété, les objets doubles, la défaillance enfin termina l’expérience. C’en étoit assez. Je me sentois encore si éloigné de cette douce hilarité qui devoit en être la récompense, que la persévérance me manqua tout-à-fait. Moins confiant, cependant dans ma propre expérience, que dans le récit de personnes aussi recommandables que celles qui ont éprouvé les effets de cette inspiration, j’ai répété les épreuves ; mais comme les résultats en ont été les mêmes, avec plus ou moins d’intensité, j’y ai renoncé.”

Longtemps les chimistes ont identifié les produits par leurs propriétés organoleptiques : goût, odeurs, couleurs. Cependant c’est Proust qui a formulé le premier une définition de l’espèce chimique : les corps purs ont une composition élémentaire constante (loi des proportions définies).

La décomposition thermique du nitrate d’ammonium fondu donne l’hémioxyde N2O (+ 2 H2O). L’hémioxyde est souillé de produits d’oxydation, monoxyde NO et dioxyde NO2 monomère et dimère N2O4. De la première partie du gaz qu’il élimine au début de son expérience, Proust affirme : “Ce n’est pas du gaz nitreux ; il mérite d’être examiné”.

Aujourd’hui l’hémioxyde d’azote a des usages anesthésiants médicaux, mais hélas aussi certains s’en servent de drogue légale euphorisante, non sans danger.

 

Pour en savoir plus :

 

 Joseph Louis Proust / Wikimedia
 

Auteur(s) : Josette Fournier
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