Étymologiquement, « Réfractaire » vient du latin « Refractarius » : résister, refuser de se soumettre. Pour un matériau, sa signification est : qui résiste à de hautes températures, à des niveaux supérieurs à 1500°C. L’histoire des céramiques réfractaires est intimement liée à la conquête des hautes températures, depuis que l’homme a acquis la maîtrise du feu. Elle s’enracine dans la nuit des temps. Les matériaux actuels ne seraient sans doute pas ce qu’ils sont sans les expériences de nos ancêtres. Les matières premières, les techniques d’élaboration, les compositions ont évolué au cours du temps. Ceci a pris plus de 12000 ans.
Les réfractaires sont des céramiques souvent polyphasées, majoritairement à base de mélange d’oxydes, à haute température de fusion. Ce sont des matériaux stratégiques [1], indispensables à d’importants secteurs économiques clé :
- L’industrie primaire tels que la sidérurgie (qui est le plus gros consommateur de céramiques réfractaires, avec une part de marché mondiale supérieure à 60%), la métallurgie des non‐ferreux, la cimenterie, l’industrie du verre, de la céramique qui visent en permanence une amélioration de leurs procédés d’élaboration et de leurs rendements énergétiques ;
- L’énergie : qu’il s’agisse de la pétrochimie ou des applications énergétiques émergentes telles que la production de biocarburants, de chaleur et d’électricité à partir de la biomasse, les piles à combustibles (SOFC), les réacteurs nucléaires et le réacteur de fusion nucléaire ITER, qui nécessitent de nouveaux matériaux céramiques ;
- L’environnement en particulier les fours de traitement et de valorisation des déchets ;
- L’aéronautique, l’aérospatiale et l’armement où les barrières thermiques en céramiques sont utilisées dans les moteurs de propulsion et les revêtements extérieurs des engins spatiaux.
Sans ces matériaux de grande diffusion, notre vie quotidienne serait sans aucun doute beaucoup moins agréable. En effet, nous ne disposerions pas d’acier, de fonte, d’alliages métalliques, de verre, de ciment, etc.
En dehors de l’infusibilité de ces matériaux, les réfractaires doivent posséder un nombre important de propriétés pour résister aux sollicitations qu’elles subissent en utilisation [2]. Dans la mesure où leur comportement est principalement gouverné par des phénomènes de corrosion [3], la composition chimique, la minéralogie, la microstructure et la porosité sont des caractéristiques essentielles.
La connaissance des propriétés thermomécaniques des matériaux et des sollicitations des revêtements (choc thermique, érosion…) sont également à considérer.
Apprécier les propriétés d’usage d’un réfractaire dans un contexte industriel nécessite alors une approche scientifique pluridisciplinaire faisant appel à des connaissances fondamentales en génie des matériaux et des procédés, en thermique, en thermomécanique et en physico‐chimie des hautes températures. Le développement de céramiques réfractaires plus performantes et plus durables (telles que des matériaux auto cicatrisants, adaptatifs, non mouillant par les oxydes laitiers, résistants à H2) afin de faire face à des environnements plus sévères (températures plus élevées, environnement « chimique » plus agressif, chocs thermiques d’amplitudes extrêmes) permettront de répondre aux défis environnementaux et économiques futurs (réduction des émissions de CO2, production d’acier par H2, valorisation des déchets, réduction de la consommation d’énergie).
Vidéo de la conférence (durée : 51:54)
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Références :
1. G. Fantozzi, J.C Niepce, G. Bonnefont, Céramiques Industrielle, 512 pages, Dunod, 2013
2. J. Poirier, Céramiques Réfractaires, Techniques de l’ingénieur, 21 pages, 2014
3. J. Poirier, M. Rigaud, Corrosion of Refractories, FIRE Compendium Series, Volumes 2 A‐B‐C, 1174 pages, Göller Verlag, 2018
Source : Colloque Chimie et matériaux stratégiques, 9 novembre 2022
Niveau de lecture : pour tous
Nature de la ressource : article + conférence